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03/20/2021
Ludwig van Beethoven : Trios avec piano n° 1 en mi bémol majeur, opus 1 n° 1 [*], n° 2 en sol majeur, opus 1 n° 2, n° 3 en ut mineur, opus 1 n° 3, n° 5 en ré majeur «Geistertrio», opus 70 n° 1, n° 6 en mi bémol majeur, opus 70 n° 2, et n° 7 en si bémol majeur «Erzherzog-Trio», opus 97 [*]
Trio Sōra: Pauline Chenais (piano), Clémence de Forceville (violon), Angèle Legasa (violoncelle)
Enregistré à La-Chaux-de-Fonds (19-23 octobre 2019 [*], 2-6 mars et 14-18 juillet 2020) – 189’25
Coffret de trois disques Naïve V7085 – Notice en anglais et français


Sélectionné par la rédaction





En cette année de célébration du deux cent cinquantième anniversaire de la naissance de Beethoven, le Trio Sōra a eu la bonne idée de se pencher sur la musique de chambre du «Grand Mogol», surnom donné par Haydn à son élève turbulent entre 1792 et 1794. Fondé en 2015 par des diplômées du Conservatoire national de Paris, le Trio Sōra a choisi pour son premier disque de graver l’intégrale des trios pour piano avec numéro d’opus, ce qui exclut le Trio de jeunesse de 1791 (probablement composé pour obtenir les leçons auprès de Haydn), tout comme le Trio pour piano, clarinette et violoncelle, opus 11 (1798), dont la partie de clarinette peut être remplacée par le violon. Les trois disques de ce coffret nous donnent ainsi à voir toute l’étendue de l’évolution stylistique de Beethoven entre les tout premiers trios, publié en 1795 alors qu’il est encore élève de Salieri et Albrechtsberger, et le dernier dédié à l’Archiduc en 1811 – à juste titre le plus connu du corpus.


Le Premier Trio nous emporte d’emblée dans la fougue communicative des interprètes, qui se saisissent de l’élan haydnien en un mélange de légèreté et de toucher sans vibrato, avec des tempi vifs (dans les mouvements extérieurs). On sent déjà le versant péremptoire d’un compositeur alors plus connu comme virtuose du piano, tandis que le mouvement lent laisse entrevoir une atmosphère plus recueillie, avec un jeu sur les nuances et de belles couleurs. Félins et malicieux, les phrasés du Trio Sōra sont un régal d’intelligence narrative sans ostentation, tandis que le Scherzo qui suit apporte davantage de fraîcheur, et ce malgré les accords plaqués volontairement abrupts. La variété des accents surprend dans le dernier mouvement à la mélodie entêtante, qui rappelle là encore Haydn dans l’expression rythmique étourdissante: volontiers brutale dans les tutti, l’exacerbation des passions virevolte avec bonheur entre les instruments, révélant le tempérament déjà bien affirmé de Beethoven.


Le style tout en contrastes des Sōra fonctionne moins bien dans le Deuxième Trio, à l’écriture plus déliée, même si on se délecte des couleurs grinçantes aux cordes. On retrouve l’énergie et les ruptures sèches bienvenues dans l’éclatant Troisième Trio, à la mélodie immédiatement prenante: plus tragique, le mouvement initial est contrasté avec un Andante que les interprètes abordent avec un esprit d’apaisement aux allures nonchalantes, comme s’il était improvisé. Les deux trios suivants de l’Opus 70, composés dans la foulée de la Sixième Symphonie en 1808, montrent un Beethoven tout aussi sanguin, mais sans doute moins inspiré par une virtuosité qui tourne parfois à vide. Le Trio Sōra poursuit sa lecture dynamique en un élan qui sait se régaler des atmosphères plus méditatives entre les tutti, évoquant ainsi les délicatesses de Schubert.


C’est toutefois le sommet du cycle, le dernier et Septième Trio (1811), qui surprend par son début abordé avec une sérénité et une sensibilité à fleur de peau, apportant un éclairage de douceur inattendu: le piano volontairement en retrait laisse la part belle à ses comparses, en un esprit chambriste bien éloigné des cathédrales romantiques souvent à l’œuvre ici. La légèreté domine, tout particulièrement dans un Andante aux phrasés à la limite du murmure, comme un quasi-renoncement. Le Presto conclusif poursuit sur ces variétés en clair-obscur, avec des nuances qui mettent en valeur les couleurs des instruments, et des tutti plus secs en contraste. Cette lecture vivifiante et toujours très personnelle, à l’image des enregistrements réunis sur ce coffret, est vivement recommandable.


Le site du Trio Sōra


Florent Coudeyrat

 

 

 

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