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11/05/2006 Georges Migot : Le Zodiaque – Prélude, Salut et Danse – Deux pièces
Stéphane Lemelin (piano)
Enregistré à Saint-Irénée (15-18 novembre 2005 et 16 mars 2006) – 104’12
Album de deux disques Atma Classique ACD2 2381 (distribué par Intégral)
Si la musique française de clavier semble avoir toujours manifesté une prédilection pour la petite forme, le siècle passé n’en a pas moins laissé des recueils de grande ampleur: le nom de Messiaen vient immédiatement à l’esprit, mais certains avaient l’avaient déjà précédé dans cette voie, tels Gabriel Dupont dans Les Heures dolentes puis Charles Koechlin dans Les Heures persanes. Tout aussi ambitieux (une heure et vingt-cinq minutes) et également né de la plume d’un créateur indépendant de toute école, Le Zodiaque (1932) de Georges Migot (1891-1976) se rattache sans peine à ces vastes partitions que leur rareté a rendus quasi mythiques.
Peintre et philosophe, élève de Gedalge, Widor et Maurice Emmanuel, Migot a notamment publié treize symphonies, creusant ainsi son chemin en solitaire, sans souci de séduire ni de se conformer au goût du jour ou à la tradition. Son Zodiaque consiste en douze pièces d’une durée de quatre à seize minutes (dont les cinq premières furent orchestrées en 1939): chacune fait bien entendu référence à l’un des signes astrologiques (le cancer étant assez inhabituellement désigné ici sous le nom d’Ecrevisse) et est dédiée à un grand pianiste (Alfred Cortot, Lucette Descaves, Yvonne Lefébure, Lazare Lévy, Isidore Philipp, Magda Tagliaferro, …). Après les premières auditions, le compositeur, qui était également poète, a écrit un Psaume pour mon zodiaque, qui éclaire le climat et la portée du cycle, de même que Debussy avait placé les titres de ses Préludes à la fin, et non en incipit, de ces pièces.
Si Migot – qui, né un 27 février, était donc poissons – a sous-titré ces pages «Etudes de concert», son propos n’est pas celui d’une démonstration brillante, résistant aux sirènes tant postimpressionnistes que néoclassiques. Une tonalité habilement élargie et une tranquille assurance évoqueraient la sévérité implacable du Hindemith des années 1930 si elles ne s’accompagnaient d’une fluidité et d’un sens de la couleur typiquement français, rappelant ainsi parfois les Préludes de Messiaen, exactement contemporains. Résolument hors des chapelles de son temps, l’ensemble cultive bien davantage les atmosphères méditatives et sereines que l’exubérance et l’extériorisation, avec peu de morceaux vifs (Le Scorpion, Le Sagittaire): si Le Verseau se place dans la descendance de Jeux d’eau ou d’Ondine, il ne faudra pas en revanche compter sur un Lion rugissant.
La version «historique» (1959-1960) de Jacqueline Eymar, Grand prix de l’Académie du disque français en 1961, autrefois parue chez Lumen, a récemment a été éditée chez Integral. L’interprétation de Stéphane Lemelin, par ailleurs auteur de la notice (en français et en anglais) et directeur de la collection «Musique française "Découvertes 1890-1939"» chez Atma, n’en demeure pas moins digne d’intérêt, d’autant que le pianiste canadien a eu l’excellente idée de proposer des compléments qui permettent de découvrir l’itinéraire qui a conduit Migot vers le dépouillement du Zodiaque. Dédiées à Reynaldo Hahn, les Deux pièces (1912) sont encore tributaires de Fauré, notamment dans La source s’endort, même si Le beau voyage, beaucoup plus développé, traduit déjà l’influence de la musique de la Renaissance. Plus personnel, le triptyque Prélude, Salut et Danse (1927), dont il existe également une adaptation pour orchestre à cordes, flirte avec la simplicité péremptoire et hiératique du meilleur Satie.
Le site d’Atma Classique
Le site des «Amis de l’œuvre et de la pensée de Georges Migot»
Le site de Stéphane Lemelin
Simon Corley
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