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L’orchestre dans la ville 07/01/2003
Organisé par l'AFO (Association française des orchestres), le deuxième forum international des orchestre français des 26 et 27 juin 2003 était intitulé « L'orchestre dans la ville » et a permis d’évoquer plusieurs sujets d’actualité, dont, on s’en doutera, la grande salle parisienne. Mais, tout d’abord, inaugurant ces rencontres, le ministre de la culture Jean-Jacques Aillagon a annoncé, « pour clarifier les choses », la publication d'un guide de procédure concernant la nomination des directeurs musicaux et d'opéra. Une initiative bienvenue tant celles-ci se font dans la plus totale obscurité. A suivre.
Les débats évoquèrent notamment la question du financement des orchestres. Après plusieurs intervenants invoquant la notion de « service public » pour justifier les subventions accordées aux orchestres par l'Etat et les collectivités locales, Hervé Boutry, administrateur général de l'Ensemble Intercontemporain, apporta une hauteur de vue bienvenue en critiquant cette approche : le service public peut se comprendre pour l'électricité et la poste, mais ce qui fonde notre action c'est notre « héritage culturel » affirme-t-il. Merci ! Clive Gillinson, Managing director du London Symphony Orchestra affirme, dans le même esprit, que « nous avons une responsabilité à l'égard de l'ensemble de la société et que c'est cela qui justifie notre financement public ». Ainsi l'objectif de l'action éducative ne se réduit pas à remplir ses concerts dans le futur (les élèves iront peut être écouter plus tard de la musique de chambre !). Il cite ce responsable d'un orchestre hollandais qui ne faisait aucun programme pédagogique parce que ses salles de concerts étaient remplies ! Voici à l'évidence un manque total de responsabilité par rapport à la cité. Et cette responsabilité peut être largement « payée » en retour : Michel Fontès, président de l'Observatoire des politiques culturelles de Grenoble, fait remarquer très justement qu'un orchestre constitue un élément d'identification et de fierté pour la population d'une région, même pour ceux qui ne vont pas au concert. On peut être fier de son orchestre comme de son équipe de football !
Ceci dit, on reste quand même sidéré, dans ce colloque, par l'absence totale de réflexion par rapport au mécénat et au financement privé. Tout doit venir de la puissance publique et l'économie privée fait l'objet d'une vision caricaturale sensée incarner tous les maux. De grand progrès restent à faire dans ce domaine...
L'importance de l'éducation musicale à l'école a été rappelée par tout les intervenants et le directeur musical de l'Orchestre de Picardie, Pascal Verrot, a dénoncé l'existence d'une « fracture culturelle » en se demandant si l'Education nationale remplissait bien son rôle... Luttant, lui, de toute son énergie pour combattre cette fracture, Jean-Claude Casadessus, directeur musical de l'Orchestre National de Lille, « laboure le terrain depuis 25 ans » et joue des programmes exigeants dans des petites villes avec le même niveau de qualité qu'à Lille ou au Concertgebouw d'Amsterdam. Un sens de l’exigence qui fait plaisir à entendre.
Mais le principal enseignement de ce forum restera la mise en évidence du fait que ce n'est pas seulement Paris mais la France toute entière qui manque de salles de concerts. On a construit en France beaucoup de « salles polyvalentes » qui ne sont, en réalité, satisfaisantes pour personne, mais les auditorium de qualité ne sont finalement pas si nombreux. La situation actuelle présente de graves lacunes : les orchestres manquent de salles de répétition, il est rarement le gestionnaire de sa salle, seul la moitié en contrôle le personnel d'accueil... Une salle de concerts de qualité est pourtant absolument nécessaire à l'expression de la musique, à la construction d'un son, comme le rappelle Hans Graf, le directeur musical de l'Orchestre National de Bordeaux Aquitaine, qui joue au Palais des sports... L'exemple de l'Espagne, qui a mis en œuvre un ambitieux programme de construction d'auditoriums et possède maintenant un superbe réseau national montre dans quelle direction il faut aller. Premier élément de réponse à la rentrée quand le ministère de la culture donnera ses conclusions suite au rapport Auberger-Belaval (achevé en ce mois de juin) sur la grande salle parisienne.
Le site de l’AFO
Philippe Herlin
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