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09/04/2019
Jean-Philippe Rameau: Les Indes galantes
Chantal Santon-Jeffery (Hébé, Zima), Katherine Watson (Emilie), Véronique Gens (Phani), Reinoud Van Mechelen (Dom Carlos, Valère, Damon), Jean-Sébastien Bou (Osman, Adario), Thomas Dolié (Bellone, Huascar, Dom Alvar), Purcell Kórus, Orfeo Zenekar, György Vashegyi (direction)
Enregistré à la salle de concert nationale Béla Bartók du Müpa, Budapest (25-27 février 2018) – 123’41
Album de deux disques Glossa GCD 924005 – Notice (en anglais, français et allemand) de Sylvie Bouissou et Benoît Dratwicki et traduction des textes chantés





Chef-d’œuvre de Jean-Philippe Rameau (1683-1764), Les Indes galantes (1735) offrent une première difficulté, qui consiste à choisir la version à interpréter. Celle qui est présentée ici date de 1761 et correspond donc à la dernière que Rameau ait laissée, trois ans avant sa disparition. Le Prologue s’en trouve raccourci (le personnage de l’Amour est oublié, certains récitatifs disparaissent), «Les Incas du Pérou» deviennent la Première Entrée alors que, dans la version de 1735, ils intervenaient en deuxième (après «Le Turc généreux»), la Troisième Entrée («Les Fleurs – Fête persane») est totalement omise, comme c’est malheureusement souvent le cas même si, un connaisseur aussi pointilleux que l’était Philippe Beaussant avouait lui-même que «c’est la plus faible des quatre entrées et sans quelques merveilleuses pages de musique [...] on tirerait aisément un trait sur elle» (Rameau de A à Z, Fayard, mai 1983, page 189).


György Vashegyi et son remarquable Orchestre Orfeo nous ont laissé plusieurs témoignages de toute première valeur dans ce répertoire qu’ils maîtrisent excellemment. D’où notre déception sur plusieurs plans, en dépit d’une équipe de chanteurs de très haute volée.


Les voix masculines sont sans conteste les plus remarquables dans cet enregistrement où la théâtralité est tout aussi importante que la ligne de chant. A ce jeu-là, comment ne pas souligner la prestation tout en finesse de Thomas Dolié qui tient les rôles de Bellone (dès le Prologue, excellent air «C’est la gloire»), Dom Alvar et, surtout, l’Inca Huascar. On l’avait déjà remarqué dans ce rôle au sein de l’équipe qui, il y a deux ans, nous avait donné d’excellentes Indes au Festival de Sablé-sur-Sarthe. Le voici qui récidive, alliant projection parfaite et autorité dans le chant, le tout s’agrémentant d’une prononciation exemplaire (cela peut sembler anecdotique mais avouons que, concerts et disques nous donnent souvent à entendre des chanteurs français qui n’entendent pas grand-chose à sa diction): l’air, avec chœur, «Brillant Soleil, jamais nos yeux» (Première Entrée) est superbe et confirme, entre autres exemples, le chanteur idéal qu’est Thomas Dolié dans ce répertoire.


Reinoud Van Mechelen, dont on ne cesse de suivre les réalisations et les concerts, s’affirme également, mois après mois, année après année, comme un ténor irremplaçable dans le répertoire baroque: c’est de nouveau le cas ici. Titulaire également de trois rôles, Van Mechelen campe un Dom Carlos truculent (le trio «Pour jamais, l’amour nous engage» au sein de la Première Entrée) mais surtout un Valère à la voix souple et colorée, qui nous ravit à chaque intervention à commencer par l’air «Volez Zéphires, volez tendres amants de Flore» (Deuxième Entrée). Complétant l’équipe masculine de cet enregistrement, Jean-Sébastien Bou impose sa classe naturelle et son professionnalisme pour chanter de façon extrêmement convaincante le rôle d’Adario (célébrissime duo «Forêts paisibles» à la fin de la Troisième Entrée): à n’en pas douter, que voilà un trio aujourd’hui difficilement surpassable!


On n’en dira malheureusement pas autant de l’équipe féminine. La plus grande déception vient de Véronique Gens, chanteuse pour laquelle nous professons par ailleurs une très grande admiration, mais qui ne se révèle pas ici sous son meilleur jour dans le petit rôle de Phani. La voix manque parfois de stabilité (le récit «Tu t’abuses, barbare»), notamment dans le registre aigu, et surtout de caractère. De même, incarnant à la fois Hébé et Zima comme lors de sa prestation lors du concert de Sablé, Chantal Santon-Jeffery alterne aigus fragiles («Pour remplacer les cœurs que vous ravit Bellone») et prestation haute en couleur à l’instar de ce magnifique «Régnez plaisirs et jeux» qui conclut presque la Troisième Entrée. Finalement, bien qu’elle nous ait souvent laissé de marbre, c’est Katherine Watson qui s’avère la plus convaincante dans le rôle d’Emilie où, en dépit là aussi de quelques aigus poussés et d’un timbre qu’il conviendrait de davantage maîtriser (le récit «Qu’en peignant vos malheurs, vous redoublez mes maux»), elle incarne parfaitement son personnage tout au long de la Deuxième Entrée.


Pour sa part, le Chœur Purcell n’est pas aussi irréprochable qu’on l’a connu, la prononciation de la langue française n’étant ici pas toujours très précise, faiblesse difficilement rattrapable dans ce répertoire... L’orchestre, en revanche, est très bien conduit par György Vashegyi. Les solistes instrumentaux répondent présent aux moindres solmicitations (la flûte virtuose dans l’air «La nuit couvre les cieux» dans la Deuxième Entrée) et l’orchestre dans son ensemble nous entraîne dans tous ces passages si connus qu’on les fredonne sans même y penser, à commencer par la «Danse du grand calumet» au sein de la Troisième Entrée ou dans la Première et Deuxième Gavottes de la Première. Avouons que l’on pourrait souhaiter davantage de folie dans la direction, qui s’avère à nos yeux assez sage, sans doute trop: pour qui souhaite un résultat multicolore, nous ne pouvons que recommander la prestation exemplaire des Arts Florissants sous la direction de William Christie dans le spectacle filmé (et donc heureusement préservé!) à l’Opéra Garnier en 2003.


Bref, que ce soit en raison de la version choisie ou des réserves qu’on y apporte, la version discographique des Indes galantes en intégralité est encore à attendre...


Le site de Chantal Santon-Jeffery
Le site de Katherine Watson
Le site de Véronique Gens
Le site de Reinoud Van Mechelen
Le site de Jean-Sébastien Bou
Le site de l’Orchestre Orfeo


Sébastien Gauthier

 

 

 

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