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09/25/2014 Richard Strauss : Elektra, opus 58 Iréne Theorin (Elektra), Waltraud Meier (Klytämnestra), Eva-Maria Westbroek (Chrysothemis), René Pape (Orest), Robert Gambill (Aegisth), Oliver Zwarg (Der Pfleger des Orest), Benjamin Hulett (Ein junger Diener), Josef Stangl (Ein alter Diener), Orla Boylan (Die Aufseherin), Maria Radner (Erste Magd), Martina Mikelić (Zweite Magd), Stephanie Atanasov (Dritte Magd), Eva Leitner (Vierte Magd), Anita Watson (Fünfte Magd), Arina Holecek (Dei Vertraute), Barbara Reiter (Die Schleppträgerin), Konzertvereinigung Wiener Staatsopernchor, Wiener Philharmoniker, Daniele Gatti (direction), Nikolaus Lehnhoff (mise en scène), Thomas Grimm (réalisation)
Enregistré en public au Grosses Festspielhaus, Salzburg (août 2010) – 109’
Blu-Ray Arthaus Musik 108 110 (ou DVD 101 559) – Son PCM Stereo, DTS-HD Master Audio 5.1 – Format 16:9 – Résolution 1080i Full HD – Sous-titres en français, allemand, anglais, espagnol, italien et coréen
Filmée lors de l’édition 2010 du festival de Salzbourg (mais sans les applaudissements), cette Elektra mise en scène par Nikolaus Lehnhoff situe le drame dans un univers concentrationnaire tout en béton armé, où les protagonistes sont les prisonniers d’un blockhaus qui dévoile in fine le visage d’une boucherie (pour un compte-rendu détaillé, lire ici).
La caméra de Thomas Grimm rend hommage au travail du metteur en scène et à celui des artistes, qui investissent tous leur rôle avec talent. Une lecture convaincante du chef d’œuvre de Strauss, mais peu marquante (après le choc du spectacle de Patrice Chéreau à Aix-en-Provence) et en contraste presque total avec la direction chaleureuse et ronde de Daniele Gatti, stylistiquement plus proche d’un Abbado que d’un Böhm – un peu traînant parfois (la scène avec Oreste), manquant finalement de brutalité pour faire résonner la partition avec l’ampleur nécessaire. Rien à redire, en revanche, de la prestation du Philharmonique de Vienne, qui avance en terrain connu.
Une distribution de qualité a été réunie sur la scène du Grosses Festspielhaus, dominée par l’Elektra d’Iréne Theorin – dressant un portrait de femme-enfant, figée dans le traumatisme du meurtre de son père, mi-vagabonde, mi-zombie. Pour autant, en comparaison de l’Electre de Birgit Nilsson (dont Orfeo vient de nous rendre le fulgurant live de 1965), on entend d’abord les défauts de celle de sa compatriote: une voix étranglée, une ligne de chant qui chevrote, un abus du Sprechgesang, des aigus poussifs sinon délabrés (...la scène avec Oreste est une épreuve pour l’oreille). On tient pourtant là l’une des toutes meilleurs Elektra du siècle en cours, et ses cris de cette bête de scène continuent d’impressionner.
Face à elle, Waltraud Meier est une Clytemnestre très humaine, bien que la voix (avec ce poison inimitable dans le timbre) expose des faiblesses que ne compensent pas toujours les qualités (intactes) de comédienne. Elle peine ainsi à tenir tête aux vociférations de sa fille. Solide comme un roc, Eva-Maria Westbroek a une voix équilibrée dans tous les registres. Mais il faudrait davantage de moelleux et de chair pour que cette solide Chrysothémis émeuve pleinement. Signalons, pour finir, que René Pape est un Oreste assez pâle malgré son autorité naturelle et qu’en conséquence d’une mise en scène accentuant l’anonymat de sa personnalité, Robert Gambill est transparent en Egisthe.
Gilles d’Heyres
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