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03/12/2013 «Concerti per violino V ‘Per Pisendel’»
Antonio Vivaldi : Concertos pour violon RV 177, RV 212a, RV 246, RV 370 «Per Pisendel», RV 242, RV 379 et RV 328 «Per Pisendel»
Il Pomo d’Oro, Dmitry Sinkovsky (violon et direction)
Enregistré à la Villa San Fermo, Lonigo (mars 2012) – 77’49
Naïve Opus 111 OP 30538 – Notice (en français, anglais, italien et allemand) de Cesare Fertonani
Bien évidemment, lorsque l’on songe à l’œuvre d’Antonio Vivaldi (1678-1741), c’est avant tout au violon que l’on pense, instrument roi du Prêtre roux pour lequel il a composé des concertos par dizaines, pour un, deux, trois ou même quatre violons. Le présent disque, cinquième volume consacré aux concertos pour violon dans l’Edition Vivaldi proposée par Naïve (voir notamment ici), met une nouvelle fois en valeur toutes les chausse-trappes que peuvent offrir ces partitions extrêmement diversifiées.
Originalité du présent disque, celui-ci se veut un hommage, à travers notamment les Concertos RV 370 et RV 328, aux relations qu’entretinrent Vivaldi et Pisendel. S’il a passé la majeure partie de sa carrière à la Cour de Dresde où il s’est affirmé dès 1712comme un des plus brillants violonistes de sa génération, Johann Georg Pisendel (1687-1755) a également effectué un voyage important à Venise en avril 1716; là, il rencontre Vivaldi avant de parcourir le reste de l’Italie et de revenir dans la Sérénissime à l’automne 1717, où il retrouve son comparse. Ses liens avec Vivaldi sont fondamentaux puisque, outre le fait qu’il a joué ses concertos, il en a également transcrit et adapté (ajoutant par exemple un ou deux hautbois par-ci, par-là) et, surtout, il a rapporté de très nombreuses partitions du compositeur vénitien à Dresde: sans le fonds extrêmement riche constitué à cette occasion (auquel a également contribué Joachim Quantz), de nombreuses œuvres de Vivaldi auraient aujourd’hui sans nul doute disparu. Le fait que la mention P il P. apparaisse sur le manuscrit du Concerto RV 328 témoigne de l’affection que chacun avait pour l’autre; il témoigne également de l’estime que Vivaldi pouvait avoir pour son cadet, n’hésitant donc pas à lui dédier des partitions d’une technicité redoutable.
A ce jeu-là, Dmitry Sinkovsky est aussi à l’aise qu’un poisson dans l’eau. Soliste, mais également chef d’orchestre (comme c’est le cas en l’espèce) ou premier violon d’ensembles confirmés (il a été ainsi le Konzertmeister d’Il Complesso Barocco lorsque celui-ci a donné Giulio Cesare à Paris et Ariodante à Versailles), il fait ici montre de toute l’étendue de moyens véritablement infaillibles. Le son est toujours juste et l’interprétation toujours idoine. Délicieusement langoureux dans les mouvements lents (le Largo du RV 212a, où sonne également le magnifique luth de Luca Pianca), modèle de finesse et de retenue dans le douloureux Grave du RV 370, Sinkovsky n’hésite pas non plus à rudoyer quelque peu son instrument (un Ruggeri de 1675), jouant fort adroitement sur l’âpreté des sonorités au début de l’Allegro du RV 212a ou du RV 370. Revenant à une amabilité toute vivaldienne dans le deuxième Allegro du RV 370 ou dans l’Allegro conclusif du RV 242 (qui connaît là quelques menus problèmes de justesse), l’archet du jeune soliste russe danse sur les cordes, gronde, taquine ou se veut enjôleur dès qu’il le souhaite, passant en un rien de temps de quelques périlleuses glissades (l’Allegro initial du RV 379) à des cadences échevelées.
L’ensemble Il Pomo d’Oro s’avère également remarquable et contribue tout autant que Dmitry Sinkovsky à faire de ce disque une référence moderne pour ces concertos de Vivaldi dont on ne se lasse que difficilement.
Le site de Dmitry Sinkovsky
Le site d’Il Pomo d’Oro
Sébastien Gauthier
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