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01/03/2017
Anton Bruckner : Symphonie n° 2 en ut mineur (édition 1872-1877, R. Haas)
Johann Sebastian Bach : Komm, süsser Tod, komm, selge Ruth, BWV 478 (orchestration Leopold Stokowski)

Orchestre Métropolitain, Yannick Nézet-Séguin (direction)
Enregistré en public à la Maison symphonique de Montréal (20 septembre 2015) – 66’40
ATMA Classique ACD2 2708





Anton Bruckner : Symphonie n° 3 en ré mineur (édition 1873)
Staatskapelle Dresden, Yannick Nézet-Séguin (direction)
Enregistré en public au Semperoper de Dresde (21 septembre 2008) – 72’01
Profil Hänssler «Edition Staatskapelle Dresden» vol. 39 PH 12011





Etoile montante parmi les grands chefs du moment, Yannick Nézet-Séguin poursuit son intégrale consacrée à Anton Bruckner (1824-1896) dont il a déjà gravé de généralement fort convaincantes versions des Troisième, Quatrième, Sixième, Septième, Huitième et Neuvième Symphonies, et qu’il ne cesse de diriger en concert comme en témoigne une Quatrième donnée avec l’Orchestre de Philadelphie à New York voilà tout juste un an.

Commençons donc avec la Deuxième (1877), qui a en fait déjà été critiquée dans nos colonnes puisqu’étant le reflet d’un concert donné à Montréal en septembre 2015 (voir ici pour le compte rendu en anglais et ici pour le compte rendu en français). Et avouons d’emblée ne pas être d’accord avec nos confrères, peut-être trop difficiles le temps d’un concert, puisque cette version discographique, certes sans se hisser au niveau de Carlo Maria Giulini (notre version de référence, chez Testament, sachant qu’il s’agit là de la première édition critique établie par L. Nowak et non de la seconde de R. Haas) ou d’Eugen Jochum (de préférence avec Dresde chez EMI, dans la même édition que celle utilisée par Giulini), s’avère extrêmement belle et non pas seulement «lisse» comme on a pu la décrire. Certes là aussi, on n’ira pas chercher chez le jeune chef québécois le climat nébuleux que l’on peut souhaiter dans le premier mouvement (Moderato), mais comment ne pas être séduit par cette clarté qui, alliée à un tempo allant (19’08 contre 19’54 chez Giulini), dévoile des couleurs inattendues jusque-là? Dommage que les dernières mesures soient prises de façon quelque peu pesante... Le deuxième mouvement (Andante - Feierlich, etwas bewegt) est sans doute le plus réussi: servi par un orchestre d’une qualité rare (quelles cordes! et ce hautbois, presque viennois dans ses sonorités!), il déroule une partition avec un naturel et une sérénité totales que vient à peine ébrécher un troisième mouvement qui aurait pu être plus violent (comme savent l’être les scherzi chez Bruckner) mais qui sait tout de même cultiver son déroulement implacable. Nézet-Séguin conclut cette symphonie de la plus belle manière grâce à un Finale - Mehr schnell qui, tout en veillant à n’omettre aucun détail de la partition (les accents du début, la délicatesse des bois puis des cordes à partir de 5’20), en impose par sa grandeur; là encore, la «course à l’abîme» que l’on ressent chez Giulini fait défaut ici mais la structure de la symphonie n’en est pas moins parfaitement conduite. Une très belle version donc qui prouve une fois encore les affinités que ce chef entretient avec Bruckner. En complément, l’orchestration d’un choral de Bach réalisée par Leopold Stokowski (1882-1977), qui avait prit les rênes de l’Orchestre de Philadelphie tout juste cent ans avant Yannick Nézet-Séguin: hommage d’un digne successeur à l’un de ses lointains prédécesseurs.


Affinités que l’on retrouve dans la Troisième Symphonie (1873) gravée cette fois-ci non à Montréal (Yannick Nézet-Séguin l’a déjà fait comme on l’a signalé précédemment, cette version ne s’insérant donc pas dans l’intégrale en cours de publication chez ATMA Classique) mais avec la Staatskapelle de Dresde, orchestre brucknérien par excellence pourrait-on dire. L’intérêt de ce disque réside tout autant dans la gravure qui nous est offerte que dans son aspect musicologique, puisqu’il s’agit là du premier enregistrement de la version originelle de 1873 par ce même orchestre de Dresde alors que c’est lui qui l’a donnée pour la toute première fois de l’histoire, en 1946. Comme on le sait, la Staatskapelle de Dresde est un des meilleurs orchestres du monde, qui plus est dans le répertoire germanique: elle le prouve une fois encore. Dès le vaste premier mouvement (plus de 26 minutes!), dans les superbes arpèges initiaux, les cordes font montre d’un engagement dans les attaques et d’une cohésion incroyables que ne relaient pas toujours à bon escient les cuivres, certes pleins d’héroïsme mais souffrant parfois d’un certain manque de tension (cette façon d’«écraser le son» à 18’40). Le deuxième mouvement est à l’image d’une grande arche: avec des voûtes aussi vastes que celles illustrées par les cordes, des fondations aussi solides qu’on peut les entendre au travers des basses et des transepts aussi souverains que l’illustrent ici les cuivres (quels tutti à 16’20!), le résultat est tout bonnement fascinant. Bien que le Trio soit pris de façon bucolique, le Scherzo. Ziemlich schnell n’en demeure pas moins puissant et volontaire, relayé tambour battant par un Finale. Allegro de toute beauté où les volutes confiées aux violons succèdent avec nonchalance aux tutti de cuivres: une version impressionnante saluée par les vifs applaudissements d’un public néanmoins un peu décontenancé par cette version «originale», dont Paul-Gilbert Langevin nous rappelle quand même les maladresses qu’elle contient et, partant, «l’utilité de la refonte effectuée de sa propre initiative par Bruckner en 1876-1877» (Bruckner, éditions L’Age d’homme, page 131).


Le site de Yannick Nézet-Séguin
Le site de l’Orchestre Métropolitain
Le site de la Staatskapelle de Dresde


Sébastien Gauthier

 

 

 

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