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05/05/2019 Roberto Alagna: Mon dictionnaire intime En collaboration avec Alain Duault
Le Passeur – 256 pages – 19 euros
Il y a douze ans, Roberto Alagna a rédigé sa biographie, Je ne suis pas le fruit du hasard, publiée chez Grasset. Le ténor sicilien naturalisé français se plie cette fois à l’exercice du dictionnaire, avec la complicité d’Alain Duault que la quatrième de couverture présente comme «poète, écrivain, journaliste, animateur radio et de télévision, passeur de musique classique» – oui, tout cela.
Cet ouvrage adopte à peu près le même principe que celui des célèbres Dictionnaires amoureux chez Plon, les rubriques, la plupart succinctes, rarement longues, se révélant de nature essentiellement personnelles. Amoureux, Roberto Alagna l’est assurément, et pas seulement de son épouse, Aleksandra Kurzak – pas un mot, en revanche, sur Angela. C’est que la passion anime en permanence cet artiste attachant et talentueux, d’une sincérité et d’une sensibilité désarmantes. Et le ténor, qui se dit atteint par les attaques portées contre lui, ne manque pas de remercier le public pour tout l’amour qu’il lui témoigne.
L’artiste ne cache pas le drame qu’il a dû surmonter à trente ans, lorsque sa première épouse décéda prématurément, quelques mois après la naissance de leur fille, Ornella, devenue mère à son tour. Il insiste aussi sur les rapports étroits qu’il entretient avec sa famille – ses frères, ses parents – et relate quelques mésaventures: il a failli devenir aveugle à quatorze ans à cause de délinquants et, plus tard, mourir noyé, en mer, au large du Costa Rica. Au fil de ses pages ponctuées d’humour se dégage le quotidien intense du chanteur, mais nous retenons moins ses réflexions, somme toute peu originales, que ses souvenirs et ses anecdotes. Le lecteur désireux de goûter à quelques piques bien senties sur un confrère jaloux ou un chef impossible restera toutefois sur sa faim. Même le conflit qui l’opposa, il y a quelques années, à Alain Lombard lors d’une production de Faust à l’Opéra de Paris – selon l’auteur, pour une histoire de banane – ne l’a pas laissé acrimonieux.
Ce livre sans grande prétention se feuillette donc avec un certain plaisir. Alors que cette publication s’adresse manifestement surtout à eux, les fans qui en savent déjà beaucoup sur Roberto Alagna n’apprendront probablement rien de neuf et de fondamental, aussi parce que le ténor a l’habitude de se livrer depuis longtemps dans la presse, encore récemment sur le divan de Michel Drucker. L’éditeur aurait dû adjoindre à cet exercice d’introspection un cahier avec des photographies de l’artiste et un récapitulatif de sa vie et de sa carrière pour se retrouver un peu mieux dans cette riche et tumultueuse existence.
Sébastien Foucart
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