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01/08/2010 « Karajan : A Profile »
Gernot Friedel (réalisation)
Film réalisé en 1999 (édition 2008) – 87’
Karajan Centrum Productions – EMI Classics 50999 2 16573 9 9 – Son LPCM Stereo – Format NTSC 16:9 – Region Code 0
Après 2008 qui a vu la célébration du centenaire de la naissance de Herbert von Karajan (1908-1989), 2009 s’est achevée, ayant permis de célébrer les dix ans de sa mort (ainsi que les quatre-vingts ans de sa nomination comme chef d’orchestre à Ulm, les soixante-dix ans de son premier contrat avec Deutsche Grammophon ou les quarante ans de sa nomination comme éphémère conseiller artistique de l’Orchestre de Paris…) en attendant 2010, année qui peut être l’occasion de fêter le soixantième anniversaire de sa nomination comme Konzertdirektor à vie de la Société des amis de la musique de Vienne, le quarantième anniversaire de l’inauguration du Neues Festspielhaus de Salzbourg (à l’occasion de laquelle Karajan a dirigé un légendaire Chevalier à la rose) ou le trentième anniversaire de son premier disque numérique avec l’Orchestre philharmonique de Berlin (il s’agissait alors de La Flûte enchantée)… On l’aura compris, Karajan a tellement dominé la scène musicale classique au cours du XXe siècle que chaque année peut être l’occasion de faire paraître un enregistrement inédit ou un nouveau documentaire sur ce chef si génial et si controversé à la fois.
Telle est la rançon de la gloire et, malheureusement, tel peut être le prétexte à certains films assez neutres, pour ne pas dire insipides. C’est le cas du présent DVD. Réalisé en collaboration avec le Karajan Centrum de Vienne (qui, situé sur le Ring, à quelques minutes de l’Opéra, a depuis fermé ses portes, se contentant désormais d’un simple site Internet), on aurait pu s’attendre à ce qu’il nous dévoile des documents inédits permettant de découvrir un peu plus qui était Herbert von Karajan, comment il travaillait, quelle était son approche de tel ou tel compositeur… Certes, on découvre ici quelques images inédites permettant d’approfondir un tant soit peu la manière qu’avait Karajan de faire répéter un orchestre. Ainsi, se remémorant peut-être sa formation de timbalier, le voit-on répéter pendant un trop court instant le martellement final du troisième mouvement de la Cinquième symphonie de Gustav Mahler avec le Philharmonique de Berlin. De même, un peu plus loin, on écoute avec fascination ses explications données aux musiciens de Berlin (qui répètent chez leurs frères ennemis viennois, au Musikverein!) sur la manière dont ils doivent jouer le troisième mouvement de la Neuvième symphonie de Beethoven.
Mais ce sont là les seuls moments véritablement prenants de ce film qui, pour le reste, se contente de dérouler de manière assez désordonnée la vie du chef d’orchestre. Toutes les étapes sont retracées. Ses débuts à Ulm en 1929 puis Aix-la-Chapelle en 1935, son engagement au parti national-socialiste (même si le propos est beaucoup plus édulcoré que dans le superbe Maestro, Maestro! Herbert von Karajan de Claire Alby et Alfred Caron) et son acharnement à se faire un nom. Compte tenu du personnage qu’il s’est construit par la suite, on ne peut rester sans émotion en l’entendant raconter comment, depuis Aix-la-Chapelle, il se rendait en bicyclette à Bayreuth ou à Salzbourg pour écouter et voir diriger Toscanini, Furtwängler ou Richard Strauss, prenant également l’habitude, lorsqu’il se rendait à Vienne, de se cacher derrière les tuyaux des grandes orgues du Musikverein pour ne pas être vu des grands chefs qu’il admirait tant!
Le documentaire narre ensuite de façon assez plate, sans illustration d’ailleurs toujours bien à propos, sa conquête de l’Europe musicale: le Philharmonia à Londres, l’essor de ses activités à Vienne, Berlin (il prend les rênes du Philharmonique à la fin de l’année 1954 à la mort de Furtwängler), le Festival de Pâques de Salzbourg en 1967. Fort logiquement, le documentaire se conclut sur la crise née en 1983 avec la prestigieuse phalange (suite au recrutement par sa seule volonté de la clarinettiste Sabine Meyer), sur les tensions, sur sa maladie et, finalement, sur son décès en juillet 1989 à quelques jours de l’ouverture du Festival de Salzbourg dont il était, une fois encore, la vedette incontestée…
Les documentaires disponibles sur Herbert von Karajan sont déjà nombreux: outre le déjà cité Maestro, Maestro!, signalons le très complet Karajan, la beauté telle que je la vois de Robert Dornhelm (Deutsche Grammophon) en attendant, espérons-le, la prochaine édition de Karajan in Salzburg de Peter Gelb et Susan Froemke (Polygram) ou, pourquoi pas, de son Grand échiquier… Le présent DVD ne s’adresse donc qu’aux inconditionnels du maître et encore: s’ils l’admirent vraiment, ils ne pourront qu’être déçus.
Le site du Karajan Centrum
Sébastien Gauthier
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