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04/11/2011
Gaetano Donizetti : Le convenienze ed inconvenienze teatrali [Viva la mamma!]
Jessica Pratt (Daria Scortichini), Simon Bailey (Procolo), Christian Senn (Biscroma Strappaviscere), Vincenzo Taormina (Agata), Aurora Tirotta (Luigia), Leonardo Cortellazzi (Guglielmo), Asude Karayavuz (Pippetto), Chae Jun Lim (Cesare Salzapariglia), Jong Min Park (Impresario), Eugeniy Stanimirov (Direttore del palcoscenico), Riccardo Massi (Ispettore), Vincenzo Scalera (clavecin), Chœurs et orchestre de la Scala de Milan, Alfonso Caiani (chef de chœur), Marco Guidarini (direction), Antonio Albanese (mise en scène), Leila Fteita (décors), Elisabetta Gabbioneta (costumes)
Enregistré en public à la Scala de Milan (octobre 2009) – 114’
BelAir Classiques BAC 063 (distribué par Harmonia mundi) – Son PCM Stereo – Format 16:9 – Région Code 0





Dans l’œuvre de Gaetano Donizetti (1797-1848), l’opéra Le convenienze ed inconvenienze teatrali n’est certes pas le plus connu, ni peut-être le plus personnel... A l’origine, il s’agit d’un opéra-comique en un seul acte, donné en 1827, mais Donizetti le retravailla par la suite pour le transformer en un opéra de deux actes qui, cette fois-ci, fut créé en 1831.


L’argument est très simple: il s’agit, comme dans Le Directeur de théâtre de Mozart, de savoir qui tiendra le premier rôle dans une œuvre lyrique! Alors que les répétitions d’un opéra se déroulent cahin-caha (la prima donna Daria Scortichini accaparant les attentions du compositeur Biscroma Strappaviscere qui, de fait, délaisse totalement les seconds rôles), survient Agata, qui n’est autre que la mère de Luigia, la rivale de Daria. Celle-ci exige sur le champ que sa fille bénéficie d’une partie plus importante et, même, qu’elle chante un duo avec Daria, ce que cette dernière refuse... Le départ de certains chanteurs permet à Agata (également surnommée Mamma Agata) de faire elle-même valoir ses atouts de chanteuse, que ce soit avec le ténor ou plus tard, avec Procolo, le mari de Daria. Tant bien que mal, la représentation reprend mais avec toujours autant de difficulté, le directeur de théâtre devant même faire appel à des soldats pour que les chanteurs consentent à se remettre au travail. L’organisation partant absolument dans tous les sens, c’est finalement le directeur du théâtre (ispettore) qui a le dernier mot en annulant la représentation, les membres de la troupe finissant par tous s’égayer dans la nature.


Loin donc d’être le plus célèbre opéra de Donizetti, Le convenienze ed inconvenienze teatrali a déjà donné lieu à quelques gravures discographiques dont la plus recommandable, datant de 1976, met en tête d’affiche Giuseppe Taddei et Leo Nucci sous la baguette peu alerte de Carlo Franci (deux disques Bella Voce). Avouons que la présente version dépasse largement son aînée par la verve des chanteurs, à commencer par l’inénarrable Vincenzo Taormina dans le rôle de la mère Agata! Volontairement travesti de la manière la plus ridicule qui soit, il séduit de bout en bout par une agilité vocale qui, en plus d’une occasion, nous plonge davantage dans l’univers de Rossini que dans celui, plus délicat, de Donizetti. Son premier air «Lazzarune, scauzacane» nous fait irrémédiablement penser à certains airs de Mustafa dans le premier acte de L’Italienne à Alger tant du point de vue de la tonalité que de la diction; quant à son grand air du deuxième acte, «Assisa a piè d’un sacco» (qui se veut une parodie de l’air «Canzone del salice» tiré d’Otello du même Rossini), il est de nouveau époustouflant, jouant sur le registre comique avec une incontestable réussite.


Ridicule, Daria (Jessica Pratt, apparaissant ici pour la première fois sur la scène de La Scala) l’est également: ses roucoulades dans l’air «E puoi goder, tiranno», aussi ampoulées que peuvent l’être les plumes de sa coiffure, témoignent là aussi d’une excellente technique vocale, comme l’illustre ensuite sa reprise de l’air de Rossini extrait d’Aureliano in Palmira au second acte. Dans le rôle de Procolo, Simon Bailey est lui aussi très à son aise, notamment dans l’air «Che credete che mia moglie» (acte I), de même que Guglielmo (Leonardo Cortellazzi), excellent lorsqu’il se livre à un concours de vocalises avec Daria dans le très beau duo «Per me non trofe calma», accompagné par une clarinette rossinienne à souhait.


Car telle est bien, on l’a déjà sous-entendu, la grande influence de cet opéra: Gioacchino Rossini (1792-1868)! Ses traits caractéristiques aussi bien dans l’orchestration (l’intervention des bois, notamment la flûte et la clarinette, dans l’air «E puoi goder, tiranno» au premier acte) que dans le chant (l’intervention des personnages, chacun à leur tour avant que tous ne concluent le propos dans une fête musicale virevoltante comme c’est le cas dans l’air concluant le premier acte) ou l’usage des onomatopées (dans l’air «Si, allegri, prepariamoci» à l’acte I) sont autant de preuves de l’immense influence qu’a pu avoir le compositeur du Barbier sur la vie musicale italienne de l’époque. Raison pour laquelle on regrette un orchestre qui, un peu trop souvent, manque de verve, Marco Guidarini (qui fait là lui aussi ses débuts à La Scala) adoptant une direction par trop routinière (l’Ouverture!): on se demande avec jubilation ce qu’auraient pu faire de cet opéra un Alberto Zedda, un Gabriele Ferro ou un Evelino Pidò, sans parler d’un Riccardo Muti ou d’un Claudio Abbado. Pour autant, les amateurs du genre se jetteront sur ce DVD qui allie mise en scène comique (mais jamais ridicule, ni vulgaire) avec une très belle équipe de chanteurs qui, visiblement s’amuse, et nous avec!


Le site de Marco Guidarini
Le site de Vincenzo Taormina
Le site de Jessica Pratt


Sébastien Gauthier

 

 

 

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