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09/15/2017 Edward Elgar : Introduction and Allegro, opus 47 – Symphonie n° 1 en la bémol majeur, opus 55 Quatuor Doric: Alex Redington , Jonathan Stone (violon) Hélène Clément (alto), John Myerscough (violoncelle), BBC Symphony Orchestra, Edward Gardner (direction)
Enregistré à Watford (5 et 6 septembre 2016) – 65’17
Chandos CHSA 5181 – Notice (en anglais, allemand et français) de Conor Farrington
Sélectionné par la rédaction
Chef d’orchestre britannique de plus en plus apprécié sur le plan international, Edward Gardner poursuit sa collaboration fructueuse avec Chandos le plus souvent à la tête de l’Orchestre symphonique de la BBC ou à la tête de l’Orchestre philharmonique de Bergen dont il est actuellement le chef principal. Pour ce premier programme consacré à Edward Elgar (1857-1934), Gardner présente l’Introduction et Allegro (1901-1905), pour quatuor à cordes et orchestre à cordes, et la Première Symphonie (1907-1908). Les deux pièces s’inscrivent dans la fertile décennie de 1899 à 1909, trop marquée dans les esprits, peut-être, par la présence des quatre premières marches Pomp and Circumstance (1901-1907), alors qu’elle vit naître par ailleurs des chefs-d’œuvre tels les Variations sur un thème original «Enigma» (1899), l’oratorio Le Rêve de Géronte (1899-1900), le Concerto pour violon (1901-1909), certaines partitions avec voix, et les premières esquisses de la Deuxième Symphonie (1909-1911).
Sans diminuer la puissance des cordes, la direction de Gardner soigne la présence du quatuor au sein de l’orchestre, préservant à l’Introduction et Allegro la caractéristique principale d’un concerto grosso et permettant un jeu d’écho bienvenu entre les instruments aux trémolos parfois impressionnants. Il maintient constamment l’intensité énergique qui sous-tend la pièce, née dès le motif buriné qui ouvre l’Introduction et irriguant le beau thème mélodique d’inspiration galloise qui s’y enchaîne, celui-ci d’abord présenté par l’alto seul. Délicatesse et puissance mêlées caractérisent la prestation des cordes de l’Orchestre symphonique de la BBC tout au long de l’Allegro, en particulier au cours de la vive fugue, ici d’une clarté éblouissante. Gardner obtient une pareille clarté de texture polyphonique quand, in fine, les quatre thèmes se tissent intimement ensemble, le Quatuor Doric en écho efficace à l’orchestre, avant la coda concédée au seul thème «gallois» qu’il laisse s’épanouir, tout excès de pathos exclu.
En quatre mouvements d’apparence classique mais de contenu conflictuel, la Première Symphonie, de structure cyclique, bénéficie du même souci de clarté et de précision. La phalange britannique, engagée, répond dans le moindre détail à la direction de Gardner, captant les climats souvent agités, voire tourmentés d’une symphonie hautement chromatique, jamais tout à fait paisible avant la conclusion qui reprend dans une veine plus positive le tout premier thème nobilmente e semplice, à l’origine plus posé et plutôt sombre.
Opposés à ce thème qui ouvre le premier mouvement les thèmes secondaires appassionato déferlent avec une grande force dramatique, les rares accalmies non sans désarroi. Respectueux de l’allure véloce et de l’expression d’un possible mal-être qui ouvrent le vif deuxième mouvement, Gardner insiste un peu lourdement sur le rythme de marche franc du second thème mais réussit avec sensibilité et adresse l’enchaînement délicat du troisième mouvement, Adagio, qui reprend à la note près le motif initial de l’Allegro dans un climat tout à fait contraire, quoique plus résigné que paisible. La riche orchestration du quatrième mouvement peut faire appel aux solistes de l’orchestre ou donner momentanément préséance à l’un ou l’autre des groupes instrumentaux au travers de fragments de thème, de thèmes transformés et de rythmes implacables auxquels les musiciens de l’orchestre répondent avec beaucoup de musicalité, en préservant ainsi toute la belle cohérence.
Les versions différentes de ces deux œuvres abondent dans des contextes toujours différents. Avec la collaboration de l’excellent Quatuor Doric, Gardner signe des versions de grande qualité, investies, pertinentes et précises, et on lui sait gré de les avoir réunies dans un même programme, soulignant le génie harmonique, mélodique et polyphonique du compositeur et les contrastes conflictuels présents dans les deux pièces.
Le site du Quatuor Doric
Christine Labroche
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