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12/26/2016
Toshio Hosokawa : Voyage VIII [1] – Lied [2] – Arc Song [3] – Stunden-Blumen. Hommage à Olivier Messiaen [4] – Voyage X - Nozarashi [5]
Helen Bledsoe (flûte), Tadashi Tajima (shakuhachi), Peter Veale (hautbois), Melvyn Poore (tuba), Mirjam Schröder (harpe), Ulrich Löffler (piano), Ensemble Musikfabrik, Peter Rundel [1], Ilan Volkov (direction) [5]
Enregistré en public ou en studio à Cologne (27 mai 2006 [1], 13 juin 2009 [5], 24 août 2011 [4], 9 [3] et 25 septembre [2] 2013) – 56’51
Wergo, Edition musikFabrik WER 6860-2 (distribué par Distrart) – Notice (en allemand et en anglais) de Patrick Hahn


 Sélectionné par la rédaction





Fondé en 1990, l’Ensemble Musikfabrik se consacre entièrement à la musique de notre temps et à celle de ses précurseurs directs, son répertoire touchant aux pièces les plus expérimentales. Basé maintenant à Cologne et travaillant souvent en étroite collaboration avec la WDR, l’ensemble est devenu très actif au concert et le présent enregistrement est le fruit direct ou indirect de prestations données entre 2006 et 2013. Que ce soit pour une création ou pour une reprise, la liste des compositeurs célèbres avec lesquels il a travaillé peut impressionner. Toshio Hosokawa (né en 1955) en fait partie. Musikfabrik a participé à la création de plusieurs de ses œuvres comme en témoignent ici celle de Voyage VIII, captée en public, et Voyage X enregistré en studio la veille de la création. Les membres de Musikfabrik, les solistes et les musiciens associés interprètent ce riche programme monographique avec beaucoup d’intelligence et de musicalité, le sens essentiel de la mise en place développé à souhait, grâce en partie à la direction de Peter Rundel et d’Ilan Volkov, tous deux attentifs au relief orchestral.


Hosokawa se concentre non sur la note mais sur le son né du silence, qui se développe verticalement ou à l’oblique au travers des strates, créant un ambitus en constante expansion pour ensuite s’étioler dans un silence habité ou pour se fondre dans un nouveau son qui enfle. Quatre des cinq pièces présentent un soliste aux prises avec un monde sonore qui lui est accueillant ou hostile et auquel il s’unit ou s’oppose comme un promeneur solitaire dans un jardin mirifique ou comme un Wanderer errant sur une lande rocheuse et crépusculaire. C’est le schéma que partagent toutes les pièces (dix aujourd’hui) de la série Voyage, la différence venant d’une recherche de timbres et d’un traitement harmonique de l’ensemble instrumental affinés en fonction du choix de l’instrument soliste. Le tuba tout empreint de mystère de Voyage VIII (2006) glisse du silence au souffle puis d’un grave de la nuit des temps à un aigu relatif, se mêlant à une résonance écrite ou se posant sur le tapis contrasté de timbres plus métalliques créés par des associations instrumentales insolites et tout à fait extraordinaires. Plus «solitaire» que le tuba, le merveilleux shakuhachi poétique de Voyage X (2009) se fond rarement à son «environnement», c’est-à-dire à l’ensemble auquel les longs sons étirés de la flûte japonaise provoquent de vives réactions espacées de silences dynamiques – des turbulences soudaines, saccadées à la verticale, heurtées, et fouettées de coups secs.


Dans une même approche du son profondément japonaise, les deux duos animent la rencontre de l’être avec la nature, l’individu avec son environnement, l’instrument monodique avec l’instrument polyphonique. A la manière du lied et de la mélodie, la harpe devient l’ombre ou le guide de la voix du hautbois d’Arc Song (1999) comme le piano soutient la flûte de Lied (2002). Ici comme ailleurs, le traitement instrumental relève de l’esprit japonais par le choix d’intervalles et par la nature souvent impure des sons, obtenue, pourtant, à l’occasion, grâce aux techniques dites d’avant-garde. Hosokawa suggère par l’oblique que les lignes mélodiques de l’instrument monodique s’imposent à lui en second lieu (et non en premier) à partir de la vitalité expressive d’un «accompagnement» harmonique déjà conçu sinon composé. Les deux partitions font appel aux techniques avancées et à une virtuosité jamais gratuite, la harpe, malgré des effets percussifs, toujours plus douce que le hautbois alors que le piano, qui sonne de manière inattendue, ses résonances d’une importance capitale, reste le plus souvent d’une clarté plus acérée que celle de la flûte.


En hommage à Olivier Messiaen, l’effectif de Stunden-Blumen (2008) est identique à celui du Quatuor pour la fin du Temps (clarinette, violon, violoncelle et piano). Bien que les instruments gardent une sonorité plus «européenne», les traits s’étirent et les tremolandos fusent dans un univers qui porte la nette empreinte du compositeur, la variété d’archets et les techniques de jeu rapprochant les quatre instruments par le style sinon par le son. Le titre vient des «fleurs des heures» du conte de Michael Ende qui donnent au temps toute sa valeur. La structure et le développement s’inspirent de l’éclosion et de la vie éphémère des fleurs, le désir du compositeur étant de «tente[r] d’exprimer la beauté du son nouveau-né et de sa courte vie. La musique doit pouvoir rendre ce passage éphémère des sons [...]» (Hosokawa).


Toshio Hosokawa inscrit son art, son inspiration et sa pensée dans une longue tradition bouddhiste mais si une philosophie et une esthétique poétique et sonore toute japonaise enrichissent les compositions, celles-ci s’établissent sur une maîtrise sans faille des techniques occidentales. Pour les cinq œuvres, le haut niveau de la prestation de Musikfabrik et des solistes virtuoses sera sans doute une version de référence.


Le site de l’Ensemble Musikfabrik


Christine Labroche

 

 

 

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