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Le mois du mélomane professionnel
03/01/2013





En sortant d’une représentation de La Khovantchina, on est bien content de ne pas avoir à passer une interrogation sur l’histoire qu’on vient de voir, tellement elle est compliquée. Heureusement qu’il y a la musique, si riche, si émouvante et le beau chant russe. Pauvre Moussorgski qui a eu besoin de Ravel pour orchestrer ses Tableaux et de Rimski-Korsakov et Chostakovitch pour La Khovantchina. Ce qui n’enlève rien à son génie. Il suffit d’écouter ses Tableaux au piano pour s’en convaincre. Le chef, Michail Jurowski, connaît parfaitement cette musique et imprime son enthousiasme à l’orchestre et aux chanteurs. La scène de l’immolation des vieux croyants est un peu décevante mais l’ensemble est très réussi. Le public est enchanté et le montre.


Quelle famille! Le même mois, et c’est le mois le plus court de l’année, on a vu le père Michail à la Bastille, Vladimir sur Mezzo à Glyndebourne dans un Don Giovanni très beau dans sa simplicité et où l’on entend le duo Leporello-Zerlina du second acte qu’on n’entend presque jamais, et Dimitri à Anvers dans une production de Nabucco par l’Opéra de Flandre, repensé par l’anglais Daniel Slater dans une modernité tout à fait crédible. Il n’y a plus de Jérusalem ni de Temple ni de prêtres mais uniquement des opprimés de notre temps, opprimés par le pouvoir politique ou par celui de l’argent. Les cotations boursières font partie du paysage. Vu les libertés que l’opéra prend avec l’Histoire et la Bible, tout peut lui être pardonné. Le chœur, dirigé par Yannis Pouspourikas est parfait et pas seulement dans le «Va pensiero». Vu la qualité des productions de l’Opéra de Flandre, dont le directeur, Aviel Cahn, est toujours plein d’idées, on attend impatiemment Parsifal en mars et avril.


Puisque nous sommes avec Moussorgski, disons l’immense déception que nous avons eue avec son Boris en direct de Munich dans une mise en scène lamentable de Calixte Bieito. On n’a même pas eu droit à une scène «osée» d’une orgie à l’acte polonais, absent, ni à la réunion de la Douma où, à la place de la dernière scène de la forêt, absente elle aussi, on nous montre Gregory-Dimitri assassiner Xenia et Feodor, qui est d’ailleurs natté, a des seins marqués et porte une jupe. Wolfgang Sawallisch, qui nous a quittés il y a quelques jours, a abandonné l’opéra à cause des metteurs en scène. Comme on le comprend parfois.


Très grande surprise au CNSMDP avec Reigen de Boesmans par les élèves du conservatoire. Si l’on ne savait pas que c’était des élèves on ne l’aurait pas deviné. Encore une bonne mise en scène, sobre, délicate pour un sujet qui ne l’est décidément pas. Boesmans est là et nous évoquons des souvenirs de la création de l’opéra il y a vingt ans. J’étais à Bruxelles à la première. Rentré chez moi, j’ai regardé La Ronde de Max Ophuls avec toute la crème du cinéma français d’après-guerre. Quelle soirée!


1942. J’ai 12 ans. Ça va très mal sur tous les fronts. Churchill passe son temps à nous montrer le «V» de la victoire pour nous donner du courage. On passe la Cinquième de Beethoven partout parce que le V est le 5 latin et parce que la transcription du V en morse est - - - – comme le début de la symphonie. Ce signe devient l’indicatif de la radio de Londres. En même temps, je découvre le Concerto pour violon de Beethoven et décide d’abandonner la clarinette pour me donner entièrement au violon. Imaginez-vous l’émotion que j’ai pendant le concert de l’Orchestre national d’Ile-de-France où l’on joue ces deux œuvres sous la direction de Yoel Levi et avec, comme soliste, une vraie découverte. Encore une jeune violoniste extraordinaire, l’Allemande Veronika Eberle. Je ne parlerai pas de nostalgie, car dans ce terme il y a une référence à l’algie, la douleur, et tout en n’étant pas du tout masochiste, je n’ai que du bonheur. Il y a eu aussi la création d’Intermède pour une mer jamais vue, une belle œuvre d’une jeune Chypriote, Christina Athinodorou, lauréate d’un concours de composition soutenu par Musique en Liberté.


Les Victoires de la musique classique, intéressantes comme toujours. Comme ce fut beau de voir et d’entendre les sœurs Nemtanu jouer le Double Concerto de Bach, accompagnées par l’orchestre dont le premier violon solo est leur père, Vladimir. Mais si cette soirée pouvait être moins longue avec moins de bavardages des présentateurs, on aurait encore plus de plaisir.


Benjamin Duvshani

 

 

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