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09/10/2024 « La Bellezza »
Francesco da Milano : Ricercari 8, 33, 38, 42 et 51 – Fantasie : 6 et 39
Giulio Regondi : Introduzione e capriccio, opus 23
Mario Castelnuovo-Tedesco : Sonata Omaggio a Boccherini, opus 77
Nuccio d’Angelo : Due Canzoni lidie Philippe Mouratoglou (guitare)
Enregistré au Studio La Buissonne, Pernes-les-Fontaines (date non précisée) – 57’13
Vision fugitive VF313027 – Notice en français (avec des reproductions de belles aquarelles d’Emmanuel Guibert inspirées par l’Italie)
Alors que la guitare reste principalement associée à l’Espagne depuis qu’elle y a vu le jour à la fin du quinzième siècle, le guitariste Philippe Mouratoglou, après un disque consacré à Fernando Sor, se tourne cette fois vers l’Italie. Le voyage en Italie, peu fréquent à la guitare, nous conduit de la Renaissance avec Francesco da Milano (1497‑1543) à la période contemporaine avec Nuccio d’Angelo (né en 1955) en passant par Giulio Regondi (1822‑1872) et Mario Castelnuovo-Tedesco (1895‑1968), compositeur inconnu malgré ses nombreuses musiques de film composées après son exil aux Etats‑Unis.
Le récital n’est pas bien long, à l’image sans doute de la production italienne en matière de guitare seule, mais ne manque pas d’intérêt. L’interprète, chanteur, improvisateur, cofondateur du label Vision fugitive, Philippe Moratoglou (né en 1973) y utilise un instrument moderne puisque datant dev2013. Si le choix peut être contesté pour la musique ancienne, en fait écrite pour le luth, on ne retiendra pas la critique par principe : il en est finalement de même en matière de musique pour clavecin, sa lecture sur piano moderne ayant depuis longtemps eu de brillants illustrateurs et défenseurs.
On notera plutôt la délicatesse du toucher de Philippe Mouratoglou. On passe d’élégants chromatismes d’une pièce assez belcantiste de Regondi à une subtile et empreinte de nostalgie pour ne pas dire de tristesse Sonate de Castelnuovo-Tedesco, élève d’Andrés Segovia (1893‑1987), apôtre influant de la guitare classique mais présenté aussi de façon surprenante dans la notice comme un maître « imbu de lui‑même », ayant contribué transformer le monde de la guitare classique en « secte » et ayant pris un « plaisir pervers à humilier » ses jeunes élèves ne jouant pas comme lui. Autre époque, sans doute comme celle de Nadia Boulanger ou Yvonne Lefébure, enseignantes ayant su également être odieuses...
On apprécie l’inventivité et le raffinement des pièces de da Milano derrière lesquelles on devine, on recherche presque, le luth mais c’est la modernité des Chansons de d’Angelo qui retient surtout l’attention, avec ses effets de résonnance, ses couleurs singulières liées à l’abaissement d’un demi‑ton des deuxième et sixième cordes et son langage aussi complexe que trouble.
Stéphane Guy
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