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05/15/2014
Karol Szymanowski : Masques, opus 34 – Métopes, opus 29 – 12 Etudes, opus 33 – 4 Etudes, opus 4
Cédric Tiberghien (piano)
Enregistré au Henry Wood Hall, London (10-12 mars 2013) – 74’36
Hyperion CDA67886 (distribué par Abeille Musique) – Notice de présentation en français, anglais et allemand


 Sélectionné par la rédaction






«My Polish Diary»
Karol Szymanowski : Masques, opus 34
Frédéric Chopin : Variations brillantes, opus 12
Juliusz Zarebski : Les Roses et les Epines, opus 13
Ignacy Jan Paderewski : Caprice, opus 14 – Nocturne, opus 16
Witold Lutoslawski : Deux Etudes

Kiryl Keduk (piano)
Date et lieu d’enregistrement non précisés – 75’20
Delos DE 3432 – Notice de présentation en anglais





Frédéric Chopin: Préludes n° 1, n° 2, n° 3, n° 4, n° 9 et n° 10, opus 28 – Nocturnes n° 19, opus 72 n° 1, et n° 20, opus posthume – Polonaises n° 3, opus 40 n° 1, n° 5, opus 44, et n° 14, opus posthume – Lento con gran espressione, opus posthume
Ignacy Jan Paderewski : Au soir – Polonaise, opus 9 n° 6
Juliusz Zarebski : Grande Polonaise, opus 6

Pawel Wakarecy (piano)
Enregistré à la Sali Koncertowej Filharmonii, Varsovie (2 et 3 janvier 2013) – 62’38
Accord ACD 190-2 – Notice de présentation en anglais et polonais





Ces trois disques de piano polonais, s’ils se caractérisent par leur bonne tenue d’ensemble, apportent des plaisirs divers. Comme un symbole des liens (musicaux) privilégiés entre les deux pays, c’est le Français de l’étape qui signe l’album le plus admirable. Parmi les pièces de Karol Szymanowski (1882-1937) qu’interprète Cédric Tiberghien (né en 1975), les Métopes (1915) sont à marquer d’une pierre blanche dans la discographie: impossible de résister aux envoûtements sonores de «Calypso», de «Nausicaa» et plus encore de «L’Ile des Sirènes», le pianiste se faisant orfèvre dans le polissage des touches. Ainsi que l’écrit Francis Pott dans la notice de l’album, «un élément récurrent de la musique de Szymanowski est sa disjonction entre la densité harmonique et la légèreté aérienne lumineuse de la texture réelle. Dans le contexte de l’écriture pianistique, cela repose sur un interprète doté d’un sens méticuleux de la polyphonie et d’une subtilité aiguë». Cédric Tiberghien est à l’évidence cet interprète.


Grâce à un travail prodigieux sur les résonnances, les Masques (1916) hypnotisent comme rarement. «Shéhérazade» se dévoile avec une lenteur perverse, dans un crescendo traînant et inquiétant. Avare en virtuosité, le portrait tragicomique de «Tantris le Bouffon» suit également une construction subtile – ordinairement grossier d’abord, diaboliquement nocif ensuite. Quant à «La Sérénade de Don Juan», elle ne recherche aucun hispanisme (dans les couleurs comme dans les arrondis), mais polit au contraire toutes ses arêtes. Si l’inspiration scriabinienne des Quatre Etudes (1902) n’interdit nullement Cédric Tiberghien d’exprimer une voix propre – notamment dans la réputée «Etude en si bémol mineur», superbe de pudeur –, les Douze Etudes (1916), qui présentent une telle unité – comme une interdépendance organique – et des emballements rythmiques si bien domestiqués, achèvent de convaincre que ce disque est un coup de maître.


Fils d’émigrés biélorusses (arrivé en Pologne à l’âge de 14 ans), Kiryl Keduk (né en 1987) offre un piano alerte et accompli – jeune mais pas vert. Certes, son interprétation des Masques (1916) de Szymanowski – moins travaillée que celle de Tiberghien – manque de suavité et semble perdre le fil au fur et à mesure des épisodes. Mais les mélodies empreintes de mystère nocturnal (et teintées de romantisme suranné) du cahier de Juliusz Zarebski (1854-1885) intitulé Les Roses et les Epines (1882), qui jouent habilement de la pédale, reflètent une sensibilité indéniablement juste. L’impression prédomine souvent que ce piano est fait pour Chopin (1810-1849) – comme en attestent les joies et douceurs sucrées des Variations brillantes sur l’air «Je vends des scapulaires» (1833), interprétées avec allant et fierté. Si la vivacité n’est pas conquérante comme chez Josef Hofmann, les efforts investis dans le Caprice en sol majeur (1887) et le Nocturne en si bémol majeur (1896) d’Ignacy Jan Paderewski (1860-1941) sont payants. Le sommet du disque réside toutefois dans les Deux Etudes (1941) de Witold Lutoslawski (1913-1994), où le geste se fait décapant et l’intensité ravageuse.


Enfin, Pawel Wakarecy (né en 1987) présente un programme essentiellement chopinien, qui retient l’attention par ses compléments. Le jeune pianiste polonais ose ainsi la Grande Polonaise en fa dièse majeur (1881) de Zarebski et la Polonaise en si majeur (1884) de Paderewski – aux belles harmonies... mais trop à l’ombre de Chopin pour intéresser véritablement. La sélection de Préludes (1839) de Chopin ne convainc pas non plus, la faute à des tempos parfois apathiques – une faiblesse qui affecte d’ailleurs les Nocturnes en mi mineur et en do dièse mineur (1830) – et un legato souvent asséché. Si la Polonaise en fa dièse mineur (1841) est impeccable et moins ordinaire de ton que la Polonaise «Militaire» (1838) – qui peine à livrer sa charge –, la rarissime Polonaise en sol dièse mineur (1824), bien que l’épaisseur attendue en soit absente, attendrit par la fragilité poétique qui s’y déploie.


Gilles d’Heyres

 

 

 

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