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11/12/2006
Extraits de ses plus grands rôles sur scène: œuvres de Richard Strauss, Jacques Offenbach, Wolfgang Amadeus Mozart, etc…

Natalie Dessay (soprano) entourée de divers chanteurs, orchestres et chefs
Enregistré entre 1993 et 2003
1 DVD Virgin Classics 36333991 - 135’ (zone 0)


Pour fêter les quelques quinze années de carrière de Natalie Dessay, Virgin édite un double CD qui regroupe les plus grands airs de son catalogue et un DVD de ses plus grands rôles sur scène. Comme le dit si bien Michel Parouty dans la brochure qui accompagne le DVD, “Entendre Natalie Dessay, c’est bien; la voir, c’est mieux”. Effectivement non seulement elle possède une voix exceptionnelle et unique, mais elle a en elle un talent fou de comédienne qui lui permet d’émouvoir aux larmes dans Lucia ou bien de faire rire dans l’Olympia d’Orange.



Le DVD s’ouvre sur un extrait d’une soirée de 31 décembre à Vienne où Natalie Dessay a été invitée un peu à la dernière minute en tant que “guest” du Prince Orlofsky: elle interprète la valse de Strauss Frühlingsstimmen. C’est une Natalie Dessay toute jeune, très appliquée, qui entre en scène mais plus l’air avance, plus elle se détend et la dernière reprise est vraiment magnifique. Elle semble extrêmement stressée mais elle parvient à donner le change grâce à des cadences extraordinaires dans les aigus dont elle avait le secret à l’époque.
Deux extraits d’Ariane à Naxos viennent rappeler à quel point elle a été une Zerbinette époustouflante. Ces deux passages sont très différents, car la chanteuse et les metteurs en scène proposent deux versions totalement opposées de la jeune femme. Autant elle est vulgaire, douloureuse à Salzbourg, autant elle est heureuse de vivre et pleine de folie à travers les yeux de Laurent Pelly. La voix est également très différente car à Salzbourg elle traîne sur les notes, alanguit son phrasé et les aigus sont criés, presque assez laids. En revanche à Paris deux ans plus tard, la voix est joyeuse (l’orchestre aussi d’ailleurs), son phrasé est agile, léger. Une comparaison on ne peut plus intéressante!
Natalie Dessay restera toujours l’une des plus exceptionnelles Olympia et si elle envisage sérieusement de se frotter aux quatre héroïnes dans les années à venir, elle aura marqué ce rôle. Trois Olympia très différentes figurent sur ce DVD. Tout d’abord celle de Lyon en 1993, où elle incarne une jeune fille modeste et apeurée. Kent Nagano adopte un tempo très lent, ce qui conduit Natalie Dessay à chanter son air avec douceur et retenue. Elle est une sorte de fantôme, d’ange, qui peu à peu se réveille au contact d’Hoffmann et qui apporte la joie et le bonheur aux personnes qui l’entourent. La voix suit ce chemin puisque les vocalises sont exécutées sur un legato magnifique, plutôt lent, et les aigus sont lancés avec discrétion. En 1996, elle incarne une véritable poupée de porcelaine sous la direction d’Andrei Serban. Sa prestation est très réussie, mais c’est peut-être la moins émouvante et la moins originale. La voix a déjà évolué, car elle est plus franche. Enfin peut-être la plus parfaite: la toute dernière à Orange le 15 juillet 2000. Natalie Dessay est incroyable de drôlerie et de virtuosité dans cette production de Jérôme Savary, qui la met en scène comme une véritable poupée avec une robe rose et une perruque blonde: elle fait plein de bêtises, patauge dans l’eau… Elle chante cet air avec une assurance confondante, n’hésitant pas à se coincer la voix comme un automate en panne dans les “ah…ah…” ou bien à s’évanouir à la vue d’Hoffmann.
Le personnage de Lucia fait partie des nouveaux rôles abordés par la chanteuse et si elle ne fait pas l’unanimité dans les duos avec Edgardo ou Enrico, elle rallie tous les suffrages dans la scène de la folie. En janvier 2002, elle tente la version française où elle se montre impressionnante du début jusqu’à la fin. Elle entre en scène apeurée, essaie de se dégager à l’aide de gestes et de notes désespérés des bras de Raymond. La voix est plus petite, plus aiguë que l’automne dernier à la Bastille, mais elle est plus émouvante par la fraîcheur qu’elle exprime. Son incarnation glace, bouleverse et prend le spectateur.
Natalie Dessay a chanté de nombreuses fois la Reine de la nuit et, à chaque fois, son interprétation s’est nourrie. Le personnage est devenu plus présent, plus fort - il n’y a qu’à comparer ces deux extraits. En 1994, elle commence sa collaboration avec Robert Carsen et ils décident de brosser le portrait d’une Reine gentille. Effectivement, le premier air “O zittre nicht” est chanté avec simplicité, sans hystérie et même sans acrimonie envers Sarastro quand elle dit “ein Bösewicht”. Les vocalises sont parfaites et précises. En 2000, elle porte pour la dernière fois le costume de la Reine dans une mise en scène hautement poétique de Benno Besson. Elle est ici nettement plus méchante et plus véhémente comme en témoigne le dialogue avec Pamina, où elle prend une voix parlée très grave pour demander à sa fille de tuer son ravisseur. La voix chantée a beaucoup changé et si le medium s’est corsé, les aigus sont moins angéliques qu’en 1994. Mais à choisir, cette dernière interprétation est peut-être plus vraie, plus théâtrale que la première.
La soprano française essaie de défendre le répertoire de son pays avec notamment Hamlet d’Ambroise Thomas qu’elle a chanté sur de nombreuses scènes internationales. On peut voir sur ce DVD un extrait de la production de Patrice Caurier et Moshe Leiser donnée à Barcelone à l’automne 2003, la scène de la folie. Natalie Dessay est entièrement prise par la musique et on n’a plus l’impression qu’elle chante, qu’elle dit un texte, tant ce qu’elle exprime paraît naturel. Les “tra…la…la” sont remarquables d’éloquence car elle prend une voix presque blanche, du moins mourante qui lui permet de franchir la barrière entre la raison et la folie. Les vocalises sont toujours aussi précises et nettes et peut-être plus habitées que dans son Ophélie de 2000 au Châtelet.
Natalie Dessay n’a chanté qu’une fois L’Enfant et les Sortilèges et c’est bien dommage car elle fait un Feu irrésistible. Dans ce film-opéra mis en scène par Patrice Caurier et Moshe Leiser, le Feu est représenté sous les traits d’un ramoneur qui entre en scène par la cheminée, comme il se doit, avec un briquet à la main. Le Feu meurt, éteint par une couverture. Cet extrait est très alléchant et on aimerait voir le spectacle entier. La prestation de Natalie Dessay est toujours aussi extraordinaire, car elle dégage un formidable entrain: les notes piquées à la fin de l’air, comparables à du cristal, ne sont pas dénuées d’une douleur émouvante.
Petit passage par Leonard Bernstein, dont elle défend le grand air de Cunégonde dans Candide “Glitter and be gay”. Cet air semble écrit sur mesure, car il permet à Natalie Dessay de laisser échapper toute sa folie (œillades, gestes…), mais aussi sa virtuosité. Elle passe de l’état désespéré aux vocalises les plus joyeuses mais sans avoir l’air d’y toucher, très progressivement.
Le dernier extrait est consacré à Orphée aux Enfers dans la fameuse mise en scène de Laurent Pelly montée à Lyon en 1997. Natalie Dessay a évidemment retenu le duo de la mouche qu’elle chante avec Laurent Naouri, plus mouche que nature grâce à des petits gestes, par exemple, se frotter les mains et les joues comme les insectes. La chanteuse en fait beaucoup, beaucoup mais sans jamais verser dans le vulgaire. Ils se livrent à une véritable scène de séduction où leur dialogue se résume à des “bzz, bzz” mais qui ne sont pas anodins: ils leur apportent un sens différent grâce à une intonation spéciale, une couleur, etc… La scène finale est aussi un délice, car Orphée vient de nouveau de perdre Eurydice et elle redescend donc en ascenseur aux Enfers où elle pique une véritable crise de nerfs avec des aigus puissants, foudroyants, qui font mal aux oreilles des autres dieux, puis enchaîne avec une gamme descendante dans les profondeurs de sa voix pour revenir avec une dextérité incroyable à une voix parfaite posée sur “Bacchus”. Techniquement très impressionnant!
Le DVD est agrémenté de commentaires de la chanteuse dans lesquels elle raconte des anecdotes, elle présente l’œuvre.



Ce DVD prend le parti de dresser un bilan de ce que l’on pourrait appeler la première et la deuxième période de la carrière de Natalie Dessay. En effet, la chanteuse a décidé d’abandonner les rôles de ses débuts et elle nous permet de la retrouver dans des extraits qui la montrent très à son avantage. Espérons que les quinze prochaines années seront aussi belles et riches de moments de musique aussi exceptionnels!


Manon Ardouin

 

 

 

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