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06/25/2016 Wolfgang Rihm : Ernster Gesang
Richard Strauss : Vier letzte Lieder – Malven (orchestrationn Rihm) – Eine Alpensinfonie, opus 64 Anja Harteros (soprano), Staatskapelle Dresden, Christian Thielemann (direction), Michael Beyer (réalisation)
Enregistré en public au Semperoper, Dresde (8-9 juin 2014) – 103’
C Major/Unitel Classica Blu-ray 726504 (ou DVD 726408) – Son PCM Stereo – Format NTSC 16:9 - Region Code 0 – Notice (en anglais, allemand et français) de Susanne Stähr
Sélectionné par la rédaction
«Richard Strauss Gala» [1]
Richard Strauss : Der Rosenkavalier, opus 59: Suites de valses n° 1 et n° 2 – Elektra, opus 58: «Allein! Weh, ganz allein» (*) – Feuersnot, opus 50: Scène d’amour (Interlude orchestral) – Salome, opus 54: «Ah! Du wolltest mich nicht deinen Mund küssen lasse, Jochanaan» (*) – Arabella, opus 79: «Mein Elemer!» (**) – Intermezzo, opus 72: «Träumerei am Kamin» (Interlude symphonique n° 2) – Die ägyptische Helena, opus 75: «Zweite Brautnacht!» (***) – Die schweigsame Frau, opus 80: Ouverture «Potpourri» – Daphne, opus 82: «Ich komme, grünende Brüder» (***)
«Christian Thielemann: My Richard Strauss» [2]
Christine Goerke (*), Anja Harteros (**), Camilla Nylund (***) (sopranos), Staatskapelle Dresden, Christian Thielemann (direction), Michael Beyer [1], Andreas Morell [2] (réalisation)
Enregistré en public au Semperoper, Dresde (11 juin 2014 [1]) – 101’ [1] + 45’ [2]
C Major/Unitel Classica Blu-ray 729004 (ou DVD 728908) – Son PCM Stereo – Format NTSC 16:9 – Region Code 0 – Notice (en anglais, allemand et français) d’Elisabeth Richter
Grand adepte du répertoire germanique, Christian Thielemann est aujourd’hui l’un des meilleurs chefs qui soient pour diriger la musique de Richard Strauss (1864-1949), sa direction ayant au fil du temps gagné en sérénité et en cohérence ce qu’elle a perdu en gesticulations parfois inutiles. Ces deux enregistrements, reflet de deux concerts donnés dans le cadre de la célébration du cent cinquantième anniversaire de la naissance de Strauss, démontrent on ne peut mieux les affinités entre Thielemann et cette musique, servie par une Staatskapelle de Dresde au sommet de sa forme.
Le premier concert consacre deux œuvres phares mais débute par une œuvre de Wolfgang Rihm (né en 1952), qui fut «Compositeur résident» de la Staatskapelle de Dresde. Lointain écho aux Chants sérieux de Brahms – c’est à l’occasion du centenaire de sa mort que ce Chant sérieux (1997) avait été commandé par l’Orchestre de Philadelphie –, la partition met en avant quatre clarinettes, installées sur scène en lieu et place des violons, les autres cordes étant réduites aux altos et violoncelles. Les sonorités lugubres de l’orchestre sonnent très bien, les interventions millimétrées du violoncelle solo ou du cor anglais conférant à l’ensemble un caractère mélancolique fort bien rendu. La deuxième œuvre au programme faisait le pont entre deux générations de compositeurs puisque l’orchestre jouait une œuvre de Strauss, le lied Malven (novembre 1948), orchestré par Rihm pour s’insérer en deuxième position au sein des Quatre derniers lieder. Il ne retient que peu l’attention au contraire des quatre autres, évidemment plus connus et merveilleusement interprétés par Anja Harteros, dont la prononciation et la musicalité sont parfaites: quelle finesse dans «Beim Schlafengehen»! Toujours très attentif aux chanteurs avec lesquels il travaille, Thielemann dirige son orchestre avec beaucoup de discrétion, laissant les mélodies évoluer de façon extrêmement naturelle. C’est ce qui frappe également dans une somptueuse Symphonie alpestre, décidément bien représentée en vidéo (citons entre autres Karajan et Sinopoli, ce dernier avec Dresde également, sans compter deux versions viennoises visibles sur YouTube, respectivement dirigées par Bernard Haitink à Londres et Christian Thielemann au festival de Salzbourg). La présente version gagne encore plus de liberté par rapport à la version salzbourgeoise tant on sent Thielemann dans son élément avec une phalange peut-être encore plus somptueuse que les Wiener Philharmoniker. Quel orchestre dans le justement nommé «Au sommet»! L’«Epilogue» est bouleversant, bénéficiant d’ensembles et de solistes tous plus impliqués les uns que les autres. Si l’on souligne également le dynamisme de la réalisation (avant de le voir, avait-on vraiment entendu ce contrechant du cor solo à 55’30?) qui n’hésite pas à oser quelques gros plans aux effets garantis (l’enfilade de contrebasses, toujours impressionnante), on tient là une version de tout premier plan.
Deux jours plus tard, toujours dans le cadre du cent cinquantième anniversaire de la naissance de Strauss, le chef allemand dirigeait une sorte de pot-pourri dédié à neuf opéras de Strauss, tous créés à Dresde. L’ambiance se veut résolument festive et tant Thielemann que l’orchestre l’entendent bien ainsi avec, pour commencer, la première Suite de valses issue du Chevalier à la rose: dès la première attaque, nous voilà plongés dans cette Vienne impériale presque intemporelle, les cordes dresdoises magnifiant une musique que Thielemann dirige avec un évident plaisir. Il en ira de même pour les autres passages purement orchestraux dont un superbe Interlude tiré d’Intermezzo. Côté chant, voilà sans aucun doute trois sopranos au fait du répertoire straussien. Commençons par Christine Goerke qui laisse peut-être la plus forte impression, à commencer par l’air «Allein! Weh, ganz allein» tiré d’Elektra: idéalement accompagnée par Thielemann, qui veille constamment à l’équilibre avec l’orchestre, elle frappe par l’intensité et l’incarnation de son engagement. Egalement très à son aise dans le rôle de Salomé, Christine Goerke s’impose sans peine dans le répertoire straussien. Requise pour un seul air (Arabella), Anja Harteros fait de nouveau montre de sa grande finesse interprétative, accompagnée par un orchestre toujours excellent où domine la figure de l’alto solo. Dernière chanteuse du trio, Camilla Nylund conclut avec beauté (et deux robes, une différente pour chaque air) un concert là encore de très belle tenue!
En complément de ce concert, on peut visionner un documentaire un peu improprement intitulé Christian Thielemann: My Richard Strauss puisqu’il s’agit davantage d’une biographie (brossée à grands traits) du compositeur que de la vision de l’œuvre de Strauss par le chef allemand. Pour autant, on apprendra qu’étant lui-même berlinois, il a cultivé le goût de cette musique en allant fréquemment écouter Karajan diriger les grands poèmes symphoniques à la Philharmonie de Berlin, Thielemann étant toujours séduit par le contraste qui existe entre la musique savante et bouleversée de l’auteur d’Elektra et la figure de l’homme tranquille et sympathique que pouvait être Strauss. Ce documentaire, alternant de rares propos du biographe de Strauss Bryan Gilliam, des extraits de répétitions dirigés par Thielemann, quelques propos personnels de sa part (excellente remarque que de dire que «Une vie de héros, c’est le film aux 10 oscars» tant les effets et la luxuriance y sont de mise!) et quelques images d’archives (notamment Strauss qui dirige Till Eulenspiegel aux Strauss Festwochen qui se tinrent à Munich en 1949), se regarde plaisamment mais n’apporte guère d’éclairage nouveau sur le grand compositeur.
Le site de Christine Goerke
Le site de Camilla Nylund
Le site de l’Orchestre de la Staatskapelle de Dresde
Sébastien Gauthier
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