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03/20/2015 Frédéric Chopin : Concerto pour piano et orchestre n° 2, opus 21 – Trois Mazurkas, opus 50 – Impromptu n° 3, opus 51 – Ballade n° 4, opus 52 – Polonaise n° 6, opus 53 «Héroïque» – Berceuse, opus 57 Nelson Freire (piano), Gürzenich-Orchester Köln, Lionel Bringuier (direction)
Enregistré à la Philharmonie, Cologne (3-5 mars 2013 [Concerto] et à la Friedrich-Ebert-Halle, Hamburg/Harburg (19-20 décembre 2013) – 65’44
Decca 478 5332 (distribué par Universal) – Notice de présentation en français, anglais et allemand
Après deux parutions remarquées, Decca continue de rendre à Nelson Freire (né en 1944) les hommages qu’il mérite, avec ce nouvel album Chopin – un répertoire dans lequel l’artiste brésilien excelle (à l’image de ses récents Nocturnes).
Le cœur de ce disque réside dans un Second Concerto hédoniste jusqu’au bout des ongles, dans lequel Lionel Bringuier livre un accompagnement d’une finesse sobre avec l’Orchestre de Cologne (lequel démontre une belle homogénéité dans cette partition où il ne peut donner la pleine mesure de son talent). Certainement pas un disque pour une première approche de l’œuvre. Mais une version d’approfondissement pour connaisseur ou amateur. En vieux matou malicieux et expérimenté, le natif de Boa Esperança caresse les touches avec délice – de ses pattes de velours qui délivrent des trésors de legato dans le ravissement des trilles ou la suavité tiède des phrasés. Freire renouvelle son approche de l’œuvre, découvrant des fulgurances nouvelles dans l’Allegro vivace (presque violenté) et des arrêts sur images inédits – autant de chatouillements pour l’oreille ou pour d’autres sens... Un piano d’esthète – élitaire mais pas hautain.
Les compléments sont substantiels et procèdent également du principe d’approfondissement de partitions que Freire fréquente depuis des décennies. Le Troisième Impromptu est abordé de manière contemplative et timide, presque effacé – plus énigmatique que fascinant. D’une émotivité à fleur de peau, la Quatrième Ballade se déploie avec patience et grâce, distillant sagement et subtilement les émotions et les surprises. La Berceuse semble avoir été écrite pour la sensibilité et le jeu de Freire: une fois de plus, on rend les armes devant le toucher magique du pianiste brésilien, qui berce autant qu’il étreint. La vigueur des trois Mazurkas en paraîtrait presque déplacée après tant d’extatisme. Et si l’on peut rechercher davantage de tranchant dans la Polonaise «Héroïque», on chérit chaque note de ce pianiste à nul autre pareil.
Gilles d’Heyres
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