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02/13/2017 Elizabeth Will Tuckett (mise en scène, chorégraphie), Alastair Middleton (mise en scène, livret), Martin Yates (musique), Zenaida Yanowsky, Carlos Acosta (danseurs), Laura Caldow, Sonia Cullingford, Julia Righton (actrices), David Kempster (baryton), Raphael Wallfisch (violoncelle), Fay Fullerton (costumes), Paule Constable (lumières), Ross MacGibbon (réalisation)
Enregistré en public à l’Opéra royal, Londres (8 janvier 2016) – 93’
DVD Opus Arte OA 1214D – All Regions – Format: 16:9 – Son: LPCM 2.0/DTS Digital Surround
Sélectionné par la rédaction
Le travail toujours très remarquable du chorégraphe britannique Will Tuckett, un ancien danseur du Royal Ballet, n’est pas connu en France. Récemment il a essuyé une déconvenue de taille. Il avait, avec son librettiste Alastair Middleton, imaginé une version «immersive» du ballet Casse-Noisette dans laquelle le public prendrait part à la fête de Noël du premier acte et pourrait se promener sur scène durant le voyage au pays des sucreries du second. Ce spectacle prometteur qui devait être l’événement des fêtes de la fin de l’année 2016 a été une des premières victimes culturelles du Brexit et, lâché par ses sponsors, n’est pas allé plus loin qu’une représentation.
Ce n’est heureusement pas le cas de son Elizabeth, chorégraphie conçue également avec Middleton et, pour la musique, avec Martin Yates. Mais sa création en 2013 a été confidentielle avec une seule représentation de gala à l’Old Royal Naval College de Greenwich et la reprise par le Royal Ballet de janvier 2016 – pas même dans la salle du Royal Opera House mais dans son Linbury Studio juste avant sa fermeture – n’a duré qu’une semaine. Mais avec l’éclat dû au fait qu’elle marquait les adieux au Royal Ballet de l’étoile cubaine Carlos Acosta. C’est dire si la parution de sa captation le 8 janvier 2016 est précieuse. Une critique cependant au sujet de la notice, très chiche. Les textes, qui sont pour la plupart des lettres de la Souveraine, ne sont pas même reproduits. Pire, il n’y a aucun sous-titrage disponible. On est habitué à l’arrogance des Britanniques concernant l’universalité de leur langue, mais pas même l’aide aux «handicapés auditifs» pour un produit portant l’estampille du Royal Opera House, ce n’est pas digne de l’éditeur Opus Arte.
Cette chorégraphie d’environ 90 minutes sans interruption parcourt en un raccourci très réussi la vie affective de la «Reine vierge», Acosta endossant avec beaucoup de versatilité les rôles des quatre hommes ayant compté dans la vie d’Elisabeth I, Leicester, Devereux, Anjou et Raleigh, et trois excellentes comédiennes et danseuses, Laura Caldow, Sonia Cullingford et Julia Righton, jouant et dansant ceux des femmes de la suite de la Reine, déclamant le collage de textes issus de nombreuses sources très bien assemblés par Middleton. Un baryton acteur fait avancer l’action soit déclamant, soit chantant une musique qui se veut un pastiche très réussi de musique élisabéthaine avec des emprunts à Tallis, Morley, Gibbons, Dowland... On dira charitablement que David Kempster est meilleur acteur que chanteur. En revanche, le violoncelliste Raphael Wallfisch, à qui est confié le rôle dramatique de la partition, est excellent.
La chorégraphie est profondément originale, ne cherchant pas la reconstitution historique (les somptueux costumes de Fay Fullerton y suffisent), narrative mais aussi très poétique et c’est une performance pour Zenaida Yanowsky de tenir en scène d’un bout à l’autre, de faire évoluer en si peu de temps son personnage, et de varier une danse que l’on aurait pu craindre plus répétitive que ce qu’a imaginé Tuckett. Carlos Acosta ne fait qu’une bouchée des difficultés techniques dont le chorégraphe a truffé sa partie mais sa performance réside beaucoup plus dans sa versatilité, réussissant à incarner avec relativement peu de pantomime quatre personnalités très différentes.
Olivier Brunel
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