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12/18/2016
Roman Haubenstock-Ramati : Trio à cordes n° 1 («Ricercari») – Konstellationen (version pour ensemble) – Multiple 4 (version pour hautbois et cor) – Pluriel – Morendo - double/echo
Vera Fischer (flûtes), Klangforum Wien
Enregistré à l’Académie des Arts plastiques de Vienne (30 octobre 2010) – 65’54
Kairos 0015003KAI (distribué par Distrart) – Notice en allemand et anglais





Dans sa somme monumentale Cinquante ans de modernité musicale (Mardaga), feu Célestin Deliège, pourtant peu chatouilleux au contact des pointes les plus acérées de l’avant-garde, n’est pas très amène avec Roman Haubenstock-Ramati (1919-1994), dont la nomination en 1958 au poste de lecteur aux éditions Universal à Vienne «lui vaudra d’être très courtisé»; le musicologue belge précise ensuite que «l’écriture le concerna moins que la notation», avant de déplorer que «le classicisme musical moderne a énormément souffert» de son influence.


De l’autre côté du trébuchet, Josef Häusler, rédacteur de la notice du coffret de douze disques Col legno consacré au 75e anniversaire du festival musical de Donauschingen – où le compositeur d’origine polonaise est représenté par la pièce Credentials or Think, Think Lucky (1961) défendue par Hans Rosbaud et Cathy Barberian (une caricature d’elle-même) –, avance que «la discrimination dont Haubenstock-Ramati fait aujourd’hui l’objet paraît particulièrement imméritée». Il est vrai qu’on ne le joue guère plus à l’exception notable du Klangforum de Vienne, qui le mit d’emblée au cœur de son répertoire; il faut dire que le créateur de l’ensemble, le compositeur et chef Beat Furrer, en fut l’élève. Tendons l’oreille...


Las, il faut bien donner raison à Célestin Deliège: rien ne sonne plus daté que cette poignée d’œuvres de chambre et pour ensemble dont la description précise reviendrait à déplier le mode d’emploi (la notice nous en donne quelques aperçus) qui préside à leur exécution. On peut penser ce que l’on veut des dernières œuvres de John Cage, mais reconnaissons que le compositeur américain, parvenu au terme de sa démarche, s’effaçait complètement derrière sa musique avec une ascèse toute monacale. Côté européen, l’aléatoire contrôlé cher à Lutoslawski comme la série des Archipels (1967-1975) de Boucourechliev – pour ne citer que ces exemples –, sans aliéner la mainmise de créateur sur sa création, encourageaient et l’initiative et la responsabilité des interprètes.


Ces pièces de Haubenstock-Ramati évoquent plutôt celles de la période dite «intuitive» du Stockhausen des années 1970 (sur lesquelles il viendra vite à résipiscence eu égard aux résultats peu probants) dont Pierre Boulez avait remarquablement pointé les inconséquences: loin d’ouvrir l’empan de l’imaginaire des musiciens, ces graphiques ésotériques qui tenaient lieu de partition renforçaient au contraire leurs automatismes; et ces pièces de sonner comme du Stockhausen d’avant, c’est-à-dire sériel, mais en plus débraillé. C’est exactement l’impression que procure, à l’écoute, ce programme de Haubenstock-Ramati: une partition sérielle des années 1950... dans laquelle les musiciens se seraient perdus. Heureusement que la «musique contemporaine» a bien mieux à nous offrir!


Jérémie Bigorie

 

 

 

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