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01/06/2015
Anton Bruckner : Symphonie d’étude n° 00 en fa mineur
Philharmoniker Hamburg, Simone Young (direction)
Enregistré en public à la Laeiszhalle, Hambourg (22 et 26 février 2013) – 41’59
SACD Oehms Classics OC 686 – Notice (en allemand et en anglais) de Michael Lewin





Anton Bruckner : Symphonie n° 3 en ré mineur (version Nowak de 1873)
Orchestre Métropolitain, Yannick Nézet-Séguin (direction)
Enregistré à la Maison symphonique de Montréal (juin 2014) – 65’45
Atma Classique ACD2 2700 – Notice (en français et en anglais) de Robert Rival





Anton Bruckner : Symphonie n° 6 en la majeur (version Nowak)
Radio Filharmonisch Orkest, Jaap van Zweden
Enregistré au Studio MCO 5 de Hilversum (11-14 juin 2012) – 57’14
Challenge Classics CC 72552 (distribué par Socadisc) – Notice (en anglais et en néerlandais) d’Aart van der Wal


 Sélectionné par la rédaction





Anton Bruckner : Symphonie n° 7 en mi majeur (version Nowak)
Budapesti Fesztiválzenekar, Iván Fischer (direction)
Enregistré en mars 2012 au Palais des Arts de Budapest – 56’45
Channel Classics CCS SA 33714 (distribué par Socadisc) – Notice (en anglais, allemand et français) de Clemens Romijn





Ces quatre disques nous permettent de confronter diverses générations de chefs pour un même compositeur, Anton Bruckner (1824-1896), nous faisant ainsi bénéficier de toute l’évolution stylistique du grand compositeur autrichien, de sa symphonie d’étude à sa glorieuse et célèbre Septième Symphonie.


Poursuivant une très belle intégrale à la tête de l’Orchestre philharmonique de Hambourg (on avait déjà eu l’occasion de saluer une très estimable Première Symphonie), Simone Young (née en 1961) aborde ici les débuts symphoniques de Bruckner. En effet, si l’on exclut les Trois Pièces pour orchestre (1862) et l’Ouverture en sol mineur (1862-1863), la présente symphonie en fa mineur (parfois surnommée la 00) est bel et bien la première symphonie complète, avec ses quatre mouvements, composée par Bruckner, celle (en mineur) connue sous le sobriquet de «Die Nullte» datant pour sa part de l’année 1869. Grâce à un orchestre de haute volée (la légèreté et la finesse des cordes), Simone Young fait parfaitement ressortir les parentés que pouvait tisser et analyser Paul-Gilbert Langevin entre cette symphonie et l’œuvre de compositeurs comme Schumann et Dvorák (Bruckner, L’Age d’homme, 1977, page 109). Le premier mouvement, tout en énergie parfois un peu démonstrative, fait ensuite place à un très bel Andante molto sostenuto où l’on perçoit, sinon les symphonies à venir, du moins l’attrait qu’avait déjà le jeune compositeur pour les grands tutti orchestraux et les vastes ensembles de cordes; mais il est vrai que les interventions du hautbois ou de la clarinette – tous deux excellents par ailleurs – nous plongent assez naturellement dans le climat romantique germanique que l’on pouvait connaître chez certains compositeurs des années 1830-1840, le caractère innovant du style «brucknérien» n’apparaissant guère ici. En revanche, comme il le fera ultérieurement de façon régulière, Bruckner opte pour un bref Scherzo (à peine cinq minutes) en guise de troisième mouvement, rehaussé de cuivres et timbales, où les bois interviennent de façon millimétrée: Simone Young en fait presque une danse, ce qui est ici des plus convaincants en raison de la luminosité du mouvement, tout particulièrement du trio aux véritables accents brahmsiens. Le dernier mouvement est peut-être le plus authentiquement brucknérien dans ses sonorités même si une certaine clarté le fait de nouveau regarder vers Schumann, les cors de la fin du mouvement faisant sérieusement penser à la fin de la Symphonie «Rhénane». Une très belle gravure en tout état de cause, signée Simone Young, dont l’intégrale en cours mérite pour l’instant la plus grande considération.


Poursuivons avec le jeune Yannick Nézet-Séguin (né en 1975) qui, tout en continuant une carrière dont l’essor ne cesse de progresser, reste chef titulaire de l’Orchestre Métropolitain de Montréal avec lequel il a déjà notamment enregistré les Quatrième, Sixième, Septième et Neuvième symphonies d’Anton Bruckner. Choisissant ici la version Nowak de 1873 (alors qu’on lui préfère généralement la version Nowak de 1889 voire la version Schalk de 1890), Yannick Nézet-Séguin confirme ici pleinement ses affinités avec le monde symphonique de Bruckner. Le premier mouvement (Gemässigt, misterioso) est empreint d’une formidable grandeur, le jeune chef prenant son temps, laissant les longues sonorités des cuivres et des cordes s’épanouir tranquillement. La force qui se dégage de certains passages est des plus séduisantes, offrant ensuite un superbe contraste avec l’intervention tout en délicatesse de la petite harmonie (flûte et hautbois en premier lieu). Le deuxième mouvement est d’un lyrisme totalement assumé, bénéficiant d’un pupitre de basses d’une séduisante rondeur qui confère là aussi à l’ensemble une impression de solidité que rien ne pourra venir ébranler, le discours des altos ou des violons semblant seulement ici ou là faire preuve de fragilité, relayée de façon assez classique chez Bruckner par les bois. La fin du Finale est impressionnante, Nézet-Séguin conduisant l’ensemble avec une grande fermeté qui permet à l’auditeur de suivre le fil des nombreuses idées que Bruckner a essayé de placer dans cet ultime mouvement. Une vraie réussite, qu’il a prouvée en donnant cette même symphonie en concert il y a quelques mois.


Le chef néerlandais Jaap van Zweden (né en 1960), ancien violon solo de l’Orchestre royal du Concertgebouw d’Amsterdam (il avait alors 19 ans!), mène aujourd’hui une carrière internationale régulièrement saluée à travers le monde. Dernière preuve en date, il vient de faire ses débuts à la tête des Wiener Philharmoniker le 6 avril 2014 dans la Huitième Symphonie de Bruckner, pour remplacer au pied levé un certain... Yannick Nézet-Séguin. Ayant déjà enregistré pour Channel Classics les Troisième et Huitième avec l’Orchestre philharmonique de la Radio néerlandaise, van Zweden livre ici une version tout simplement superlative de la Sixième. Réussite majeure, le premier mouvement: tout y est, qu’il s’agisse de la beauté plastique de l’orchestre, du sens de la progression (la coda finale à partir de 13’15, annoncée par un hautbois étincelant), de la rythmique (la ligne de basses avançant de façon inexorable)... Beaucoup plus lyrique, l’Adagio. Sehr feierlich bénéficie là aussi d’un traitement idéal, la ductilité des cordes répondant avec justesse aux cuivres brillants de l’orchestre, les accents mahlériens de la symphonie ressortant de façon aussi imperceptible qu’indubitable: la fin, où les dernières notes confinent au silence absolu, est notamment d’une saisissante beauté. Pris à bonne allure, le Scherzo est très bien réalisé, faisant office de belle transition avec le dernier mouvement qui, pour n’être pas précipité, n’en est pas moins conduit avec élan par un Jaap van Zweden qui, décidément, s’affirme comme un excellent brucknérien.


Pour son deuxième enregistrement brucknérien, Iván Fischer (né en 1951) a choisi la symphonie la plus célèbre avec la Romantique puisqu’il dirige là la Septième (1881-1883). Ce qui frappe de la première à la dernière note de cet enregistrement, c’est l’allégement du discours qui nous porte à mille lieues des versions traditionnelles qui, à nos yeux, restent beaucoup plus convaincantes. Le premier mouvement bénéficie là certes d’un très bon orchestre, la qualité de l’enregistrement faisant ressortir des détails que l’on ne perçoit pas habituellement (la clarinette à 14’57), mais qui manque d’ampleur et de vision, cet Allegro moderato étant par ailleurs handicapé par une fin dont le tempo confine à l’empressement. Mais c’est surtout dans le deuxième mouvement, le célèbre Adagio dont Bruckner a pourtant indiqué qu’il devait être joué Sehr feierlich und sehr langsam («très mystérieux et très lent»), que l’approche de Fischer ne fonctionne pas. Tout est trop rapide: alors que le mouvement fait généralement plus de vingt minutes chez ses concurrents, il le plie ici en à peine dix-huit avec, qui plus est, de fortes variations de tempo alors qu’une des marques de Bruckner (et un de ses charmes) tient au contraire à la régularité de la pulsation qu’il sait instiller à ses compositions. Si l’on y ajoute une précipitation générale (la montée à partir de 13’) et des options plus que critiquables (les accents des basses), on aboutit à un climat qui ne convient guère aux souhaits du compositeur. Si le Scherzo est bien conduit, le dernier mouvement souffre lui aussi d’un empressement qui donne une fâcheuse impression de bâclé, concluant un enregistrement qu’on oubliera d’autant plus rapidement que, peut-être dans cette symphonie plus que dans toute autre, ce n’est pas la concurrence qui manque.



Le site de Simone Young
Le site de l’Orchestre philharmonique de Hambourg
Le site de Yannick Nézet-Séguin
Le site de l’Orchestre Métropolitain
Le site de Jaap van Zweden
Le site de l’Orchestre philharmonique de la Radio néerlandaise
Le site de l’Orchestre du Festival de Budapest


Sébastien Gauthier

 

 

 

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