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09/21/2024
Domenico Cimarosa : L’Olimpiade
Josh Lovell (Clistène), Rocío Pérez (Aristea), Mathilde Ortscheidt (Licida), Maïté Beaumont (Megacle), Marie Lys (Argène), Alex Banfield (Aminta), Les Talens Lyriques, Christophe Rousset (pianoforte et direction)
Enregistré salle Colonne, Paris (18‑22 décembre 2023) – 146’04
Coffret de deux disques Château de Versailles Spectacles, collection « Opéra italien » n° 6) CVS 143 (distribué par Outhere) – Notice (en français, anglais et allemand) d’Alessandro di Profio


Must de ConcertoNet





« En musique il y a deux routes pour arriver au plaisir : le style de Haydn, le style de Cimarosa, la sublime harmonie ou la mélodie délicieuse. » Après avoir écouté L’Olimpiade dans cette magistrale version dirigée par Christophe Rousset, on ne peut qu’adhérer pleinement à l’appréciation de Stendhal (dans son livre Rome, Naples et Florence), qui portait Cimarosa aux nues après avoir découvert, au mois de mai 1800, son chef‑d’œuvre Le Mariage secret. Car voilà une gravure que tout mélomane, après l’avoir entendue une première fois, mettra sans nul doute au sommet de sa pile de disques pour l’écouter et la réécouter sans cesse, pour se délecter de certains airs dont on se demande comment ils ont pu jusqu’alors rester si longtemps ignorés.


Créé le 10 juillet 1784 pour l’inauguration du Teatro Eriteo de Vicence, cet opéra en deux actes de Domenico Cimarosa (1749‑1801) a été composé sur un livret du célèbre Métastase, livret qui avait déjà servi à toute une palanquée de compositeurs (Vivaldi bien sûr mais aussi Jommelli, Gassmann, Hasse, Pergolèse, Galuppi, Sarti...) pour composer chacun « son » Olimpiade. Ses deux actes n’ont que peu à voir avec les jeux Olympiques, qui ne servent que de vague toile de fond à diverses intrigues amoureuses – hautement complexes avouons‑le – dominées par celle entre Licida et Argène. Inutile d’entrer dans le détail de l’action sentimentale ainsi peinte par ces divers airs et duos et venons‑en immédiatement à la musique, car c’est bien elle qui nous occupe.


Quel orchestre tout d’abord ! Les Talens Lyriques nous emportent de la première à la dernière note avec, d’emblée, une Ouverture à l’énergie folle où la précision des cordes le dispute à un arc‑en‑ciel de couleurs chatoyantes. Par la suite, la musique de Cimarosa sait nous séduire tant dans ses éclats et sa brillance (les trompettes dans le premier air d’Aminta (acte I, scène 1) que dans son sens des contrastes et des nuances (merveilleux accompagnement de l’air d’Aristea « Tu di saper procura » à la scène 6 de l’acte I) ou dans le climat souhaité (écoutez par exemple ces cors qui cravachent, même si l’on aurait pu les souhaiter un peu plus « cuivrés », et ces cordes qui halètent à qui mieux mieux dans l’air superlatif d’Argène à la scène 15 de l’acte II). Si l’on ajoute à cela un accompagnement au pianoforte tout à fait idoine, Christophe Rousset étant lui‑même au clavier, avec une attention de chaque instant, on bénéficie là de toute la brillance et de toute la finesse d’une partition véritablement enthousiasmante.


Puisqu’on vient d’y faire allusion, on ne nous en voudra pas de commencer la partie chantée de cette Olimpiade par le personnage d’Argène, superbement tenu par Marie Lys. Car l’air « Spiegar non posso appieno » (acte II, scène 15) est tout bonnement, en tout cas à notre sens, le sommet absolu de l’opéra. Moins de trois minutes certes, mais quel moment ! Quelle fougue dans la voix, quelle justesse dans les aigus, quelle véhémence dans la parole ! On est époustouflé par ces un peu plus de deux minutes de musique qui méritent à elles seules les lauriers que les gagnants des épreuves olympiques recevaient déjà sous la Grèce antique. Sachons par ailleurs rendre grâce à Marie Lys dans le reste de ses interventions, étant par exemple tout à fait capable de nous éblouir par son legato et sa longueur de souffle dans la cavatine à la scène 3 de l’acte I. Dans le rôle d’Aristea, la jeune chanteuse espagnole Rocío Pérez, que l’on avait déjà entendue chez Cimarosa dans Le Mariage secret (elle tenait alors le rôle de Caroline) et dont la notoriété est notamment venue ces dernières années de sa fréquente incarnation de la Reine de la Nuit (voir par exemple ici), elle est également un joyau de cette équipe. Difficile de ne pas succomber à ses aigus cristallins et à son timbre lumineux, qui témoignent d’une facilité technique déconcertante (l’air « Tu di saper procura » à la scène 6 de l’acte I ou son air tout aussi incroyable « Grandi, è ver, son le tue pene » à la scène 3 de l’acte II). Signalons à cette occasion le duo qu’elle noue avec le hautbois solo (excellent Martin Stadler) à la scène 14 de l’acte II, qui nous rappelle ainsi que la créatrice du rôle, la soprano Franziska Dorothea Danzi Lebrun, n’était autre que l’épouse du hautboïste et compositeur Ludwig August Lebrun (dont lePemier Concerto pour hautbois en ré mineur est passé, à juste titre, à la postérité), qui jouait de cet instrument dans l’orchestre du Teatro Eriteo dont on a vu qu’y avait créé le présent opéra ; le couple a ainsi vraisemblablement suscité ce duo on ne peut plus haut en couleur chez Cimarosa, qui réalise là un des autres sommets de l’opéra.


Face à Aristea, le Clistène de Josh Lovell s’avère être un compagnon de choix (le constat formulé à son endroit lors de la représentation scénique ne se retrouve nullement au disque. Le ténor canadien a tout ce qu’il faut : de la justesse, une vraie technique dans les fioritures (la scène 5 de l’acte I), des aigus jamais poussés auxquels on peut ajouter un vrai panache comme en témoignent les deux airs « Bell’alme innamorate » (scène 5 de l’acte II) et plus encore « Non so donde viene » (scène 16 du même acte). Un nom à retenir que l’on espère vraiment voir plus souvent sur nos scènes et au disque. Grande habituée de ce répertoire, Maïté Beaumont incarne une Megacle de toute beauté ; on ne peut, chez elle aussi, que louer son sens de l’articulation et son agilité vocale. Dans le très beau duo « Ne’giorni tuoi felici » entre Megacle et Aristéa qui conclut le premier acte, Maïté Beaumont s’illustre aux côtés de Rocío Pérez. Comme dans Rossini dont il est à l’évidence un précurseur, Cimarosa ne supporte ni l’à‑peu‑près, ni l’insuffisance technique : aucun danger ici ! Quant à Mathilde Ortscheidt et Alex Banfield, ils complètent avec brio une équipe de chanteurs tout à fait superlative.


On l’aura compris : voilà un coffret dont les mérites sont évidents et qui ne peuvent que nous donner envie de voir le répertoire lyrique de Cimarosa exploré par la même équipe où musicalité et brio couronnent une Olimpiade d’une médaille d’or amplement méritée.


Le site de Christophe Rousset et des Talens Lyriques
Le site de Josh Lovell
Le portrait de Rocío Pérez sur le site du concours Reine Elisabeth
Le site de Mathilde Ortscheidt
Le site de Marie Lys
Le site de Maïté Beaumont
Le site d’Alex Banfield


Sébastien Gauthier

 

 

 

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