About us / Contact

The Classical Music Network

Editorials

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

CD, DVD et livres: l’actualité d’avril
04/15/2012



Les chroniques du mois




 Sélectionnés par la rédaction


    Amarillis interprète J.-C. Bach


    CD Günter Wand dirige Bruckner


    Tra Nguyen interprète Raff


    Weinberg par A. Brewster Franzetti




 Oui!

Monographie Maurice Denis et la musique
Quatre œuvres de Iannis Xenakis
Le Quatuor Arditti interprète Birtwistle
L’ensemble Musiques nouvelles interprète Romitelli
Musiques d’orgue d’Europe par Bruno Morin
Georg Schaller dirige Bruckner
Markus Stenz dirige Mahler
Stéphane Denève dirige Roussel
Kurt Sanderling dirige Bruckner
Hilary Hahn interprète Ives
Heinz Holliger interprète Bach
Geoffrey Burleson interprète Saint-Saëns
Jules Pasdeloup et les origines du concert populaire



 Pourquoi pas ?

Les Planètes de Holst à l’orgue
Daniel Isoir interprète Mozart
Concertos pour flûte et clarinette
Alice Sara Ott interprète Tchaïkovski et Liszt
José Serebrier dirige Verdi
Mari Kodama interprète Beethoven
Michael Korstick interprète Beethoven
Alexej Gorlatch interprète Beethoven
Intégrale des mélodies de Poulenc
Le Paradis perdu de Théodore Dubois
Caroline Weichert interprète Schulhoff



Pas la peine
R. Schirmer interprète Liszt
DVD Günter Wand dirige Bruckner
Gerard Schwarz dirige Mahler


Hélas !
«Dowland in Dublin»
Kitège de Rimski-Korsakov à Cagliari







Le match du mois


    
G. Wand dirige la Cinquième de Bruckner: Le disque (Berlin, 1991) vs. le DVD (Londres, 1990)







En bref


Le Paradis retrouvé de Dubois
Verdi danse chez Naxos
Dowland détourné
Qui a peur du Pasdeloup?
Holliger se remet au baroque
Sanderling dans Bruckner: à connaître
Troisième de Mahler: M. Stenz vs G. Schwarz
Hilary Hahn défend Ives
A. Gorlatch, vainqueur du concours de l’ARD
Songs of Poulenc
Grand Piano ressuscite Saint-Saëns et Schulhoff
Beethoven: suite des intégrales Kodama et Korstick
Fin du cycle Roussel de Stéphane Denève
Kitège à Cagliari





Le Paradis retrouvé de Dubois





La résurrection discographique de Théodore Dubois (1837-1924), jusqu’alors plutôt resté dans l’histoire pour son Traité d’harmonie théorique et pratique et pour sa démission en 1905 du poste de directeur du Conservatoire après le cinquième échec de Ravel au prix de Rome, se confirme: après ATMA pour sa musique de chambre, XXI-21 pour ses Mélodies et Mirare pour des pièces concertantes pour violoncelle et/ou piano, voici Aparté pour un oratorio de vastes dimensions (près d’une heure et demie), Le Paradis perdu. La partition originale pour grand orchestre ayant été perdue, le présent enregistrement du chœur Les Cris de Paris dirigé par Geoffroy Jourdain, effectué dans la foulée de concerts donnés l’été dernier, recourt à une instrumentation réalisée par Olivier Schmitt pour double quintette (à vent et à cordes) et piano (les soliste de l’orchestre Les Siècles). Un témoignage utile d’une époque et d’un répertoire qui demeurent en grande partie à redécouvrir et où l’on retrouve évidemment le Palazzetto Bru Zane – son directeur scientifique Alexandre Dratwicki cosigne d’ailleurs l’excellente notice (en français et en anglais) de ce double album qui offre par ailleurs le texte intégral (et bilingue) du livret d’Edouard Blau (AP030). SC




Verdi danse chez Naxos





Naxos a eu l’excellente idée de réunir les musiques de ballet qui ponctuent – sous l’influence du grand opéra français – les partitions de Verdi... cibles idéales pour les orpailleurs ès-coupures et autres charcuteurs (pour une chronique en anglais, lire ici). Si certaines pages sont bien familières des amateurs d’opéra (les extraits d’Aida surtout), ce disque séduira d’abord et avant tout pour ses raretés – à commencer par Jerusalem (créé – sous sa forme enrichie – à Paris, le 26 novembre 1847), où Verdi exalte déjà la tonitruance du rythme, l’exotisme de l’orchestration, la fraîcheur du lyrisme symphonique. L’intelligence et la finesse dans la coquetterie sont toutefois plus présentes encore dans les «Quatre saisons» des Vêpres siciliennes (1855) et dans le «Ballet de la reine» de Don Carlos (1867) – deux ouvrages également créés pour l’Opéra de Paris. Dans cette musique guinchante et solfiante à la fois, le Symphonique de Bournemouth fait preuve d’une belle plasticité. Tout terrain, le chef uruguayen José Serebrier (né en 1938) dirige en vieux routier: avec charme et assurance mais sans prise de risque (ni grande imagination)... mais l’on ne peut s’empêcher de se dire qu’un Muti ou un Abbado aurait mis le feu à un tel programme! (double album 8.572818-19). GdH




Dowland détourné





La voix de Michael Slattery est belle, quoiqu’un rien opératique, les musiciens sont habiles mais la musique n’est pas celle de John Dowland. Le ténor américain s’est associé à l’ensemble canadien La Nef pour mener à bout un projet à la croisée des chemins entre la mélodie, le folk-song et la world music, intitulé «Dowland in Dublin». Sous prétexte que Dowland était d’origine irlandaise, ce qui reste encore à démontrer, Michael Slattery et les deux musiciens qui assurent la direction musicale de l’ensemble – Sylvain Bergeron (luth, guitare baroque) et Sean Dagher (cistre) – ont, en leur propres termes, «dépouillé certains Ayres de Dowland de leurs accompagnements et contrepoints complexes en cherchant à leur redonner [sic] une simplicité, une saveur celtique». Ce faisant, ils ont gâché la merveilleuse retenue, le raffinement exquis et la beauté musicale des originaux. Dowland écrivait pour luth ou ensemble de violes. S’élevant contre la mélancolie, La Nef propose des arrangements, étrangement rythmés à l’irlandaise, en partie pour cordes, certes, mais souvent dominés par la flûte et par la percussion soutenue d’un bourdon d’imitation créé à l’aide d’une shruti-peti hindoue. La brève Lacrimae Pavan reste pour luth seul mais ce n’est pas la partition d’origine. Si Michael Slattery réussit – abstraction faite de l’accompagnement – une interprétation relativement sobre du dernier air, le mélancolique His Golden Locks, comme chaque instrumentiste de La Nef, il pense trop à la séduction de sa voix au détriment de la valeur musicale (ATMA Classique ACD2 2650). CL




Qui a peur du Pasdeloup?





Auteur d’un ouvrage essentiel sur la vie musicale en France sous l’Occupation (voir ici), Yannick Simon s’intéresse, toujours chez Symétrie, à Jules Pasdeloup (1819-1887), initiateur des Concerts populaires dont l’Orchestre Pasdeloup porte aujourd’hui l’héritage. Alternative à la très select Société des concerts du Conservatoire, cette société, mise sur pied en 1861, ne résista pas à la concurrence des Orchestres Colonne et Lamoureux, fondés respectivement en 1873 et 1881, si bien que les Concerts populaires cessèrent leur activité en 1887, quelques semaines avant le décès de Pasdeloup. Grâce à lui, les Parisiens d’origine modeste et de la petite bourgeoisie ont pu développer une culture musicale pour un tarif modique. Le répertoire fut plutôt éclectique malgré une relative prépondérance de la musique germanique (Beethoven surtout, mais aussi Wagner); les compositeurs français, même de leur vivant, ne furent pas oubliés. Comme c’est le cas aujourd’hui de la plupart des orchestres, cette institution était animée d’une mission pédagogique mais elle ne sacrifiait pour autant ni l’exigence de la programmation ni la qualité de l’exécution, même si le chef essuya bien des critiques négatives. Dans un style limpide, Yannick Simon retrace l’histoire des Concerts populaires, décrit leur fonctionnement, analyse le contenu et l’évolution des programmes, évoque l’accueil critique de ces concerts, démontre de quelle manière cette société influença le paysage musical français (démocratisation de l’accès à la musique, obtention de subventions ministérielles). L’analyse comparative des Concerts populaires, de l’Orchestre Colonne et de l’Orchestre Lamoureux sur les quelques années de cohabitation sur le territoire parisien mériterait d’être approfondi, à moins que ces deux dernières formations ne fassent plus tard l’objet d’un ouvrage à part entière. Dans ce livre de 277 pages, les annexes débutent à la page 163, c’est dire si elles sont riches. A priori, cette publication s’adresse avant tout aux chercheurs et aux étudiants mais les passionnés de la vie musicale en France au XIXe siècle le consulteront avec profit. SF




Holliger se remet au baroque





Ayant privilégié la composition et la direction d’orchestre, Heinz Holliger s’est fait plutôt rare dans le répertoire baroque ces dernières années: voilà une première raison de saluer la parution de ce disque, consacré à l’usage que Bach a pu faire du hautbois. Deuxième occasion de s’y arrêter: le résultat, tout simplement magnifique. Si la discographie (pléthorique dans ces œuvres) ne subit aucun bouleversement, la réussite de Holliger, superbement secondé par la Camerata Bern, est totale. Le hautboïste suisse aborde ces pages avec une simplicité de bon aloi, les jouant avec une vraie fraîcheur, s’autorisant juste quelques appogiatures dans le deuxième mouvement du Concerto BWV 1060 (instillant par ailleurs au troisième mouvement des couleurs marmoréennes qui nous plongent plus dans la musique de Corelli que dans celle du Cantor), abordant le Concerto pour hautbois d’amour BWV 1055 avec un lyrisme idéal. Dans le Concerto de Marcello (où la partie soliste demeure intacte, la partie orchestrale ayant seule été quelque peu remaniée par Bach), Holliger se montre tout aussi convaincant. La Camerata Bern est par ailleurs ici un ensemble idoine: dirigée avec une justesse infaillible par le violoniste Erich Höbarth, excellent dans chacune de ses interventions solistes (notamment dans l’extrait de la Cantate «Ich hatte viel Bekümmernis» et dans le premier mouvement du Concerto BWV 1060), elle contribue pleinement à la réussite de ce disque hautement recommandable (ECM New Series 2229 4764386). SGa




Sanderling dans Bruckner: à connaître





Une curiosité que ce disque puisque Kurt Sanderling (1912-2011) ne compte pas parmi les chefs les plus spontanément associés à Bruckner, à la différence de Böhm, Celibidache, Jochum ou Wand. Cette Troisième Symphonie, dans la version de 1889 (sans doute la plus connue), a été enregistrée en juin 1963 à la Heilandskirche de Leipzig avec l’Orchestre du Gewandhaus de Leipzig. Il s’agit manifestement d’une réédition puisque le copyright date de 1994 et que la notice, sobre et rédigée en allemand, anglais et français, n’indique pas que Sanderling est décédé depuis lors, ce qui suggère que l’éditeur a tout simplement omis de mettre à jour le texte de présentation. Quoi qu’il en soit, cette interprétation possède suffisamment de singularité, voire de personnalité, pour en justifier la (re)découverte: plus dramatique, et par moment théâtrale, que spirituelle, elle se fonde sur des tempi équilibrés, ni trop étirés, ni trop serrés, ainsi que sur une architecture et une ligne directrice fermement maîtrisées. Le trait le plus distinctif réside dans le propos, extrêmement sombre et concentré, ce qui peut paraître un peu inhabituel dans la musique de ce compositeur. Sanderling, qui impose sa vision avec l’autorité de celui qui sait ce qu’il veut, peut compter sur un orchestre admirable mais plus soucieux d’expressivité que de splendeur sonore. Les cuivres, par exemple, s’imposent par leur fulgurance, leur éclat et leur puissance. A connaître! (Berlin Classics BC2151-2). SF




Troisième de Mahler: M. Stenz vs G. Schwarz


        


La publication de deux nouvelles versions de la Troisième Symphonie de Mahler permet de comparer deux orchestres européens sous la baguette de leur directeur musical respectif: Markus Stenz (né en 1965) à la tête du Gürzenich de Cologne et Gerard Schwarz (né en 1947) à celle du Philharmonique Royal de Liverpool. Un combat qui tourne à l’avantage des Allemands, ne serait-ce que parce que le timbre bien ordinaire de Catherine Wyn-Rogers ne saurait se mesurer au contralto ample et mystérieux de Michaela Schuster. Certes, l’enregistrement du chef américain (un live de 2002, complété par un rugueux Adagio de la Dixième Symphonie – avec l’Orchestre de Seattle) n’est pas sans atouts: l’orchestre est professionnel, le chœur d’enfants admirable de tenue, l’atmosphère sereine. Mais l’ensemble reste propret, animé par des sentiments trop sages, éclairé d’une lumière bien fade (un double album Artek AR 0057-2). Tel n’est pas le cas de la version de Markus Stenz: bénéficiant d’une superbe prise de son, portée par un orchestre d’une exceptionnelle souplesse, elle conjugue allant et virtuosité, solennité et folklore – dans une approche solaire, mais également trop symphonique de la partition, presque univoque par sa luminosité et son enjouement (un double album SACD Oehms Classics OC 648). GdH




Hilary Hahn défend Ives





Hilary Hahn poursuit sa collaboration avec Deutsche Grammophon en enregistrant les quatre Sonates pour violon et piano de Charles Ives. La violoniste américaine a rédigé pour l’occasion une petite notice, intéressante en ce sens qu’elle nous plonge dans le processus interprétatif: étude de la partition, complexe à l’en croire s’agissant de la Troisième Sonate, ressenti lors de l’exécution, réception du public. La gestation de ce corpus (1902-1916) s’avère pour le moins compliquée, comme c’est le souvent le cas chez ce compositeur qui prenait son temps pour mettre le point final et n’hésitait pas à reprendre ses partitions pour les remanier. Il existe d’ailleurs une Sonate composée entièrement et dont le matériau a été réutilisé dans les deux premières. Autre trait caractéristique: le recours à des mélodies populaires comme dans la Quatrième dont le sous-titre (Children’s Day at the Camp Meeting) ressemble à celui de la Troisième Symphonie (The Camp Meeting). L’écoute n’est pas aisée puisque ces œuvres se caractérisent par une structure malaisée à cerner et un langage hétéroclite; la meilleure façon de les apprécier consiste finalement à les prendre comme elles viennent, sans se poser de questions. A condition d’être sensible à ce langage, dont les subtilités et le pouvoir d’évocation se révèlent toutefois à force d’écoutes répétées, ce disque peut être recommandé, surtout que l’immense talent de Hilary Hahn n’est plus à démontrer (justesse, intonation, sonorité). Partenaire de longue date mais avec laquelle la violoniste enregistre pour la première fois, Valentina Lisitsa s’illustre brillamment tandis que la prise de son confère chaleur et intimité à cet enregistrement somme toute bienvenue (477 8435). SF




A. Gorlatch, vainqueur du concours de l’ARD





Beethoven toujours, mais par un primo-arrivant cette fois: le pianiste ukrainien Alexej Gorlatch (né en 1988), récent vainqueur de la soixantième édition du concours de l’ARD à Munich. Et c’est précisément la finale de ce concours que nous donne à entendre BR Klassik, justifiant le premier prix accordé (le 11 septembre 2011) à ce jeune interprète qui présente déjà, dans le Troisième Concerto, un toucher élégant, un propos crédible, un bon dosage de puissance et de finesse. Si les cadences sont maîtrisées (malgré une certaine monotonie du discours), le Largo déçoit franchement par ses paroles vides et ses sentiments ordinaires. D’autant que l’on apprécie la souplesse et le professionnalisme de l’Orchestre de la Radio bavaroise (et son sens du dialogue avec le soliste) mais qu’on s’ennuie quelque peu avec la baguette trop sage de Sebastian Tewinkel (... il faut dire que le genre du concours favorise rarement la créativité des accompagnants!). La Première Sonate de Beethoven enregistrée dans la foulée (en studio) confirme les vertus d’une articulation propre, claire, assurée – avec de brefs moments enfarinés (Menuetto) et une inévitable verdeur dans le phrasé. Ce disque un peu court (moins d’une heure) n’en constitue pas moins une flatteuse carte de visite pour Alexej Gorlatch (900115). GdH




Songs of Poulenc


        


Existe-t-il pays plus francophile que la Grande-Bretagne? Cette intégrale des mélodies de Poulenc chez Signum Classics ne semble s’adresser qu’aux mélomanes d’outre-Manche férus de musique française: chanteurs pour la plupart anglophones, accompagnateur né à Edimbourg (l’expérimenté Malcolm Martineau), notice en anglais. Les deuxième et troisième volumes regroupent quelques solides voix dont la réputation est bien établie pour la plupart d’entre elles: John Mark Ainsley, Lorna Anderson (qui ne manque pas de panache), Sarah Fox, Jonathan Lemalu (Néo-Zélandais, prononciation défectueuse), Felicity Lott (chez elle dans cet univers dans lequel elle peut exprimer sa personnalité en toute élégance), Christopher Maltman, Lisa Milne, Ann Murray, Robert Murray, Thomas Oliemans (jeune chanteur hollandais talentueux et fort bien représenté dans le troisième volume). Sans surprise, la qualité du chant est remarquable mais, sans surprise non plus, la prononciation française, bien que surveillée, constitue le principal écueil de l’entreprise: difficile dès lors de ne pas recourir aux textes reproduits dans la notice. Ces disques suscitent le désir de retrouver au plus vite ces chanteurs français «à l’ancienne», aux manières sans doute datées mais dont la diction reste un modèle de clarté. Néanmoins, cette belle brochette d’interprètes adopte un style adéquat, recourt à l’humour quand la musique le nécessite, tant et si bien que «Poupoule» ne se voit aucunement trahi (SIGCD263 et SIGCD272). SF




Grand Piano ressuscite Saint-Saëns et Schulhoff


        


Les amateurs de Grand Piano trouveront matière à se réjouir du lancement de ce nouveau label qui ambitionne d’explorer des partitions rares ou délaissées (de nombreuses pièces trouveront de la sorte leur tout premier enregistrement). Les quatre premiers albums – dont deux figurent parmi nos Sélectionnés du mois (ceux consacrés à Raff et à Weinberg) – sont également les «volumes 1» de l’édition intégrale de la musique pour piano du compositeur concerné. Le disque consacré aux Etudes pour piano de Saint-Saëns – le seul bénéficiant d’une notice traduite en français – passionnera les admirateurs du «plus grand organiste du monde» (F. Liszt). Des trois cycles d’Etudes (1877, 1889 et 1912), Geoffrey Burleson (à la fois interprète, coproducteur et auteur du livret) offre une interprétation engagée, d’un enthousiasme communicatif et d’une virtuosité bluffante (... ne faisant qu’une bouchée des chapelets d’accords, triolets et arpèges). Quelle classe dans le «Prélude en forme de valse» de l’Opus 52 ou dans la «Toccata» de l’Opus 111 (adaptation en mode ragtime du Finale du Cinquième Concerto)! Voici une occasion – rare – de découvrir d’étonnantes compositions, telles ces «Cloches de Las Palmas» de l’Opus 111 – «annonçant des textures et des effets impressionnistes qui par ailleurs n’apparaissent vraiment dans le répertoire qu’avec les Jeux d’eau de Ravel, publiés deux ans plus tard» (G. Burleson) – ou le gourmand hommage rendu à Couperin et Rameau par les Etudes pour la main gauche de l’Opus 135 (GP601). Le volume consacré à Erwin Schulhoff (1894-1942) pourra sembler plus inégal. Dans ce disque de moins d’une heure dont elle est également la productrice et l’éditrice, la pianiste Caroline Weichert sélectionne des pièces où Schulhoff synthétise et transcende divers courants musicaux, à commencer par les rythmes – Partita (1922) – et les mélodies – Susi (1937) – du jazz. La Troisième Suite pour la main gauche (1926) captive plus spécialement par son inventivité et sa concentration mystérieuse voire hypnotique («Improvisazione»). Ecrites par un jeune homme de même pas vingt ans (et sous influence debussyste), les Variations et Fugue sur un thème original dorien (1913) dénotent du coup quelque peu dans ce programme trop composite (GP604). GdH




Beethoven: suite des intégrales Kodama et Korstick


        


L’avènement du SACD permet à la discographie des Sonates de Beethoven de continuer à prospérer. L’intégrale de Mari Kodama en est à son septième volume chez PentaTone, avec cet enregistrement des trois dernières sonates. La pianiste d’origine japonaise trouve un ton et une dynamique personnels, maîtrisant le propos (avec une belle éloquence dans l’avant-dernière sonate) comme l’écoulement du temps beethovéniens (des partis pris interprétatifs assumés). On reste réservé face à l’assèchement du phrasé (deuxièmes mouvements des Opus 109 et 110) et la précipitation de certains traits (Opus 111), qui atrophient et appauvrissent par moments le discours beethovénien. Mais l’ensemble demeure de très bonne tenue (PTC 5186389). Chez Oehms, Michael Korstick présente, quant à lui, le dixième volume de son intégrale, dont le pivot est la Hammerklavier. Un pivot plombé par l’extrême lenteur de l’Adagio sostenuto (... presqu’une demi heure!), qui n’évite pas les chutes de tension. Les autres mouvements sont, au contraire, caractérisés par la vivacité des tempos, la constante agitation des poignets, la souplesse et la clarté de la sonorité: un Beethoven musclé et diablement rythmique! Jusqu’à la caricature dans l’Allegro (expédié en moins de 9 minutes); au bout de la nervosité physique dans le mouvement final (11 minutes). L’interprète assume ses choix (se référant aux indications métronomiques de Beethoven), mais si l’on salue le tour de force (reposant sur une technique accomplie et un vrai talent narratif... qui convient bien aux compléments du disque – le Rondo a capriccio surtout), ce Beethoven nous laisse au bord de l’autoroute des sentiments et de la profondeur (OC 663). GdH




Fin du cycle Roussel de Stéphane Denève





Comme bien souvent pour la musique française, le salut est venu d’ailleurs, et plus particulièrement d’outre-Manche: voilà comment c’est à l’Orchestre royal national d’Ecosse qu’on doit l’un des jalons les plus marquants de la récente discographie d’Albert Roussel. Le cinquième et dernier volume du cycle que Naxos a confié à Stéphane Denève confirme les qualités unanimement reconnues aux quatre précédents, centrés chacun sur l’une des symphonies: la partition intégrale du Festin de l’araignée, d’une finesse et d’un éclat qui le hissent au niveau de ses exacts contemporains (Daphnis, Pétrouchka, Jeux), et les deux Suites de l’opéra-ballet Padmâvatî, rutilantes à souhait. (8.572243). SC




Kitège à Cagliari





Cette Légende de la Cité invisible de Kitège et de la vierge Févronia de Rimski-Korsakov a été enregistrée en 2008 au Théâtre lyrique de Cagliari sous la direction d’Alexander Vedernikov. Bien que paraissant chez Naxos, qui propose en même temps la version audio (8.660288-90), il s’agit d’une production du label Dynamic, raison sans doute pour laquelle le générique est en italien. En revanche, le livret est rédigé en anglais, seule langue disponible pour le sous-titrage. Si ces insuffisances linguistiques ne constituaient que la seule réserve, cette publication pourrait être recommandée mais le premier des deux DVD – et seulement lui! – accuse un décalage entre le son et l’image d’environ une seconde, ce qui ne tarde pas à agacer sérieusement. Ce défaut, absolument inexcusable compte du prix encore élevé des DVD de musique classique, ne concerne peut-être que quelques exemplaires, du moins faut-il l’espérer car un tel manquement relève de l’amateurisme. Il n’empêche, quelle musique! Le niveau des chanteurs, pour la plupart russophones, de l’orchestre ainsi que du chœur s’avère véritablement remarquable. Susceptible de plaire à chacun, la scénographie privilégie le grand spectacle, une option du reste difficile à écarter dans un tel chef-d’œuvre, tandis que la mise en scène d’Eimuntas Nekrosius exploite habilement le profil des différents personnages (2.110277-78). SF




La rédaction de ConcertoNet

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com