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05/01/1999
György Ligeti : Le Grand Macabre (version 1997)
Sybille Ehlert (Gepopo/Venus), Laura Claycomb (Amanda), Charlotte Hellekant (Amando), Jard Van Nes (Mescalina), Derek Lee Ragin (Prince Go-Go), Graham Clark (Piet), Willard White (Nekrotzar), Frode Olsen (Astradamors), Steven Cole (Ministre blanc), Richard Suart (Ministre noir), London Sinfonietta Voices, Philharmonia Orchestra, Esa-Pekka Salonen (direction)
Sony S2K 62312 (2 CD)



Cet enregistrement a gardé les meilleurs prises des représentations de l’opéra données au Châtelet en 1998 (chronique que les nostalgiques retrouveront dans la saison 1997-98 du Concertographe). Pour cette raison peut-être, il est d’une vitalité et d’une intensité hors du commun. La musique et l’interprétation m’apparaissent en fait supérieures encore à la (très bonne) impression que j’avais eue lors de la production, ce qui place l’oeuvre à la hauteur de sa réputation, comme l’un des opéras phares de l’après-guerre. Par rapport à la version que l’on connaissait (chez Hungaroton), cette version est plus condensée, et la plupart des passages parlés sont maintenant chantés. La différence la plus frappante reste cependant le changement de langue, passant de l’allemand à l’anglais : il est assez étonnant de constater à quel point une langue peut changer le climat d’un opéra. Si Le Grand Macabre pouvait paraître post-expressionniste dans sa précédente version, sa nouvelle saveur anglo-américaine le rapproche maintenant plus de l’ironie du Rake’s Progress, en restant cependant plus éloigné de Broadway que l’opéra de Stravinski.


Composé à la grande période du collage, Le Grand Macabre n’échappe pas à la règle, même s’il le fait sur le mode de la parodie. On retrouvera ainsi, non sans quelques décalages, certains styles opératiques bien connus, et un goût du bouffon qui sort directement des Aventures et Nouvelles aventures. Ligeti a un véritable goût pour le non-sense à la Lewis Carroll — ou plutôt à la Topor, si l’on prend en compte l’ébriété des personnages. Mais l’humour de Ligeti reste suffisamment fin pour laisser la pièce dans une totale ambiguïté : que la fin du monde annoncée soit parodique ou non, qu’elle soit advenue ou non, reste indécidable. Cette dernière version reste ainsi assez facile à suivre, et menée tambour battant, grâce à une efficacité (poly-)rythmique totale, à l’utilistion des instruments les plus insolites, du klaxon au sifflet, et à un style lyrique le plus souvent très naturel (malgré un goût évident pour la pyrotechnie vocale). L’instrumentation, souvent peu étoffée, atteint le niveau de raffinement habituel du compositeur.


Encore un mot. Si l’on peut comprendre la colère de Ligeti contre la mise en scène de Peter Sellars, qui ne respectait ni le livret ni l’esprit de l’opéra, il faut reconnaître la force visuelle du metteur en scène. Un an après, la musique nous rappelle certaines des scènes de sa production, nous donnant ainsi des repères " visuels " d’écoute. (Que ceux qui n’ont pas vu l’opéra se rassurent cependant : ces souvenirs ne remplacent quand même pas le livret).


Il s’agit là d’un des plus beaux disques du printemps, qui a déjà toutes les qualités requises pour être qualifié d’historique.


Stéphan Vincent-Lancrin

 

 

 

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