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03/01/1999
Wolfgang Amadeus Mozart : Cosi fan tutte
Véronique Gens (Fiordiligi), Bernada Fink (Dorabella), Werner Güra (Ferrando), Marcel Boone (Guglielmo), Pietro Spagnoli (Don Alfonso), Graciela Oddone (Despina)
Concerto Köln, René Jacobs (direction)
Harmonia Mundi HML 5901663.65, enregistré en 1998, (3 CD + 1 CD-ROM)

Les effrontés ! Ils touchent à Mozart ! Ils osent des ornementations en lieu et place des points d'orgue habituels, dès la deuxième scène du premier acte présentant les deux promises, l'oreille se tend, "Tiens, c'est bizarre", on est dérangé. Ils osent vraiment, mais ils osent enfin pourrait-on dire, ils remettent les choses à plat et repartent du texte. Et ces fameuses ornementations étaient choses courantes du temps de Mozart. Loin de céder à une simple mode, l'orchestre baroque sert ici à redynamiser le tissu orchestral avec une alacrité et une fraîcheur revigorantes, d'autant qu'elles ne se font jamais au détriment de la respiration et des nuances. Evitant le défaut trop courant des baroqueux d'adopter un tempo trop uniforme et précipité (style Hogwood), René Jacobs, en grand musicien, modèle le tempo sur la phrase musicale, et il est parfois plus lent que bien des orchestres symphoniques (le "Per pieta, ben io, perdonna" de Fiodiligi au deuxième acte dure 7'40'' !). Autre excellente idée, le pianoforte (au lieu de l'habituel clavecin), qui accompagne et soutient les récitatifs et n'hésite pas à s'inviter dans les passages chantés. Loin de l'alanguissement et de l'embourgeoisement des Böhm et Karajan ou de la nouveauté chic et toc de quelques autres, on retrouve ici une innocence et une vérité première. Cet enregistrement évoque (Oh référence sacrée !) celui que réalisa Fritz Busch à Glyndebourne en 1935, qui était à l'époque une véritable recréation car l'oeuvre avait disparu depuis longtemps des affiches des opéras (sauf au Festival de Salzbourg depuis 1922, mais en allemand !) : on y retrouve le même esprit de redécouverte du texte, la même vigueur, la même unité de conception entre le chef et les chanteurs. Le travail de l'éditeur est également original et de qualité puisque l'on trouve, en plus de l'enregistrement, un passionnant CD-ROM sur la genèse de Cosi fan tutte et offrant une analyse détaillée de chacune des scènes et une présentation des interprètes. Ce nouveau Cosi concilie les qualités éminemment mozartiennes de fraîcheur et d'intelligence et s'inscrit d'emblée parmi les grandes versions de l'oeuvre. Vraiment des effrontés !


Philippe Herlin

 

 

 

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