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CD, DVD et livres: l’actualité de juillet
07/15/2015




Les chroniques du mois



Must de ConcertoNet


   Yannick Nézet-Séguin dirige Ravel


   Pierre-André Valade dirige Murail


   Le pianiste Alexei Lubimov




 Sélectionnés par la rédaction


   Œuvres orchestrales de Bacevicius


   Evgeni Koroliov interprète Beethoven


   Les Terres fertiles de la création musicale


   Andris Nelsons dirige Brahms


   La finta giardiniera à Lille (2014)


   Stewart Goodyear dans Rachmaninov


   János Starker et Zuzana Růzicková




 Oui !

Mark Elder dirige Les Martyrs de Donizetti
Neeme Järvi dirige Suchon
Olga Pashchenko interprète Beethoven
Christian Birnbaum dirige Pleyel
Andris Nelsons dirige Strauss à Amsterdam (2013-2014)
Daniel Barenboim dirige Bruckner à Berlin (2010)
Vincent Dumestre dirige Charpentier et Lully
Vincent Dumestre dirige Clérambault et Couperin
William Christie et «Le Jardin de Monsieur Rameau»
Pawel Kamasa interprète Brahms
Vardo Rumessen interprète Brahms
Burkhard Glaetzner dirige J. C. F. Bach
«Après un rêve» avec l’Ensemble Contraste
Œuvres concertantes pour clarinette de Krommer
Une saison à Belgais de Frédéric Sounac
L’Ensemble Zefiro interprète Haendel
L’Ensemble Aurora interprète Corelli
Six concertos classiques pour harpe
Yury Martynov interprète Beethoven/Liszt
Le Trio Dali interprète Mendelssohn
Le Quatuor Ruggieri interprète Onslow
Ronald Zollmann dirige d’Albert
accentus chante Mantovani



Pourquoi pas?

Maurizio Pollini interprète Beethoven
Evgenia Rubinova interprète Beethoven
Herbert von Karajan dirige La Walkyrie
«Les Grandes Eaux musicales de Versailles»
Matteo Fossi interprète Brahms
Anna Fedorova interprète Rachmaninov
La pianiste Vanessa Benelli Mosell
Narciso Yepes interprète trois concertos
«Edition Chostakovitch» chez Brilliant
Martin Haselböck dirige Beethoven



Pas la peine

Jörg Meder dirige Sardanapale de Boxberg
Lukas Geniusas interprète Beethoven
Œuvres de Robert de Visée
Barry Douglas interprète Brahms
Sofya Gulyak interprète Brahms
Sophie-Mayuko Vetter interprète Brahms
Gabriela Montero interprète Rachmaninov
Lulu à Berlin (2012)
Paul et Matthew Kim interprètent Beethoven
L’Ensemble Contraste interprète Beffa
Lan Shui dirige Beethoven




L’entretien du mois





Vanessa Benelli Mosell





Le match du mois


            

Deuxième Concerto de Rachmaninov: A. Fedorova, S. Goodyear ou G. Montero?





En bref


Zefiro revisite Händel
accentus chante Mantovani
Souvenirs de la maison des arts
Un autre Bach
Parcours sans faute pour le Trio Dali
L’œuvre symphonique et concertant d’Eugen d’Albert
Tout Chostakovitch (ou presque)
La clarinette de Krommer
L’Ensemble Contraste (1): après un cauchemar
L’Ensemble Contraste (2): après un rêve
La harpe classique à l’honneur
Symphonies de Beethoven: début des intégrales Shui et Haselböck
Symphonies de Beethoven (au piano): suite des intégrales Martynov et Kim
Le Quatuor Ruggieri revient à Onslow
Lulu nouvelle version
Un Yepes trop sage
Enrico Gatti, ambassadeur de première classe pour Corelli


Zefiro revisite Händel





Certaines œuvres de Händel sont tellement connues et ont fait l’objet de tant d’enregistrements qu’il est bien difficile aujourd’hui de les interpréter en y ajoutant quelque chose qui n’aurait pas encore été inventé. C’est pourtant le pari que se sont lancé Alfredo Bernardini et l’Ensemble Zefiro qui, il y a peu de temps encore, donnaient la Musick for the Royal Fireworks en recourant à des effectifs pléthoriques – vingt-cinq hautbois, treize bassons, neuf cors, neuf trompettes, une triple paires de timbales! Rien de tel pourtant dans cet enregistrement quelque peu ancien (réalisé en août 2006) où l’on entend seulement trois trompettes, quatre cors et quatre hautbois en sus du reste de l’orchestre. Pour autant, l’impression globale de ce disque est plutôt bonne même si Gardiner, Pinnock et autres Savall restent à notre sens plus convaincants. Car, à trop vouloir en faire, Bernardini finit parfois par susciter l’indifférence: «La Paix» est ennuyeuse et, avec ses contrastes quelque peu excessifs dans les nuances, les deux Menuets étonnent plus qu’ils ne séduisent. Vraie réussite en revanche dans le très beau Concerto a due cori n° 3 avec notamment un sublime premier Allegro – quelle verve! – et un non moins magnifique Allegro conclusif! Dans le Concerto a due cori n° 1, ce sont les anches doubles qui s’en donnent à cœur joie grâce également à une très belle pulsation, qui confère à chaque mouvement un équilibre réjouissant – il suffit par exemple d’écouter l’A tempo ordinario. Dans le plus connu Concerto a due cori n° 2, qui, à notre avis, a déjà fait l’objet d’une gravure idéale signée Trevor Pinnock (Archiv Produktion), Bernardini approche son aîné grâce à un orchestre foisonnant – l’Allegro ou la dynamique conférée au A tempo giusto! – où les divers timbres emportent l’auditeur de la première à la dernière note. Un disque à acquérir donc avant tout pour les trois Concertos que tout amateur de musique baroque ne pourra que rapidement chérir (Arcana A 386)! SGa




accentus chante Mantovani





Sous le titre «Voices», le chœur de chambre accentus interprète avec une éloquente précision quatre œuvres de Bruno Mantovani (né en 1974), trois d’entre elles pour chœur a cappella sous la direction de Pieter-Jelle de Boer (chef associé d’accentus) et la dernière, la Cantate n° 4 «Komm, Jesu, komm» (2012), pour chœur, violoncelle (Sonia Wieder-Atherton) et accordéon (Pascal Contet), sous la direction de Laurence Equilbey. Pour ce clin d’œil à Bach, les deux instruments inventifs jouent un rôle tantôt de continuo tuilé, tantôt de soliste à l’égal du chœur. Les quatre Cantates de Mantovani changent radicalement à chaque fois de style et d’effectif mais ici c’est son traitement d’un même effectif qui se modifie subtilement pour chacune des quatre pièces du programme, composées à la demande de Laurence Equilbey entre 2004 et 2012. Les partitions, certainement virtuoses, sont d’une mise en place délicate et la prestation est à chaque fois d’une clarté et d’une justesse remarquables. Le cycle Cinq poèmes de János Pilinsky (2004), pour chœur de chambre spatialisé en quatre groupes avec trois sopranos et deux altos solistes, s’inspire du mysticisme universel porté par les accentuations boiteuses et les riches sonorités du texte hongrois. Les Vier geistliche Gedichte (2007) ne se plient pas à la ferveur religieuse de Joseph von Eichendorff. Agrémentés de courts solos, les pupitres divisés, par moments proches du cri, procèdent par d’étroites ondulations incantatoires ou par chuchotements étoilés. Le poème évocateur qui irrigue Monde évanoui (Fragments pour Babylone) (2008) est du parolier Pierre Grosz. Le style en est plus onirique: de longues lignes étirées en contrepoint créent une douceur fantasque ou, sur un accord serré en pédale harmonique dans le grave ou dans l’aigu, viennent en soutien de voix plus affirmées. Bien de son temps sans être révolutionnaire, le langage choral du compositeur, habile et finement construit, frappe par sa beauté intrigante. L’interprétation est en tout point admirable (Naïve V5420). CL


Souvenirs de la maison des arts





Maître de conférences à l’Université de Toulouse, Frédéric Sounac a résidé à plusieurs reprises au Centre pour l’étude des arts de Belgais, fondé par Maria João Pires au Portugal et aujourd’hui fermé. Dans Une saison à Belgais (autour de Maria João Pires), il relate son expérience dans ce lieu improbable et utopique, partage ses souvenirs, témoigne des rencontres qu’il y a effectuées et alimente ses propres réflexions en ponctuant son texte, articulé en courts chapitres, d’anecdotes amusantes, cocasses ou touchantes. Même si elle figure en couverture, il s’agit moins d’un portrait de la pianiste portugaise qu’une chronique intelligente et personnelle d’une expérience hors du commun qui a de toute évidence marqué l’auteur. Composite mais nourrissant, ce livre au vocabulaire choisi invite à s’interroger sur le sens de l’art et de la vie (Aedam Musicae AEM-151). SF




Un autre Bach





Cette réédition d’un disque paru en 1993 chez Deusche Schallplatten/Edel est l’occasion de mieux faire connaître la figure de Johann Christoph Friedrich Bach (1732-1795), l’un des vingt enfants de Jean-Sébastien, dont pas moins de quatre (auxquels on peut ajouter un petit-fils) sont devenus compositeurs. Exact contemporain de Haydn, Johann Christoph Friedrich a comme lui la particularité d’avoir passé l’essentiel de sa vie en une principauté reculée – Bükeburg à quelques encablures de Hanovre – et d’avoir voyagé à Londres, pour rendre visite à son frère Johann Christian en 1778. Ce disque permet de découvrir trois œuvres composées à des périodes différentes, mais c’est surtout la toute dernière de ses vingt Symphonies qui retient l’attention. Véritable chef-d’œuvre de son auteur, la Symphonie en si bémol W1/20 composée en 1794 comporte une introduction lente, à la manière du Haydn des Londoniennes, tout en s’illustrant par une riche orchestration avec clarinettes et bassons. On retient surtout de superbes dialogues entre bois et cordes, tandis que l’interprétation légère et allante de Burkhard Glaetzner (né en 1943) rend très fluide le jeu du Nouveau Collegium musicum Bach de Leipzig, sans oublier un soupçon de nervosité dans les deux autres symphonies plus anciennes (W1/6 en en ut et W1/10 en mi bémol), qui rappellent la manière du célèbre frère aîné Carl Philipp Emanuel. Seul regret concernant ce disque: que sa durée – un peu plus de 55 minutes – ne soit pas plus longue! (Brilliant Classics 94780). FC




Parcours sans faute pour le Trio Dali





Après Ravel et Schubert, le Trio Dali consacre son troisième disque à Mendelssohn mais il s’agit du premier enregistrement dans sa nouvelle configuration, Jack Liebeck ayant remplacé Vineta Sareika au violon en 2013. La formation demeure excellente: l’interprétation énergique et ferme des deux Trios s’appuie sur une dynamique marquée et des échanges intenses qui confère beaucoup de caractère à ces œuvres. Malgré la fougue qui les anime, les musiciens jouent avec rigueur et développent une sonorité typée, bien que parfois âpre, tandis que l’approche reste cohérente, sur la forme comme sur le fond, l’éloquence prévalant cependant sur le raffinement. Si le trio affiche une cohésion importante, le jeu de chacun se perçoit nettement. Afin de porter la durée de ce disque à une durée raisonnable, deux Préludes de choral (BWV 659 et BWV 639) de Bach complètent le programme, respectivement transcrits pour violon et piano et pour violoncelle et piano (Zig-Zag Territoires ZZT364). SF




L’œuvre symphonique et concertant d’Eugen d’Albert





C’est à une très belle réédition que nous convie Pan Classics autour de l’œuvre symphonique et concertant d’Eugen d’Albert (1864-1932). Ce corpus reste bien méconnu de nos jours alors que cet Allemand d’origine écossaise et française fut très renommé en son temps, aussi bien pour ses talents de pianiste virtuose qu’en tant que prolifique compositeur d’opéras. On compte ainsi pas moins de vingt ouvrages lyriques dévoilés de 1893 à sa mort, dont seul son chef-d’œuvre Tiefland (1903) reste encore à l’affiche de temps à autre – l’an passé, notamment, à l’Opéra de Francfort. C’est donc à la première période créative de d’Albert que ce double disque, enregistré en 1993 et 1995, s’intéresse en regroupant des œuvres composées avant 1899, à l’exception de l’Ouverture de l’opéra L’Improvisateur (1902). Dans le Premier Concerto pour piano (1884), on perçoit encore l’influence marquante de Liszt, auquel l’œuvre est dédiée. Cet ouvrage d’une ampleur importante – plus de 40 minutes, à l’instar de son unique Symphonie en fa majeur – se distingue par une curieuse construction en cinq mouvements, en des ambiances méditatives où le piano domine. Même atmosphère songeuse dans le grave Concerto pour violoncelle (1899), où les mélodies fuyantes déroutent quelque peu, démontrant ici l’influence de Brahms et de son Second Concerto pour piano. Si la Symphonie en fa majeur (1886) se montre encore trop académique, elle démontre néanmoins un certain caractère, tandis que le Second Concerto pour piano (1893) annonce la manière d’un Rachmaninov par son toucher aérien et gracieux, accompagné d’un beau lyrisme aux cordes. Un double disque idéal pour comprendre l’évolution du style du compositeur, merveilleusement rendu par le chef belge Ronald Zollman (né en 1950), à la tête de l’Orchestre symphonique de Bâle et de l’Orchestre symphonique de Barcelone et national de Catalogne, bien épaulé par le pianiste Karl-Andreas Kolly et le violoncelliste Antonio Meneses autour d’une lecture narrative toujours passionnante (PC 10336). FC




Tout Chostakovitch (ou presque)





Moins d’un an après une «Edition Chostakovitch» de cinquante et un disques, Brilliant Classics, fidèle à ses coffrets géants, publie une... «Edition Chostakovitch» qui ne diffère que sur un point mineur: elle ne compte plus que quarante-neuf disques, ayant sacrifié les gravures historiques des Oïstrakh, Rostropovitch, Mravinski et autres Kondrachine. Introduit par une notice très synthétique (en anglais) présentant les œuvres au fil de la biographie, le reste est rigoureusement identique et, comme souvent chez cet éditeur, assez composite, pas tant du point de vue de l’origine des enregistrements (Brilliant, bien sûr, mais aussi Avie, Challenge Classics, Le Chant du monde, Capriccio, Delos, EMI, Naxos, NMC, Ode Records, Signum, Stradivarius...) que de la qualité des interprétations (datant presque toutes du dernier quart de siècle) et de la pertinence des œuvres choisies. Sur les près de cent cinquante opus catalogués de Chostakovitch, environ un tiers manquent à l’appel (alors que certains apparaissent en double ou dans des combinaisons instrumentales différentes), mais ce ne sont pas les plus importants (hormis sans doute Le Nez, Le Chant des forêts et L’Exécution de Stepan Razine) et plusieurs œuvres ne portant pas de numéro d’opus sont en outre présentes.
Plus de la moitié de cette somme – 51 heures et 36 minutes de musique – consiste en des intégrales. Ce sont d’abord les quinze Symphonies dirigées par Rudolf Barchaï entre 1992 et 2000 à la tête de l’Orchestre de la Radio de Cologne (WDR): le créateur de la Quatorzième convainc le plus dans les Quatrième, Neuvième, Douzième et, davantage encore, une explosive Treizième; avec un piètre Orchestre symphonique de Milan Giuseppe Verdi, il dirige également en 2005 (en public) cinq «symphonies de chambre» (en fait, des quatuors à cordes arrangés pour orchestre à cordes ou de chambre). Les six concertos sont globalement décevants, le violon de Dimitri Sitkovetski n’ayant pas de mal à s’imposer sur le violoncelle scolaire d’Alexander Ivashkin et sur le piano dur de Cristina Ortiz (d’autant que le coffret se conclut sur l’incomparable version réalisée à Paris par le compositeur lui-même sous la baguette de Cluytens). Le Quatuor Rubio, indépendamment de sa sonorité désagréable, passe malheureusement à côté des quinze Quatuors (2002), la Sonate pour violoncelle et piano, le Second Trio avec piano, le Quintette avec piano n’étant guère mieux servis, à la différence des ultimes Sonate pour violon et piano et Sonate pour alto et piano, confiées l’une comme l’autre à Isabelle van Keulen et Ronald Brautigam (1992). L’intégrale de la musique pour piano seul offre en revanche des aperçus intéressants, principalement le grand cycle des Préludes et Fugues par Muza Rubackytė (2006), mais on ne trouve aucune œuvre pour deux pianos, pas même le célèbre Concertino. Cela étant, l’intégrale la plus captivante de ce coffret est certainement celle des mélodies (avec piano ou avec orchestre), un pan assez peu connu de la production du compositeur russe mais qui recèle de véritables pépites, ici mises en valeur par un ensemble de chanteurs globalement convaincants (1995-2003).
La vingtaine d’autres disques est d’abord dominée par une sélection assez généreuse d’intégrales ou de suites de musiques de film, la plupart peu connues, alternant l’étonnant (Seule, La Nouvelle Babylone) et le convenu, pour ne pas dire l’académique ou le pompier. Le principal ouvrage lyrique, Lady Macbeth (dans la version réalisée en 1979 autour de Rostropovitch et Vichnevskaïa), est accompagné non pas du Nez, comme on l’a vu, mais d’un opéra inachevé (Les Joueurs d’après Gogol) et d’un opéra de... Benjamin Fleishman (Le Violon de Rothschild), achevé et orchestré par Chostakovitch en hommage à son confrère disparu pendant la guerre. Au rang des bizarreries modérément utiles, le ballet La Demoiselle et le Voyou ne consiste en fait qu’en un habile pot-pourri de courtes pièces de Chostakovitch assemblé par le chorégraphe Konstantin Boyarsky. Les Suites de jazz, rendues célèbres par le miraculeux disque de Chailly, ne sont pas oubliées, mais dans une version où la baguette de Theodor Kuchar paraît plus efficace que légère. De tout cela, on est cependant consolé par un très beau programme choral (Dix Poèmes sur des textes de poètes révolutionnaires, Dix Arrangements de chansons populaires russes).
En conclusion, un fourre-tout dont le prix défiant toute concurrence parvient à excuser le caractère brouillon et disparate (4920). SC




La clarinette de Krommer





Si le répertoire orchestral de Franz Krommer (1759-1831) a été défendu avec bonheur par Matthias Bamert et ses London Mozart Players en 1994, on lui doit aussi une considérable production chambriste (voir notamment ici), sans parler du répertoire dédié aux vents. Par le passé, ses concertos pour clarinette ont été notamment défendus par les Meyer – Paul, Sabine ou Wolfgang –, de nombreux interprètes ayant perçu toutes les qualités de ses œuvres, qui annoncent de très près Weber. Avec cette réédition d’un disque paru en 2004 chez Pan Classics, on retrouve ici le superbe Concerto pour deux clarinettes, avec les Suisses Curzio Petraglio (né en 1966) et Frédéric Rapin (né en 1955), déjà plusieurs fois enregistré, particulièrement sous la direction de Libor Pesek (1992, Supraphon). Par rapport à Jakub Hrůsa (né en 1981) et la passable Philharmonie de chambre de Bohème du Sud de Ceské Budějovice, la lecture du bouillant chef de l’Orchestre de chambre de Prague s’avère infiniment supérieure par son geste vif empli de caractère, bien aidé par un superlatif pupitre de cordes. Un disque à posséder absolument pour les amateurs de ce répertoire. On pourra néanmoins faire l’achat du présent disque pour la très belle œuvre gravée en complément, la seconde et dernière symphonie concertante de Krommer, partition lumineuse d’une vitalité rythmique irrésistible, si agréable dans l’entrecroisement des différentes sonorités des instruments ici réunis – le tout dans une bonne version, agile et transparente, idéalement soutenue par les solistes, la flûtiste suisse Brigitte Buxtorf (née en 1943), Frédéric Rapin et le violoniste Jakub Cernohorský (Christophorus CHE01992). FC




L’Ensemble Contraste (1): après un cauchemar





Intitulé «Into the dark», voici un album d’œuvres pour orchestre à cordes seul ou avec soliste de Karol Beffa (né en 1973): une musique claire, consonante, mélodieuse, au caractère souvent méditatif et lancinant. Elle inspire, selon l’humeur, la sérénité, l’indifférence ou l’agacement car ce qui frappe à l’écoute du Concerto pour alto (2005), du Concerto pour harpe (2013), de Dark pour piano et orchestre (2013), de Nuit obscure (2012), de Dédale (1999) et de Rainbow pour piano et orchestre à cordes (2013), c’est la pauvreté du langage et de l’inspiration. Ces compositions accessibles mais frustes, tièdes, voire monotones et ennuyeuses, bénéficient pourtant d’une exécution de haut niveau: l’Ensemble Contraste, la mezzo Karine Deshayes et le compositeur lui-même au piano (Aparté AP108). SF




L’Ensemble Contraste (2): «Après un rêve»





Au même moment, un autre disque de l’Ensemble Contraste avec Karine Deshayes sort chez le même éditeur. Intitulé «Après un rêve», il est consacré à de courtes œuvres instrumentales et vocales écrites au XIXe siècle par des compositeurs français, mêlant le connu (Elégie et Méditation de Thaïs de Massenet, «Le Cygne» de Saint-Saëns, Après un rêve de Fauré, La Chanson perpétuelle de Chausson) et le moins connu (Berceuse de Jocelyn de Benjamin Godard). Dans les mélodies, d’autres instruments (violon, violoncelle) se joignent au piano accompagnent la chanteuse – Johan Farjot a d’ailleurs transcrit à cette fin trois des mélodies de ce programme. La mezzo-soprano, à la voix magnifique, puissante et charnue, confirme la distinction de son art du chant. Ses partenaires témoignent eux aussi d’un sens de la mesure et de la maîtrise des affects. Surprise: la dernière plage, après La Captive de Berlioz, est complétée, alors que le livret n’en indique rien, par la Pavane de Fauré (Aparté AP106). SF




La harpe classique à l’honneur





Parfait produit pour les amateurs de harpe, ce double disque, déjà édité comme tel en 2006, réunit divers solistes et orchestres sur la première galette, avec des œuvres de Haendel, Mozart et Boieldieu jouées par les harpistes Charlotte Balzereit et Giselle Herbert ainsi que le flûtiste Marc Grauwels, tout en y adjoignant une seconde, plus cohérente, réalisée en 1999 par Jana Bousková sous la direction de Vladislav Czarnecki (avec l’Orchestre de chambre de Pforzheim) pour Bayer Records, avec des œuvres de Dittersdorf, Albrechtsberger et Wagenseil. Curieusement, c’est la somme plus inégale du premier disque qui convainc davantage, avec de bonnes formations (Orchestre de chambre de Stuttgart, Les Violons du Roy, Staatskapelle de Dresde) et des qualités d’enregistrement très satisfaisantes autour de directions classiques mais efficaces (Nicol Matt, Bernard Labadie et Siegfried Kurz). Le second disque est moins réussi à l’aune de ces critères, avec un léger flou dans la prise de son et un pupitre de cordes décevant, sans parler d’une direction un peu sèche. Un bon double disque néanmoins, qui, nonobstant son titre («Romantic Harp Concertos»), permet d’aborder dans les meilleures conditions ce charmant répertoire des concertos classiques du XVIIIe siècle (Brilliant Classics 95167). FC




Symphonies de Beethoven: début des intégrales Shui et Haselböck


         


Dans le répertoire classique et romantique, l’influence des interprétations «historiquement informées», comme les qualifient les anglophones, s’est étendue à l’ensemble des formations, qu’elle jouent ou non sur instruments «anciens», ce dont témoigne, avec un bonheur inégal, le lancement récent de deux nouvelles intégrales des Symphonies de Beethoven. Dans le premier volume de son intégrale, qui comprend les quatre premières symphonies, Lan Shui (né en 1957) caricature lourdement la manière des «baroqueux». Enregistré entre juin 2009 et décembre 2012 à la tête du Philharmonique de Copenhague, dont il est le chefdirigent depuis 2007, le chef sino-américain cumule les partis pris contestables: raideur, précipitation – au prétexte de suivre les tempi indiqués par Beethoven – et même maniérisme (album de deux disques Orchid Classics ORC100045). Sec et peu agréable, l’orchestre joue sur instruments «modernes» à l’exception des cuivres et timbales, mais les instruments «anciens» de l’Orchestre de l’Académie de Vienne, avec son fondateur et directeur artistique, Martin Haselböck (né en 1954), sonnent de manière autrement plus séduisante. Intitulée «Re-Sound Beethoven», la série est fondée sur un concept simple: enregistrer en public les Symphonies dans les lieux pour lesquels elles ont été conçues ou, en tout cas, où elles ont été jouées du vivant du compositeur – ainsi de ces Première et Deuxième captées début décembre 2014 au Palais de Basse-Autriche. Comme le soulignait notre correspondant viennois à l’occasion du compte rendu d’un de ces concerts, l’expérience est stimulante, mais même si le disque, à en croire la notice, s’efforce de restituer «les particularités acoustiques de chacun des lieux», elle perd sans doute à ne pas être vécue sur place, ne serait-ce que parce que l’œil n’est nécessairement pas aussi bien servi que l’oreille. Cela étant, le résultat, s’il reste en retrait des grandes versions comparables, de Brüggen à Gardiner, et s’il agace avec ses reprises systématiques jusque dans le da capo du scherzo, est autrement plus musical qu’à Copenhague: Haselböck ne confond pas vitesse et précipitation, les textures orchestrales se font volontiers moelleuses et le tout ne se refuse pas à une certaine souplesse (Alpha 470). Bonne nouvelle, en somme, car cette comparaison confirme que la querelle entre écoles d’interprétation est aujourd’hui dépassée: les cartes sont complètement brouillées, puisqu’on en vient à reconnaître aux uns les qualités qu’on attendait des autres, et à regretter chez ceux-ci les défauts qu’on prêtait jadis à ceux-là... SC




Symphonies de Beethoven au piano: suite des intégrales Martynov et Kim


         


Deux intégrales des Symphonies de B>Beethoven poursuivent leur cours, la première approchant de son but.
Après les volumes consacrés aux couplages des Deuxième et Sixième, Première et Septième, puis Troisième et Huitième, Yury Martynov (né en 1969) associe les Quatrième et Cinquième, dans leur transcription lisztienne. Le talent de l’interprète et la richesse du Blüthner de 1867 (restauré par Edwin Beunk) se conjuguent pour offrir un Beethoven puissant et intelligemment bâti, à la rythmique complexe, aux dynamiques évolutives. Sérieux dans l’Opus 60. Débonnaire dans l’Opus 67. Un disque gravé aux Pays-Bas en 2014, et un projet dont on a hâte d’entendre le dénouement en forme, on l’espère, d’hymne à la joie (Zig-Zag Territoires ZZT 356).
Publiant le «volume 3» de son intégrale (les deux premiers albums étaient consacrés aux Première, Deuxième et Neuvième), Paul Kim livre sa propre transcription de la Troisième, qu’il interprète lui-même dans ce disque enregistré à New York en 2010. Une adaptation fidèle mais aussi très littérale de l’Héroïque, l’impact émotionnel étant circonscrit (et même amoindri) par le cadre étroit du piano moderne – notamment la «Marche funèbre», sans relief aucun. Et par une exécution droite, affirmative et plutôt véhémente – mais qui manque singulièrement de rubato voire de puissance. Le transcripteur américain laisse son fils, Matthew Kim, interpréter des Variations «Eroica» assez réussies (qu’on aimerait plus véloces et plus inventives) pour compléter cet album dont on attendait davantage (Centaur CRC 3331). GdH




Le Quatuor Ruggieri revient à Onslow





Le beau style ciselé et intense du Quatuor Ruggieri met en relief pour une deuxième fois la belle facture de la musique de chambre de George Onslow (1784-1853). Prolifique, pendant un temps le plus viennois des compositeurs français, il inscrivit à son catalogue non moins de trente-six Quatuors à cordes, corpus qui attire petit à petit l’attention des quartettistes comme le font les trente-quatre Quintettes à cordes à deux altos, à deux violoncelles ou avec contrebasse. Depuis l’an 2000, les Quatuors Mandelring, Diotima et Ruggieri ont porté près de la moitié des quatuors à la connaissance du public mélomane. Le Quatuor Ruggieri se concentre principalement sur l’année 1812, quand le style d’Onslow, plus classique que romantique, relevait encore en grande partie de la première école de Vienne. Leurs instruments cordés en boyaux, résonnants et clairs, y conviennent tout à fait. Ce second récital consacré au maître auvergnat présente les Quatrième, Sixième et Douzième Quatuors, c’est-à-dire l’éloquent premier quatuor de l’Opus 8 et, encore inédits au disque, les troisièmes de l’Opus 8 et de l’Opus 10 – Onslow a composé les quatuors par groupes de trois jusqu’en 1833. La première période compositionnelle est à son apogée en 1812 et les quatuors, en quatre mouvements, regorgent d’originalité, d’esprit et de vie. Une élégance allègre côtoie le recueillement et la beauté harmonique des thèmes mélodiques n’empêche la profondeur des sentiments, ce en particulier dans les introductions Largo et les mouvements lents. Dans le Douzième Quatuor, Onslow renoue avec son temps et l’intérêt que l’on portait aux musiques traditionnelles en fondant la grande vitalité du Minuetto sur un air de danse auvergnat. La prestation du Quatuor Ruggieri est de haute tenue, préservant à ces partitions encore trop peu connues leur grande intensité lumineuse (Aparté AP105). CL




Lulu nouvelle version





L’acquéreur potentiel ferait bien de lire attentivement le dos du boîtier avant de se décider. Il ne s’agit pas de la version familière de Lulu complétée par Friedrich Cerha mais d’une nouvelle, d’un certain David Robert Coleman (né en 1969), comprenant la suppression du Prologue et du début du troisième acte ainsi qu’une nouvelle orchestration du troisième acte. La raison avancée est prétentieuse, la démarche ayant été entreprise, selon la notice, pour mieux «concentrer l’action» et «souligner la structure métrique» du chef-d’œuvre de Berg. Le résultat ne convainc pas vraiment de l’utilité entreprise, la version de Cerha conservant sa légitimité pour probablement encore longtemps. La mise en scène d’Andrea Breth au Staatsoper im Schiller Theater de Berlin en 2012 peine à soutenir l’attention à cause d’une direction d’acteur banale et figée. Une structure métallique et des carcasses de voitures dominent le décor unique. Dans le genre sordide, c’est relativement réussi, mais ces personnages parasites qui gesticulent à l’arrière-scène deviennent un tic à l’opéra aujourd’hui – Warlikowski en est le champion. La direction de Daniel Barenboim demeure trop souvent linéaire, pas toujours puissante, insuffisamment narrative. Parmi les chanteurs émergent surtout le Docteur Schön de Michael Volle et la gracile Lulu de Mojca Erdmann. La voix de la soprano au visage de femme-enfant s’avère plutôt mince mais elle tient bon (Deutsche Grammophon 0440 073 4934 2). SF




Un Yepes trop sage





Pentatone rend hommage au guitariste Narciso Yepes (1927-1997) autour de la réédition remasterisée d’un enregistrement paru en 1977 chez Deutsche Grammophon et réunissant trois célèbres concertos pour son instrument de prédilection. On passera sur le premier, où le classicisme de Mauro Giuliani (1781-1829) ne survit guère à la lecture par trop détaillée d’un Yepes qui se complait dans une morne lenteur. A ses côtés, Luis Antonio García Navarro (1941-2001), à la tête de l’Orchestre symphonique de Londres ou de l’Orchestre de chambre anglais, joue les seconds rôles, très appliqué, mais par trop discret. Le Premier Concerto de Mario Castelnuovo-Tedesco (1895-1968) leur réussit mieux, même si l’on reste dans cette optique bien sage, d’une extrême lisibilité. C’est dommage, car cette œuvre composée en 1939, la même année que le célèbre Concerto d’Aranjuez, mérite bien davantage de piment. Finalement, c’est bien le rêveur et sensible Concerto pour guitare de Villa-Lobos, composé en 1951, qui convient le mieux au geste sensible de l’Espagnol. On perd ici en urgence ce que l’on gagne en lyrisme délicat et pudique. A noter la sortie le 10 juillet (avec le même éditeur) d’un autre disque consacré à Narciso Yepes, cette fois autour des œuvres de son compatriote Joaquín Rodrigo (SACD PTC 5186 202). FC




Enrico Gatti, ambassadeur de première classe pour Corelli





L’Ensemble Aurora, fondé par le violoniste Enrico Gatti (né en 1955) en 1986, n’a jamais perdu de vue Arcangelo Corelli (1653-1713), dont il a enregistré de très nombreuses sonates (publiées chez Tactus et Arcana), en particulier les splendides Sonate a tre op. III, disque remarquable par sa finesse et son sens de l’interprétation. Le voici qui récidive, accompagné par ses alter ego Gaetano Nasillo au violoncelle et Anna Fontana au clavecin, dans les Sonates d’Assise, datant vraisemblablement de l’année 1675, ainsi nommées car tirées du manuscrit de la bibliothèque du Sacro Convento d’Assise (et découvertes en 1963 seulement, la paternité de Corelli n’ayant été admise que récemment). Comportant chacune trois brefs mouvements (un lent et deux rapides), elles se caractérisent avant tout par une très grande finesse même si Corelli ne fait pas encore montre de l’imagination et de la maîtrise qui sera ultérieurement la sienne: ce ne sont encore là que des œuvres de jeunesse. Ainsi, le deuxième mouvement de la Sonate n° 1 en ré majeur s’apparente presque à un exercice sur l’art de bien user de son archet, d’enchaîner avec aisance les intervalles et d’insérer proprement ses appogiatures. Les contrastes existent néanmoins dans ces pièces savoureuses, qu’il s’agisse d’opposer par exemple le recueillement du premier mouvement de la Sonate n° 10 en sol mineur à son troisième mouvement, beaucoup plus véhément, ou des sonates dominées évidemment par le violon à celles qui laissent davantage de place aux autres instruments comme le clavecin (troisième mouvement de la Sonate n° 5 en la mineur). Et même si les trouvailles ne sont pas toujours évidentes (certaines sonates étant construites sur les mêmes thématiques comme le montre le début tant de la Sonate n° 6 que de la Sonate n° 12), on perçoit ici ou là les couleurs et l’articulation des œuvres de la maturité de Corelli (le premier mouvement de la Sonate n° 3 en ré mineur): un excellent disque d’introduction, qui plus est original dans le choix des œuvres, à l’univers d’un grand maître italien (Glossa GCD 921209). SGa



La rédaction de ConcertoNet

 

 

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