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L’Orchestre de la Suisse romande en répétitions
01/10/2021


Si bon nombre d’orchestres sont réduits au silence, certains se sont rappelés à nous en nous offrant des documents d’archives en ligne ou en se produisant en streaming dans des salles vides.


L’Orchestre de la Suisse romande (OSR) et son directeur musical Jonathan Nott se sont distingués par une initiative originale qui a été réalisée fin décembre et n’a probablement pas eu la visibilité qu’elle mérite. Au lieu de nous offrir des concerts, ils ont filmé une série de répétitions mise en ligne sur leur à chaîne YouTube. Chef et musiciens travaillent ainsi le dernier mouvement d’Une petite musique de nuit de Mozart, le finale de la Première Symphonie de Beethoven, l’Allegretto grazioso de la Huitième Symphonie de Dvorák, le Prélude des Maîtres chanteurs de Nuremberg de Wagner, le Prélude à l’après-midi d’un faune de Debussy et le dernier mouvement du Concert Românesc de Ligeti.


Si les musiciens sont familiers des deux dernières pièces, ce n’est pas le cas dans Mozart, Beethoven et Dvorák, qui sont ainsi des premières lectures. Même si Nott s’adresse à la caméra pour présenter les œuvres et décrire ce qu’est qu’une répétition, le gros des documents et leur principal intérêt est de voir et d’entendre le travail de «faire de la musique» comme le disait Claudio Abbado. Il ne s’agit pas, comme pour les fameux concerts pour la jeunesse donnés par Bernstein pour un jeune public, de quasi-conférences préparées scrupuleusement à l’avance (et un peu compatissantes parfois). Il s’agit d’un véritable travail de musiciens entre eux.


Le contenu est un peu technique et ne s’adresse peut-être pas vraiment au tout-venant mais les lecteurs de ConcertoNet se régaleront. Jonathan Nott s’y révèle plein de spontanéité, mélangeant français et anglais sans complexes et d’un enthousiasme assez communicatif. Les musiciens sont attentifs et respectueux.


La variété des œuvres permet de confirmer la qualité des musiciens que l’on connaît bien. Ils sont ainsi très à leur aise dans le Debussy, œuvre française qui correspond à leur style. La répétition démarre dès le début à un très bon niveau et est plus une occasion d’expérimenter et d’approfondir, par exemple d’explorer une suggestion de phrasé que propose l’excellent clarinettiste Dmitry Rasul-Kareyev. Les bois, Nora Cismondi au hautbois, Sarah Rumer et Loïc Schneider à la flûte, sont de grand niveau. Le premier violon Bogdan Zvoristeanu pétille de malice derrière son masque dans le redoutable solo du Ligeti, qu’il dévore avec joie.


L’OSR n’est pas un orchestre qui va naturellement trouver le style et les couleurs propres aux œuvres d’Europe centrale. C’est plus le chef qui guide ses musiciens dans la Huitième Symphonie de Dvorák, œuvre qu’ils n’ont pas jouée durant plus d’une dizaine d’années. Après ce qui est une vraie première lecture, le son et le style commencent à se transformer. C’est absolument passionnant et on voudrait vraiment entendre comment le travail pourrait continuer à évoluer lors de répétitions suivantes.


Le chef doit respecter la durée des services et ne peut pas hélas traiter tous les sujets comme il le voudrait s’il avait tout son temps. Dans la session consacrée à Beethoven, il évoque le besoin d’équilibrer les pupitres dans une salle comme Victoria Hall, dont l’acoustique n’est pas idéale. Il est très intéressant de se rendre compte, lorsque le chef se déplace à travers l’orchestre, à quel point les musiciens ne s’entendent pas facilement mais ce sujet fondamental ne peut être traité dans le temps imparti. Cela dit, cela montre bien pourquoi le projet de la Cité de la musique est essentiel pour permettre à cet orchestre de progresser.


L’OSR et Jonathan Nott retrouveront Debussy le 18 janvier pour la production sans public de Pelléas et Mélisande du Grand Théâtre avec Mari Eriksmoen, Jacques Imbrailo et Leigh Melrose dans la production de Damien Jalet et Sidi Larbi Cherkaoui sur un concept de Marina Abramovic. Mais si vous voulez les entendre de l’intérieur et entrevoir ce miracle qui est de faire de la musique ensemble, je ne saurais trop vous recommander ces témoignages uniques.


Antoine Lévy-Leboyer

 

 

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