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12/23/2014
Edward Elgar : Sea Pictures, opus 37 – The Dream of Gerontius, opus 38
Sarah Connolly (mezzo-soprano), Stuart Skelton (ténor), David Soar (basse), BBC Symphony Chorus, Stephen Jackson (chef de chœur), BBC Symphony Orchestra, Sir Andrew Davis (direction)
Enregistré à Croydon, Londres (3-5 avril 2014) – 124’57
Album de deux SACD Chandos CHSA 5140 (2) – Notice trilingue d’Anthony Burton et textes inclus


 Sélectionné par la rédaction





En l’espace de deux ans à peine, Sir Edward Elgar (1857-1934) composa deux œuvres que l’on sait maintenant majeures à tout point de vue, et un cycle de mélodies avec accompagnement d’orchestre, les trois d’une inspiration originale par la forme. Si les Variations Enigma (1899), n’avaient, certes, pas leur place ici, Sir Andrew Davis a eu la bonne idée de compléter en durée par le cycle Sea Pictures (1897-1899), l’enregistrement de sa toute nouvelle version du Rêve de Géronte (1900). Le lien, ténu mais renforcé par les dates de composition, réside dans son effectif pour contralto et orchestre.


La voix sombre et charnue de la mezzo-soprano Sarah Connelly atteint sans peine les notes les plus graves exigées pour une partition pourtant destinée à Dame Clara Butt. Sa voix convient bien à Sea Pictures, cycle de cinq mélodies qui mettent en musique cinq poèmes victoriens d’auteurs différents, dont Elizabeth Barrett Browning et Alice, l’épouse d’Elgar, son «Haven (Capri)» étant la seule mélodie en partie composée avant 1899. Les sujets souvent métaphysiques ou passionnels se basent de près ou de loin sur la présence, l’attirance ou la métaphore de la mer. Les cinq pages, d’une grande musicalité très librement strophique, alternent un plein orchestre avec un orchestre réduit. L’orchestration, d’une grande mobilité harmonique oscille entre une riche ampleur et une transparence poétique, soutient sans emphase les climats changeants. Un motif mélodique de la première réapparaît de manière fragmentaire tout au long du recueil. La cinquième, au texte impressionniste traversé d’éclats intensément colorés et lumineux, vient en apothéose vocale et orchestrale.


Le Rêve de Géronte semble touché par la grâce de l’âme du compositeur lui même. Elgar déploie toute sa science mélodique, contrapuntique et harmonique au service du long poème mystique du cardinal John Henry Newman, qui évoque sans narration la mort de Géronte et l’errance de son âme jusqu’au purgatoire. D’une profonde spiritualité, l’œuvre fortement intériorisée fait appel à trois solistes, qui assument chacun un personnage évoluant entre les deux parties, et à un chœur important qui, loin de commenter l’action à l’ancienne, prend le rôle tour à tour de serviteurs, proches, démons, anges ou âmes au purgatoire. Ce n’est donc pas un oratorio – et Elgar insistait sur ce point – mais un poème symphonique et vocal dramatisé en deux parties.


Sir Andrew Davis l’a dirigé relativement souvent et une de ses prestations filmée en 1997 par la BBC a fait l’objet d’une parution d’abord en CD (NVC) en 1999 et ensuite en DVD (BBC) en 2006, les deux salués par la critique outre-Manche nonobstant l’existence de tant d’autres versions, jusqu’à dix-huit aujourd’hui. Pour cette très récente version, le chef expérimenté bénéficie d’une équipe musicale tout aussi rompue à l’œuvre et de l’excellence d’une prise de son du label Chandos, qui a toujours dans ses archives la belle version (1988) de Richard Hickox à la tête du Chœur et de l’Orchestre symphoniques de Londres, les trois solistes bouleversants de vérité. Davis a le souci de soigner le relief qui fait la beauté de la partie orchestrale et, si aux moments les plus grandioses il se signale comme elgarien traditionnel, la finesse de sa direction permet une urgence poignante, une intensité dramatique et spirituelle et des pianissimos étirés d’une extrême délicatesse lumineuse. Son attachement à l’œuvre est partout manifeste, la conviction et l’engagement des musiciens de l’Orchestre symphonique de la BBC totalement en phase.


Les riches timbres un peu épais de la voix agile et expressive de Stuart Skelton convient au rôle prépondérant de Géronte malgré une puissance opératique dont il sait tirer partie au bénéfice du rôle, ses aigus de tête d’une infinie douceur. Sarah Connolly rend pleinement les nuances du rôle de l’Ange miséricordieux au soutien de Géronte, les couleurs sombres de sa voix ne manquant pas de clarté dans l’aigu. La présence vocale de David Soar s’impose dans le rôle du prêtre comme dans celui de l’Ange de l’Agonie, les beaux timbres de sa voix de basse fermes mais néanmoins d’un lyrisme efficace. Dans l’ensemble, les trois solistes dominent par leurs qualités ceux de la récente version d’Edo de Waart, l’un des rares chefs non britanniques à aborder l’œuvre, sa hauteur de vue remarquable, mais la prestation du Collegium vocale de Gand reste d’une beauté vocale sans faille. En double chœur à plein effectif ou réduites en nombre à un chœur plus éthéré à quatre voix, les interventions éloquentes du Chœur symphonique de la BBC, ne souffrent pas de la comparaison pour autant tant leur expressivité, comme leur jeu d’acteur, est nuancée et juste. Ils donnent en première partie un «Rescue him» de toute urgence et en seconde un «The mind bold» démoniaque et cassant à souhait. Leur «Praise to the holiest» resplendit.


Ajoutée à la qualité de la prise de son, la relation profonde que les interprètes entretiennent avec l’œuvre hisse la version de Sir Andrew Davis sans doute au niveau des meilleures.


Le site de Sir Andrew Davis


Christine Labroche

 

 

 

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