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03/29/2020 Moritz Moszkowski : Trois Morceaux, opus 34: 1. Valse – Barcarole aus «Hoffmanns Erzählungen» – Frühling, opus 57: 4. «Zephyr» & 5. «Liebeswalzer» – Isoldens Tod - Schluss-Szene aus «Tristan und Isolde» – 15 Etudes de virtuosité «Per aspera», opus 72: 13. Molto animato – Sechs Phantasiestücke, opus 52: 3. «Zwiegesang» & 4. «Die Jongleurin» – Huit Morceaux caractéristiques, opus 36: 4. «En automne» & 6. «Etincelles» – Drei Clavierstücke in Tanzform, opus 17: 1. Polonaise – Deux Pièces, opus 45: 2. «Guitarre» – Caprice espagnol, opus 37 – Chanson bohème de «Carmen» Etsuko Hirose (piano)
Enregistré en l’église évangélique Saint-Marcel, Paris (29 octobre-1er novembre 2019) – 72’39
Danacord DACOCD 866 – Notice (en anglais) de l’interprète
Sélectionné par la rédaction
Difficile de suivre Etsuko Hirose dans ses pérégrinations discographiques : après avoir enregistré pour Denon (très belles Etudes de Chopin), elle fit une brève escapade chez Piano 21 aux côtés de Cyprien Katsaris. Son dernier disque, consacré aux Etudes d’exécution transcendantes de Lyapunov, parut chez Mirare, label où elle semblait avoir posé bagages. La voici à présent sous étiquette Danacord, aux commandes d’un superbe Bechstein, dans un récital entièrement voué à des œuvres du compositeur et pianiste allemand d’origine polonaise Moritz Moszkowski (1854-1925).
Il y a les transcriptions, qui exploitent au maximum les potentialités orchestrales de l’instrument: ainsi du Liebestod (dédié à Busoni), qu’Earl Wild plaçait plus haut que son homonyme lisztien dont il reprend pourtant maints procédés, comme le tremolo à la main gauche, subterfuge incontournable pour entretenir le son au piano et répandre les sortilèges wagnériens. Attachée à ne pas trop appuyer les basses, Etsuko Hirose fait voyager à plaisir le centre de gravité harmonique. Moins inventive, la «Barcarolle» des Contes d’Hoffmann dispense son doux balancement, tandis que la «Chanson bohémienne» de Carmen investit les sphères de la haute technicité, mais souffre de la comparaison avec les diaboliques Variations de Vladimir Horowitz dont elle paraît l’ossia simplifié; peut-être ce sentiment est-il tout simplement dû à la facilité avec laquelle la pianiste l’exécute...
Les pièces de plus grande envergure ont beau être interprétées avec beaucoup de chic – ce léger retard du troisième temps (Valse opus 34 n° 1), ces rythmes caractéristiques (Polonaise opus 17 n° 1) –, elles versent malheureusement trop souvent dans la virtuosité creuse et le bavardage salonard. On fera une exception pour le pittoresque Caprice espagnol, qu’un Josef Hofmann avait à son répertoire.
Le meilleur du disque est à trouver dans les miniatures qui, sous les doigts inspirés de la pianiste japonaise, rempliraient avantageusement leur office de bis. On n’en prendra pour exemple que les fameuses «Etincelles» (dont Horowitz aimait à éclabousser son public) ou les extraits des Phantasiestücke opus 52. Aussi regrettera-t-on qu’Etsuko Hirose n’ait pas davantage puisé dans le corpus des Quinze Etudes de virtuosité opus 72 (Guy Sacre, d’ordinaire sévère à l’égard de Moszkowski, y voit «de l’invention à revendre»), se contentant de la seule Treizième, d’une redoutable difficulté pour la souplesse des poignets. Mais que cela ne nous empêche pas de saluer le jeu toujours délié et spirituel d’Etsuko Hirose dans ce très beau disque, au minutage généreux, que l’on conseillera sans réserve pour une découverte du compositeur... en attendant un enregistrement complet des Etudes?
Jérémie Bigorie
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