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07/15/2015
Johann Sebastian Bach : Sonates pour viole de gambe et clavecin n° 1 en sol majeur, BWV 1027, et n° 3 en sol mineur, BWV 1029 – Suite pour violoncelle seul n° 5 en ut mineur, BWV 1011 – Fantaisie chromatique et Fugue en ré mineur, BWV 903
János Starker (violoncelle), Zuzana Růzicková (clavecin)
Enregistré en public au château de Schwetzingen (22 mai 1971) – 67’34
Hänssler Classic, collection «Historic» CD 93-726 – Notice (en allemand et en anglais) de Christoph Schlüren
 Sélectionné par la rédaction
A la suite des concertos de Hindemith, Prokofiev et Rautavaara enregistrés en 1971 et 1975, Hänssler Classic remet à l’honneur le talent exceptionnel de János Starker (1924-2013), cette fois en compagnie de la toute aussi talentueuse Zuzana Růzicková (née en 1927), reconnue en particulier pour ses interprétations de l’intégrale des œuvres pour clavecin de J.-S. Bach et pour celles d’aventureuses compositions du XXe siècle. Capté en public au festival SWR de Schwetzingen le 22 mai 1971 et remastérisé à partir de la bande originale conservée dans les archives de la SWR, le récital présente quatre pièces magistrales de Bach. Pour viole de gambe et clavecin, ici dans une transcription pour violoncelle et clavecin, les Première et Troisième Sonates encadrent la Cinquième Suite pour violoncelle seul et, pour clavecin, la Fantaisie chromatique et fugue en ré mineur.
Ceux qui aiment ces œuvres apprécieront la richesse de ce programme de concert et l’excellence de la prestation. Sans rubato, sans accentuation appuyée, les deux musiciens transmettent toute la noblesse et la beauté spirituelle des partitions. Une prise de son sans égalisation des deux Sonates fait que le clavecin (Neupert) paraît tout à fait naturellement en léger retrait par rapport au violoncelle cordé normalement, mais l’équilibre du concert est ainsi retrouvé sans porter atteinte au profond ressenti et à la perfection rigoureuse de l’interprétation. Starker, qui a enregistré l’intégrale des Suites non moins de cinq fois, est ici égal à lui-même, sa maîtrise totale et son beau phrasé imperturbable en surface mais d’une ardente intensité intérieure. Růzicková, toujours d’une prodigieuse agilité digitale, donne une interprétation au sommet de l’art de la Fantaisie chromatique et Fugue, la Fantaisie brillante, souveraine, ample et alerte – touchante lors du récitatif central – et la Fugue d’une majesté sémillante.
Leur maîtrise et leur puissance expressive remettent en mémoire le fait que c’est en partie grâce à leur immense talent et à leur force de caractère que les deux instrumentistes, persécutés en tant que juifs et internés, ont survécu à la guerre au contraire d’autres membres de leur famille. Zuzana Růzicková est une réscapée des camps de Theresienstadt (Terezín), Auschwitz et Bergen-Belsen. Né à Budapest mais de père polonais, Starker, n’ayant pas pu obtenir la nationalité hongroise, s’est exilé aux Etats-Unis après la guerre alors que la claveciniste tchèque est restée à Prague. Parallèlement à une carrière de concertiste internationale, aux deux il a paru de première importance de se consacrer à la formation de jeunes musiciens. Ajoutés à une approche interprétative partagée, ces points communs ont certainement favorisé leur profonde entente musicale.
La récente parution de ce passionnant concert est digne du plus grand intérêt dans son ensemble. Au-delà de son excellence, l’interprétation de l’œuvre pour clavecin seul la rend exceptionnelle.
Christine Labroche
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