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03/03/2007 Giacomo Puccini : Turandot
Eva Marton (Turandot), Michael Sylvester (Calaf), Lucia Mazzaria (Liù), Kevin Langan (Timur), Theodor Baerg (Ping), Dennis Peterson (Pang), Craig Estep (Pong), Joseph Frank (Altoum), Chester Patton (Mandarin), Tim Lewis (Prince de Perse), Victor Liu (le Bourreau), San Francisco Opera chorus, Ian Robertson (chef des chœurs), San Francisco Opera orchestra, Donald Runnicles (direction), David Hockney (décors), Ian Falconer (costumes), Thomas J. Munn (lumières), Peter McClintock (mise en scène), Brian Large (réalisation)
Enregistré en public à San Francisco (1994) – 122’51
DVD Arthaus Musik 100 089 – Code région: 0 (distribué par Intégral)
Dans un marché déjà assez riche – Levine au Met chez Deutsche Grammophon, Gergiev à Salzbourg (dans la version achevée par Berio) chez TDK – cette version de Turandot (1924) de Puccini captée à San Francisco met en avant deux atouts: Eva Marton dans le rôle-titre et, comme celle-ci ne fait évidemment son apparition qu’au milieu de l’œuvre, David Hockney en «production designer» pour faire bonne mesure. Mais ce n’est pas pour ces raisons, pas plus d’ailleurs que pour une notice sommaire et approximative (dans laquelle Malipiero est prénommé Riccardo), que cette captation en public – dont on ne perdra pas le moindre applaudissement (entrée du chef, apparition d’un nouveau décor, fin d’un air) – pourra retenir l’attention.
Quasiment statufiée, la soprano hongroise est à nouveau confrontée à l’un de ses rôles d’élection, qu’elle incarnera encore trois ans plus tard au Met, mais peine à convaincre: les aigus sont durs, criés, et dans la scène des énigmes, la fatigue ne tarde pas à se faire sentir. A ses côtés, Michael Sylvester, dont la carrière, interrompue voici près de six ans, est aujourd’hui un peu oubliée, campe un Calaf poupin et scéniquement maladroit, mais vocalement honnête. Il en va de même de la jeune Liù de Lucia Mazzaria (vingt-huit ans), dont le vibrato peut toutefois lasser. Dans la fosse, la direction tapageuse et à la serpe de Donald Runnicles, augmentée d’une assez forte réverbération, donne dans le grand spectacle, au détriment des autres qualités de la partition.
Dans la distribution, les décors de David Hockney viennent avant la mise en scène de Peter McClintock: il est vrai que cette dernière pâtit du fait que pour qu’il y ait une direction d’acteurs, encore faut-il qu’il y ait des acteurs, ce que ne sont pas la plupart des chanteurs réunis sur ce plateau. Et il est aisé de comprendre que l’on ait tenté de valoriser la notoriété de l’enfant terrible de la peinture britannique, même s’il se contente ici de livrer une production anecdotique et habile, satisfaisant aux contraintes d’une maison d’opéra américaine tout en laissant libre cours à son imagination pimpante, encore que le rouge dominant puisse suggérer tour à tour l’apparat ou le sang: rien ne manque donc à la couleur locale (chapeaux, nattes, bonzes, mandarins, petits pavillons, lanternes…), mais elle est passée à la moulinette d’un second degré en forme pied de nez, d’une superficialité qui fleure encore bon ses années 1980, avec un bourreau en sosie de Mister T, un Timur façon Gandalf et une manière joyeusement libérée de s’accommoder des conventions du genre.
Cette distanciation, si elle réduit les fantassins à des petits soldats de plomb, un parti pris en cohérence avec l’impression d’écrasement que suggère la vision du peuple, met en revanche remarquablement en valeur le caractère d’un excellent trio de ministres, pour lesquels Ian Falconer a réussi, avec des manteaux bariolés aux manches clownesques, ses meilleurs costumes. Malheureusement, la réalisation de Brian Large ne parvient pas à bien saisir les mouvements de foule et ne rend pas non plus justice aux jeux d’ombres et de lumières réglés par Thomas J. Munn.
Le site d’Eva Marton
Un site non officiel dédié à David Hockney
Simon Corley
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