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10/19/2019
Georg Friedrich Händel : Giulio Cesare in Egitto, HWV 17: «Se pietà di me non senti» & «Non disperar, chi sa?» – Alcina, HWV 34: «Ah, mio cor, schernito sei!» & «Tornami a vagheggiar» – Theodora, HWV 68: «With darkness deep, as is my woe» & «To thee, thou glorious son of worth» – Rodelinda, regina de’ Longobardi, HWV 19: «Io t’abbraccio» – Agrippina, HWV 6: «Pensieri, voi mi tormentate!» & « Ogni vento ch’al porto lo spinga» – Rinaldo, HWV 7: «Lascia ch’io pianga»
Henry Purcell : Dido and Aeneas, Z 626: «Thy hand, Belinda... When I am laid in earth»

Sonya Yoncheva (soprano), Karine Deshayes (mezzo-soprano), Academia Montis Regalis, Alessandro De Marchi (direction)
Enregistré à l’Academia Montis Regalis, Mondovi (13-14 et 20-24 juin 2016) – 63’45
Sony Classical 88985302932 – Notice (en anglais, allemand et français) de Petya Ivanova





«Shades of Love»
Georg Friedrich Händel : Lucrezia, HWV 145 – Se pari è la tua fè, HWV 158a – Clori, mia bella Clori, HWV 92 – Sento là che ristretto, HWV 161b – Crudel tiranno Amor, HWV 97

Anna Kasyan (soprano), Jory Vinikour (clavecin), Ophélie Gaillard (violoncelle), Jorge Jiménez, Anastasia Shapoval (violon), Michel Renard (alto)
Enregistré en l’église de Bon Secours, Paris (2-5 décembre 2016) – 66’36
Evidence EVCD 038 – Notice bilingue (français et anglais) de Suzanne Laetitia Kassian





«Duel: Porpora and Händel in London»
Georg Friedrich Händel : Alcina, HWV 34: «Sta nell’ircana pietrosa tana» – Ariodante, HWV 33: «Scherza infada» & Suite de ballet – Tolomeo, HWV 25: «Inumano fratel, barbara madre» & «Stille amare, già vi sento» – Catone in Utica, HWV A7: «Quando piomba improvvisa saetta»
Nicola Porpora : Arianna in Naxo: «Nume che reggi ‘I mare» – David e Bersabea: «Dolce è su queste alte mie logge e sera» & « Fu del braccio onnipotente» – Polifemo: Ouverture & «Il gioir qualor s’aspetta» – Calcante e Achille: «A questa man verrà» – Mitridate: «Alza al soglio i guardi»

Giuseppina Bridelli (mezzo-soprano), Le Concert de l’Hostel Dieu, Franck-Emmanuel Comte (clavecin et direction)
Enregistré au Temple Lanterne, Lyon (27-30 juin 2018) – 65’50
Arcana A461 (distribué par Outhere) – Notice (en anglais, français et italien) de Stefano Aresi





«Seconda Donna»
Georg Friedrich Händel : Lotario, HWV 26: «Furie del crudo averno», «Arma lo sguardo» & «Quel superbo» – Berenice, HWV 38: «Gelo, avvampo» – Floridante, HWV 14: «Notte cara» – Radamisto, HWV 12: «Son contenta» & «Quando mai spietata sorte»
Antonio Vivaldi : Orlando furioso, RV 728: «Amorose ai rai del sole», «Vorresti amor da me», «Asconderò il mio sdegno» & «Se cresce un torrente» – Farnace, RV 711: «Forse, o caro, in questi accenti» & «Lascia di sospirar» – Argippo, RV 697: «Se lento ancora il fulmine»

Julia Böhme (alto), La Folia Barockorchester, Robin Peter Müller (direction)
Enregistré au Palais im grossen Garten, Dresde (avril 2015) – 51’01
Accent ACC 24356





Florilège baroque consacré principalement au monstre sacré que fut Georg Friedrich Händel, l’ensemble de ces quatre disques nous permet également d’entendre une nouvelle génération de chanteuses se frotter au répertoire baroque. Quand bien même les réussites seraient diverses, force est de constater que, en soi, la relève est pleinement assurée.


Le premier disque de cette sélection händelienne nous laisse une impression mitigée. Non pas que la voix de Sonya Yoncheva soit désagréable, elle qui, depuis qu’elle a été découverte par William Christie (la vidéo le voyant, en 2006, totalement subjugué à l’issue d’une audition d’un extrait d’Hippolyte et Aricie alors qu’il l’avait repérée quand elle n’était encore que choriste à l’Opéra de Genève, a fait le tour du monde), s’est hissée au firmament des plus grandes sopranos du moment. Mais comment peut-on aligner autant de lieux communs, maintes fois rabâchés, alors que les partitions händeliennes sont si riches et mériteraient d’être davantage exploitées? Bref, admirons tout de même, dans «Se pietà di me non senti» (Giulio Cesare in Egitto), la parfaite adéquation entre la voix tout en retenue (alors qu’il est si facile d’en faire quelque chose de larmoyant) et la sobriété de l’accompagnement orchestral, l’Academia Montis Regalis étant une nouvelle fois dirigée de main de maître par Alessandro De Marchi. Ne boudons pas davantage notre plaisir dans l’extrait célébrissime d’Alcina, «Ah, mio cor, schernito sei!», aux aigus cristallins et à la force émotionnelle incroyable, le second extrait de l’opéra (le tout aussi connu «Tornami a vagheggiar») trahissant une facilité d’élocution qui, c’est le cas de le dire, nous laisse sans voix... Un mot tout de même sur les deux duos présentés ici où la soprano Sonya Yoncheva est rejointe par la mezzo Karine Deshayes, le relatif déséquilibre du premier (la voix de la Française semblant parfois reléguée au lointain) étant rattrapé par une véritable symbiose dans le second, tiré de l’oratorio Theodora, la longueur d’archet accompagnant là encore le souffle des deux chanteuses. Si le dernier extrait présenté, issu de Didon et Enée de Purcell, nous paraît un rien moins convaincant, il ne dépare évidemment pas dans un récital où, au-delà de l’exercice, on ne peut plus convenu, on ne peut qu’en conclure: quelle voix, quel disque!


Les cantates profanes composées par Händel nous renvoient toutes à sa période italienne, le genre ayant été inventé au début du XVIIe siècle par des compositeurs comme Cesti ou Rossi. Alternant classiquement récitatifs et airs chantés, accompagnés par une basse continue aux mélodies des plus simples, les cantates qui avaient alors cours s’inspiraient souvent de récits amoureux puisés notamment chez Ovide ou Le Tasse ou de récits pastoraux propres à illustrer l’ancienne Arcadie louée par les artistes italiens et, plus largement, de l’Europe tout entière. La Lucrezia fut une des plus célèbres cantates composées par Händel grâce, sans doute, à la diversité de caractères qu’il a su y traduire, du «Già superbo del mio affanno», tout en retenue et froide colère, au véhément «Il suol che preme» qu’illustrent à la fois la voix extrêmement habitée de Anna Kasyan et le violoncelle d’Ophélie Gaillard. Le crescendo de l’action peint par cette cantate culmine dans le terrible troisième air marqué par une agilité vocale remarquable le furioso «Questi la disperata». Accompagnée par un excellent petit ensemble (quatre musiciens dont l’excellent premier violon dans «Alla salma infedel»), Anna Kasyan finit la cantate par un ultime trait de colère scandé par un clavecin tout aussi emporté. Sans peut-être rejoindre l’interprétation superlative de Sandrine Piau avec le Seminario musicale de Gérard Lesne (Virgin Veritas), la présente version n’en convainc pas moins. Changement d’ambiance avec le très vif «Se pari è la tua fè» tiré de la cantate du même nom où la voix affiche une insolente technique, à l’instar de l’accompagnement du violoncelle et du clavecin. Plus ambitieuse tant dans ses dimensions que du point de vue artistique, la cantate Clori, mia bella Clori, sans doute créée au mois de juin 1707 par Margherita Durastanti pour laquelle Händel composa plusieurs cantates, y compris en français et en espagnol. Le héros peint ici pleure sa chère Chloris, amour disparu peint au fil de quatre airs où clavecin et violoncelle sont rejoints par deux violons qui s’illustrent tout spécialement dans le magnifique «Mie pupille, se tranquille» (troisième air) et dans l’air conclusif «Di gelosia il timore». Anna Kasyan a le tempérament requis, à n’en pas douter, son sens du phrasé sublimant véritablement le bouleversant «Mormorando esclaman l’onde» dans la cantate Sento là che ristretto.


Le disque «Duel» est remarquable de bout en bout. Sans nous étendre outre mesure sur cet affrontement, rappelons que Nicola Porpora (1686-1768) fut un compositeur exceptionnel, travaillant essentiellement à Naples et Rome avant que la concurrence des opéras de Leonardo Vinci ne le pousse à gagner Londres. En 1733, il est engagé par des mécènes anglais qui décidèrent de créer le nouvel Opera of the Nobility (qui ouvre sa saison le 29 décembre 1733 avec Arianna in Nasso dudit Porpora) pour contrer la troupe, soutenue par le roi George II, qui employait un certain Georg Friedrich Händel... Les deux compositeurs rivalisent alors dans leurs compositions, Porpora réussissant à faire venir dans sa troupe Francesco Bernardi, plus connu sous le nom de Senesino, La Cuzzoni et même Farinelli, qu’il prend chez Händel, la lutte entre ces deux grandes figures prenant fin avec le retour de Porpora à Venise à partir de 1737. Le présent disque opposant Porpora et Händel tourne rapidement à l’avantage de ce dernier mais, avouons-le, les extraits choisis ici sont, pour certains, parmi les plus célèbres et les plus beaux du Caro Sassone. La verve des cors dans «Sta nell’ircana pietrosa tana» (Alcina) accompagne une voix au timbre très clair, d’une technique irréprochable où rien ne souligne la dextérité requise. La subtilité de l’orchestre dans son ensemble cette fois-ci (avec des pupitres plus éclairés que d’autres: les bassons!) soutient pour sa part l’extraordinaire «Scherza infida», peut-être le plus bel air d’AriodanteGiuseppina Bridelli nous fait pleurer dès son entrée (mais comment ne pas être ému aux larmes avec une telle composition?) tandis que l’air de ne pas y toucher de l’ensemble offre un parfait écrin à la chanteuse dans un «Stille amare, già vi sento» confondant lui aussi de beauté. Le moins connu «Quando piomba improvvisa saetta» fait appel à une supériorité de la technique sur la seule émotion: les notes s’enchaînent avec caractère, les aigus s’envolent sans peine, les cordes accompagnent tout cela avec fraîcheur... Difficile donc pour Porpora d’exister pourrait-on se dire. Que nenni, dans la mesure où les talents du bonhomme sont indéniables: quel compositeur là aussi mais, à bien y regarder, la facilité dont fait preuve Händel semble, chez l’Italien, plus travaillée bien qu’elle ne soit, évidemment, jamais besogneuse. Le premier air, «Nume che reggi ‘l mare», impose avant tout ses mérites comme orchestrateur: des cordes superbes, une mélodie avec de nombreuses variantes qui coule de source, un grand naturel dans les ornementations. Dommage que Giuseppina Bridelli fasse ici montre d’un vibrato parfois trop prononcé, une voix plus étale ayant sans doute mieux convenu à cet air incroyable. La voix s’affirme en revanche idéale dans l’air «Fu del braccio onnipotente», tiré de David e Bersabea (1734), l’évidence de la mélodie imposant la même tonalité à la chanteuse. On passera un peu plus rapidement sur les quatre extraits suivants tirés de Polifemo, où le chant manque sans doute un rien de caractérisation, l’accompagnement étant en revanche excellent à commencer par les hautbois dans l’Allegro de l’Ouverture. Sans nul doute, Le Concert de l’Hostel Dieu, dirigé avec talent par Franck-Emmanuel Comte, est un ensemble à suivre dans ce répertoire! Nicola Porpora achève de s’illustrer avec ce nouvel air tiré de Polifemo, «Il gioir qualor s’aspetta», où l’agilité vocale de Giuseppina Bridelli brille une nouvelle fois mais sans les pyrotechnies inutiles auxquelles certaines de ses consœurs se cantonnent si facilement.


Etonnant de voir ce disque, enregistré en avril 2015, publié quatre ans plus tard. L’angle d’attaque était intéressant en se focalisant non sur les héros et héroïnes des opéras d Händel et de Vivaldi, mais plutôt sur des personnages secondaires au tempérament et à la fougue tout aussi forts, et qui jouent dans les faits bien plus que le rôle de simples faire-valoir. Même si la voix de Julia Böhme est belle et sa technique vocale appréciable, ce disque est dans l’ensemble une déception. La faute tout d’abord et surtout à un accompagnement instrumental des plus chiches, tant au niveau de l’effectif (qui sonne constamment «petit» alors que les orchestres requis à l’époque étaient beaucoup plus étoffés et soutenaient ainsi la voix avec davantage de finesse, le clavecin ayant un son par ailleurs ici beaucoup plus métallique que cristallin) que de l’esprit. L’Orchestre baroque La Folia (Dresde) s’avère prosaïque et ne montre guère de changement d’engagement, non plus que de nuances, suivant les différentes plages du disque. La faute aussi à une certaine véhémence dans le chant et chez l’orchestre qui confine parfois étonnamment à la brutalité du trait. Le magnifique «Lascia di sospirar» déclamé par Selinda dans Farnace (acte II, scène 1) ne revêt ici aucun côté mutin, voire provocateur: on n’y entend que reproches et interjections. De même, quel manque de poésie dans le fameux «Amorose ai rai del sole» chanté par Alcina à la fin du premier acte d’Orlando furioso: qu’on réécoute la fabuleuse Lucia Valentini-Terrani dans l’enregistrement historique de Claudio Scimone et vous verrez ce que poésie et style veulent dire. Ne soyons tout même pas aussi univoque! Ainsi, ce disque reste appréciable sur un point: le fait d’avoir choisi des airs peu connus, en tout cas qui sortent un peu des sentiers battus. En dépit de violons aigrelets, l’air «Quando mai spietata sorte» tiré de Radamisto est assez incroyable par sa virtuosité et son ancrage pleinement italien, la prononciation de la langue de la Péninsule par Julia Böhme demeurant néanmoins perfectible. Aux côtés d’un irrésistible «Notte cara» (Floridante de Händel), le disque se conclut sur son sommet vivaldien qui n’est autre que l’ébouriffant «Se lento ancora il fulmine» déjà magnifié au disque par des spécialistes du genre comme Cecilia Bartoli ou Romina Basso: Julia Böhme tient son rang avec assurance. Qu’elle nous revienne vite, mais surtout avec un véritable orchestre cette fois-ci et nos récriminations du jour devraient toutes finir par céder.


Le site de Sonya Yoncheva
Le site de Karine Deshayes
Le site de l’Academia Montis Regalis
Le site de Giuseppina Bridelli
Le site du Concert de l’Hostel Dieu
Le site de Julia Böhme
Le site de l’Orchestre baroque La Folia


Sébastien Gauthier

 

 

 

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