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08/01/2015 Aulis Sallinen : Kunigas Lear, opus 75 Matti Salminen (King Lear), Lilli Paasikivi (Cordelia), Taina Piira (Goneril), Satu Vihavainen (Regan), Petri Lindroos (Albany), Jorma Hynninen (Gloucester), Kai Pitkanen (Cornwall), Aki Alamikkotervo (The Fool), Sauli Tiilikainen (Edgar), Jorma Silvasti (Edmund), Hannu Forsberg (France), Suomen Kansallisoopperan kuoro, Suomen Kansallisoopperan orkesteri, Okko Kamu (direction musicale), Kari Heiskanen (mise en scène), Markku Hakuri (décors et costumes), Olli-Pekka Koivunen (lumières), Aarno Cronvall (réalisation)
Enregistré en public à Helsinki (août 2002) – 164’
DVD Ondine ODV4010 – Format NTSC 16:9 – Son PCM Stereo/Dolby Digital 5.1 – Region Code 0 – Sous-titres et notice en anglais et en finnois
Sélectionné par la rédaction
Créé en 2000 à Helsinki, Le Roi Lear (1998-1999), le sixième opéra d’Aulis Sallinen (né en 1935) paraît sur DVD à temps pour célébrer les quatre-vingts ans du compositeur finlandais. Opéra tonal, de facture romantique tardive chanté en finnois, il bénéficie d’une distribution exceptionnelle filmée à l’Opéra national finlandais peu avant sa création.
S’il n’a pas les audaces musicales du Lear d’Aribert Reimann, qui lui est antérieur de vingt-deux ans, Le Roi Lear de Sallinen, doyen des compositeurs finlandais, a comme atout principal un livret (en deux actes) dont le découpage réalisé par le compositeur d’après la traduction de Matti Rossi de la pièce de Shakespeare est d’une très grande clarté avec des dialogues réduits à l’essentiel. Sallinen a coupé le rôle de Kent, donné une part plus importante au Fou et même inventé un chœur. Son découpage éclaire bien le fait que Shakespeare, pour créer sa pièce en 1606, avait combiné la vieille légende d’un roi âgé et de ses deux filles à une intrigue secondaire sur le duc de Gloucester et ses deux fils. Les deux histoires qui se chevauchent parfois de façon trop complexe chez Shakespeare sont parfaitement intriquées dans cet opéra. Héritier de la tradition lyrique et symphonique sibélienne, Sallinen est peu audacieux dans son langage musical mais s’agissant du chant, il compose dans la tonalité la plus stricte de grandes phrases toujours très lyriques et a l’art de faire progresser l’action et le drame afin de tenir en haleine son public. L’écriture orchestrale est constamment postromantique et réserve de belles surprises dans l’utilisation des instruments et quelques trouvailles d’atmosphère, comme le violoncelle qui double la voix de Lear errant dans la lande et encore le célesta qui crée un climat onirique quand Gloucester recouvre la vue.
Pour cette création et sa reprise en 2002, la distribution avait été particulièrement soignée avec ce que le pays comporte de meilleur parmi ses chanteurs nationaux. Le rôle-titre, taillé sur mesure pour Matti Salminen, est certainement le plus glorieux de sa fin de carrière. Sa stature, sa très grande palette d’expressions, qui lui permet d’exprimer colère, folie, ruse, malheur, et sa très grande puissance vocale sont au service de cet immense personnage auquel il donne un relief prodigieux. Le Fou, à qui une grande part est dévolue avec beaucoup de trouvailles musicales, est une grande incarnation d’Aki Alamikkotervo, à la fois chanteur prodigieux et excellent comédien. Extraordinaires aussi sont les deux filles Reagn (Satu Vihavainen) et surtout Goneril (Taina Piira). Jorma Hynninen (Gloucester) et Jorma Silvasti (Edmund) se distinguent aussi dans cette excellente distribution. Le jeu scénique des autres acteurs reste assez conventionnel et le metteur en scène Kari Heiskanen a repris beaucoup de la scénographie de son Kullervo au festival de Savonlinna. La très grande clarté de sa direction d’acteurs assure une excellente compréhension de l’action. L’Orchestre de l’Opéra national finlandais dirigé par Okko Kamu défend ce superbe ouvrage d’un lyrisme exacerbé.
Olivier Brunel
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