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04/05/2017
Luigi Cherubini : Clytemnestre [1] – La Mort de Mirabeau: trois chœurs [2] – Circé [3] – Amphion [4]
Maïlys de Villoutreys [1] (soprano), Ursula Eittinger [3] (alto), Andreas Karasiak [4] (ténor), Nicolas Boulanger [2] (Cabanis), François Eckert [2] (Le Marck), Kölner Akademie, Michael Alexander Willens (direction)
Enregistré à la Deutschlandfunk Kammermusiksaal, Cologne (septembre 2012) – 65’50
CPO 777 776-2 – Notice (en allemand et en anglais) de Christine Siegert





Luigi Cherubini : Requiem en ut mineur à la mémoire de Louis XVI
Coro dell’Accademia Nazionale di Santa Cecilia, Bonaventura Somma (chef de chœur), Orchestra Stabile dell’Accademia Nazionale di Santa Cecilia, Carlo Maria Giulini (direction)
Enregistré en 1952 – 50’37
Profil Hänssler PH 16056 – Notice (en allemand et en anglais)





Luigi Cherubini : Requiem en ut mineur à la mémoire de Louis XVI
Charles-Henri Plantade : Messe des morts en ré mineur à la mémoire de Marie-Antoinette

Chœur et orchestre du Concert Spirituel, Hervé Niquet (direction)
Enregistré en public en la Chapelle royale du Château de Versailles (21 et 22 janvier 2016) – 69’14
Alpha 251 Collection Château de Versailles – Notice (en français, anglais et allemand) d’Hervé Niquet et Alexandre Dratwicki


Sélectionné par la rédaction





Luigi Cherubini (1760-1842) a composé deux Requiem, ce qui est assez iconoclaste pour mériter d’être souligné. Le second dans l’ordre chronologique, pour chœur d’hommes et orchestre, avait été composé par Cherubini en vue d’être interprété lors de ses propres funérailles; le premier, commande de Louis XVIII, était destiné à commémorer la mort de Louis XVI, dont on sait qu’il fut guillotiné le 21 janvier 1793. Voici deux gravures de ce dernier Requiem que nous aborderons après un disque fort intéressant puisque rassemblant trois cantates de Cherubini, œuvres qui font figure de vraies raretés dans la discographie du grand compositeur. La cantate Clytemnestre (1794), la plus tardive des trois présentées ici, s’apparente dans l’agencement aux airs de concert que pouvait par exemple composer Mozart (alternance de récitatifs et de parties chantées), tout en renvoyant dans l’orchestration aux airs d’opéras dont les auteurs pouvaient alors s’appeler Méhul ou Dauvergne. Même si l’on doit parfois un peu trop tendre l’oreille pour comprendre les paroles (pourtant françaises), le chant de Maïlys de Villoutreys est excellent, accompagné par un orchestre qui sait varier avec conviction les climats de l’œuvre, qui passe avec naturel du tragique au crépusculaire. La cantate Circé (1789) est moins agréable à écouter en raison du timbre d’Ursula Eittinger dont la prononciation laisse là aussi à désirer (notamment dans l’air conclusif «Inutiles efforts!»): c’est dommage dans la mesure où l’œuvre bénéficie d’une belle orchestration comme en témoigne par exemple la riche introduction. Bien mieux réussie en revanche, la cantate Amphion (1786), composée comme Circé pour la Loge Olympique (n’en déplaise à certaines de nos instances sportives nationales...), s’apparente presque à un mini-opéra avec son ouverture (qui préfigure grandement celle, plus tardive, d’Anacréon), des airs pour soliste assez véhéments (soulignons cette fois-ci la prononciation et la justesse expressive d’Andreas Karasiak notamment dans le très beau «Du monde et du temps») et d’un chœur important à l’image de son intervention conclusive «A ce héros au-dessus». Si l’on ajoute à ces trois œuvres une curieuse Mort de Mirabeau (un premier chœur de lamentation, un deuxième très orchestral dominé par un beau pupitre de clarinettes, et un troisième où le chœur s’élance avec véhémence, son intervention étant entrecoupée par les interventions des deux narrateurs), on tient là un disque musicalement et musicologiquement des plus intéressants pour qui s’intéresse à Luigi Cherubini.


Le Requiem en ut mineur est sans doute l’œuvre chorale la plus célèbre de Cherubini. Le présent document est un enregistrement des plus connus puisqu’il a déjà été édité chez EMI (rappelons d’ailleurs que c’est le premier enregistrement que Carlo Maria Giulini réalisa pour la Columbia de Walter Legge), avant de l’être de nouveau au Club national du disque en 1961 et chez l’éditeur La Voce del Padrone en 1974. C’est par ailleurs une œuvre que le grand chef italien a ensuite réenregistrée avec l’Orchestre symphonique de Chicago en 1967 (Disco Archivo), une des seules incursions néanmoins que Giulini ait effectuées chez Cherubini si l’on y ajoute l’opéra Les Abencérages (un enregistrement public du Mai musical de Florence de 1956 en témoigne). Même si c’est un trait de son caractère que l’on a surtout vu dans ses dernières années (souvenons-nous de son dernier Requiem de Verdi salle Pleyel en 1998 ou de ses Messe D. 950 de Schubert ou Messe en si mineur de Bach!), Giulini a toujours été quelqu’un de croyant. Cela se sent dès l’Introitus - Kyrie, qui bénéficie d’un orchestre recueilli, ample et de bonne qualité – on n’en dira pas autant du chœur: reconnaissons immédiatement que le chœur n’est globalement que moyen, connaissant donc de récurrents problèmes de justesse (dans l’Introitus - Kyrie, à 6’45 dans le Dies Irae, à 6’40 pour le pupitre de basses dans l’Offertorium...), ce qui est dommage car l’appréhension globale de l’œuvre est plutôt convaincante. Même si certains passages sont un peu trop retenus (notamment dans le Dies Irae), le chef italien impose une vision très sereine de ce Requiem, qui culmine dans un Pie Jesu de toute beauté. Sans faire oublier Riccardo Muti (qui ne cesse de diriger l’œuvre après l’avoir magnifiquement enregistrée chez EMI, voir ici), cette gravure aux accents romantiques ne devrait pas décevoir les admirateurs tant de l’œuvre que du chef.


Attendait-on Hervé Niquet chez Cherubini? Pourquoi pas puisque ce baroqueux historique a depuis longtemps tourné son regard vers la musique des XIXe et XXe siècles, et ce avec un réel succès. Et force est de constater que cette version du Requiem en ut mineur est en tous points remarquables. En premier lieu, quels interprètes! Le chœur est tout bonnement idéal: le Dies Irae est à ce titre formidable tant l’auditeur sent la foudre tomber à côté de lui, Niquet dynamisant la partition de façon extrêmement prenante (la fulgurance de l’accélération à partir de 5’20). Ecoutez également le chœur (mixte rappelons-le, contrairement à l’autre Requiem où il est exclusivement masculin, aucun des deux ne faisant en revanche intervenir de soliste!) dans l’Agnus Dei, où le pupitre de basses se fait remarquer de la plus belle manière. L’orchestre est également à son meilleur avec une volonté générale de déborder la partition (les violoncelles dans l’Introitus - Kyrie à partir de 3’40) et de l’habiter pleinement: encore une fois, quel Dies Irae avec ce moutonnement de cordes entrecoupé de cuivres éclatants! En second lieu, la conception de Niquet convainc d’un bout à l’autre: il semble vouloir faire de ce Requiem un manifeste musical, sorte de révolte contre le sort qui a frappé l’ancien souverain, davantage qu’une simple fresque chorale où prédomine la seule beauté (discours qui est tout à fait recevable également lorsqu’il est signé Muti ou Giulini). Avouons que là, notre cœur balance sincèrement, l’enregistrement ayant en outre été effectué en concert dans d’excellentes conditions (légère réverbération, netteté des pupitres). La grande découverte de ce disque réside essentiellement dans la Messe des morts à la mémoire de Marie-Antoinette de Charles-Henri Plantade (1764-1839), œuvre incroyable et totalement méconnue. Faisant souvent penser à un Mozart revisité (le Kyrie semble issu de la Grand-messe en ut mineur mâtinée de musique du XIXe siècle), victime parfois de quelques «maladresses» orchestrales (ces sonneries de cuivres assez grandiloquentes au début du Dies Irae où le chœur masculin chante ensuite sur la mélodie grégorienne reprise quelques années plus tard par Berlioz dans le « Songe d’une nuit du sabbat» de sa Symphonie fantastique), cette messe n’en demeure pas moins fort intéressante. Les interprètes sont encore une fois irréprochables, à commencer par le chœur qui frappe dans le Sanctus par son indignation, véritablement criante. Un disque exemplaire par sa recherche (mentionnons la notice d’accompagnement, exhaustive) et par son interprétation: une bien belle surprise.


Le site de Maïlys de Villoutreys
Le site d’Ursula Eittinger
Le site d’Andreas Karasiak
Le site de la Kölner Akademie
Le site de l’Orchestre et du Chœur de l’Académi nationale Sainte Cécile
Le site du Concert Spirituel


Sébastien Gauthier

 

 

 

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