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07/09/2008
Bela Bartok : Le Château de Barbe-Bleue
Sylvia Sass (soprano), Kolos Kovats (basse), Orchestre Philharmonique de Londres, Georg Solti (direction), Miklos Szinetar (mise en scène)
Enregistré en 1981 – 56’
Decca 0743254 (distribué par Universal)





Les représentation du Château de Barbe-Bleue sont problématiques, mais ce handicap est partagé par tous les opéras d’inspiration symboliste, où l’oeil espère forcément une forme de matérialisation sur scène de l’imaginaire très riche véhiculé par les mots du livret.
Beaucoup de metteurs en scène ont préféré éluder le problème en nous montrant des Ariane et Barbe-Bleue, Pelléas et Mélisande et Château de Barbe-Bleue prudemment abstraits et vides, solution de facilité qui évite de commettre des maladresses que l’on aurait vite fait de stigmatiser. Une autre option possible, certainement plus courageuse, consiste à jouer le jeu en montrant de façon plus ou moins réaliste les longues chevelures, vols de colombes effarouchées, gouffres sans fond, joyaux en vrac, grottes à recoins, lacs de larmes et autres ponts aux ânes pour décorateurs en mal d’inspiration. Et là, inévitablement, il faut se montrer vraiment génial, sous peine de se ridiculiser.


On peut donc facilement se gausser du travail accompli par le réalisateur Miklos Szinetar pour ce film réalisé en Hongrie avec des moyens apparemment réduits. Les décors y sont beaux mais réalisés de façon trop fruste, la caméra révélant sans pitié les fleurs en plastique, les drapés qui ne tiennent qu’avec des clous et des épingles, les flammes qui s’échappent sagement de tuyauteries de gaz rectilignes… Et pourtant, toutes les idées sont plastiquement intéressantes : longs souterrains crayeux, portes gothiques ouvragées qui s’ouvrent sur des mondes fantasmagoriques intelligemment unifiés… Les compositions décoratives dans lesquelles se promène Judith sont toujours construites autour du même type d’architecture, superpositions d’arcatures régulières que l’on retrouve partout, agencées différemment à chaque fois, avec une belle imagination (un type de dispositif apparemment à la mode au cours des années 1980, où l’on pouvait l’observer aussi par exemple dans le Parsifal de Götz Friedrich à Bayreuth ou le Fidelio de Stefan Braunschweig à Berlin). Tout cela est bien pensé, mais mal réalisé. A chacun d’appréhender le résultat en fonction de son degré d’indulgence et de conscience de la difficulté du sujet.


L’intelligence de la mise en valeur des protagonistes est en revanche indiscutable : costumes imaginatifs, d’inspiration Jugendstil, cadrages variés et mobiles, au service de deux compositions dramatiques captivantes. Sylvia Sass campe avec classe une Judith intransigeante et possessive, qui poursuit opiniâtrement son exploration jusqu’à la catastrophe finale. Kolos Kovats assiste passivement à la fouille systématique de son intimité, passant de façon très lisible de l’amour à l’inquiétude puis à la détresse grâce à une sobre gamme d’expressions. Vocalement, les performances sont toutes les deux remarquables. Reste le problème d’un play-back peu réaliste, qui gêne toutefois moins que dans la plupart des incontournables productions Unitel des années 1960-70. Peut-être est-ce dû aux sonorités inhabituelles de la langue hongroise, mais ici le contraste entre le chant et le manque d’effort apparent des mimiques ne ruine aucun effet musical. Très belle direction de Georg Solti, servie par une prise de son plutôt ample et agréable. En définitive, malgré ses quelques naïvetés, ce film est réussi et conserve de nombreux attraits.


Laurent Barthel

 

 

 

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