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09/06/2017 Ernst Krenek : Orpheus und Eurydike, opus 21 Ronald Hamilton (Orpheus), Dunja Vejzovic (Eurydice), Celina Lindsley (Psyche), Cornelia Kallisch (Erste Furie), Gabriele Schreckenbach (Zweite Furie), Jutta Geister (Dritte Furie), Hans Franzen (Ein Betrunkener), Wilfried Gahmlich (Ein Matrose), Bo Skovhus (Der Narr), ORF Chor, Radio-Symphonieorchester Wien, Pinchas Steinberg (direction)
Enregistré en public à la Felsenreitschule, Salzbourg (23 août 1990) – 105’30
Coffret de deux disques Orfeo C 923 162 1 – Notice en anglais et allemand
Sélectionné par la rédaction
Krenek, oui, mais quel Krenek? C’est un peu la question que tout mélomane doit se poser avant d’affronter le copieux corpus du compositeur viennois: s’agit-il de sa période tonale mâtinée d’ajouts jazzy avec l’emblématique Jonny spielt auf de 1926, plus grand succès lyrique de l’entre-deux guerres? Ou plus certainement celle des années 1930 et suivantes autour de la musique sérielle et des expérimentations modernistes? Aucune des deux en réalité, puisqu’Orphée et Eurydice, deuxième opéra d’Ernst Krenek (1900-1991), composé en 1923, mêle les réminiscences capiteuses de l’ancien professeur Franz Schreker avec les premières expériences atonales héritées de Schoenberg. Le parlé-chanté omniprésent bénéficie d’un arrière-plan orchestral foisonnant et frissonnant, d’une imagination constante au service d’un remarquable livret, écrit par Oskar Kokoschka pendant sa captivité en Russie en 1915. Une période d’autant plus douloureuse que le peintre se remettait de son échec amoureux avec Alma Mahler, déjà repartie dans les bras d’un autre homme.
Donné au festival de Salzbourg pour le quatre-vingt-dixième anniversaire du compositeur, cet ouvrage complètement oublié fut accompagné par d’autres Orphée, ceux de Monteverdi, Gluck et Haydn. La captation en direct qui en résulta est aujourd’hui présentée par Orfeo dans un enregistrement d’une qualité sonore superbe qui rend hommage à cet ouvrage de transition. Tous les interprètes, au premier rang une incandescente Dunja Vejzovic (Eurydice), portent l’action avec bonheur, bien aidés par la baguette précise mais parfois un rien timide de Pinchas Steinberg: quel dommage que l’expressionnisme ici à l’œuvre ne soit pas davantage exalté... Quoiqu’il en soit, en tant que seul enregistrement aujourd’hui disponible de cet ouvrage, il s’agit d’un document de toute première importance.
Florent Coudeyrat
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