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08/04/2012
«Jewish spirits»
Osvaldo Golijov : The Dreams and Prayers of Isaac the Blind
Ernest Bloch : Jewish Life (arrangement de trois pièces pour clarinette et piano) – Abodah (arrangement pour clarinette et piano)
Michel Lethiec (clarinette), Itamar Golan (piano), Quatuor Artis: Peter Schuhmayer, Johannes Meissl (violon), Herbert Kefer (alto), Othmar Müller (violoncelle)
Enregistré lors du festival de Prades (5 août 2008 [Golijov]) et en l’église évangélique de Saint Marcel, Paris (30 novembre 2011 [Bloch]) – 47’32
Saphir LVC 1175 – Notice en français et anglais
Le disque réunit, sous le titre «Esprits juifs», deux compositeurs affichant ou ayant affiché clairement leurs origines et leurs sources d’inspiration hébraïques, Osvaldo Golijov, juif argentin né en 1960, et Ernest Bloch, juif suisse, né en 1880 et mort en 1959, tous deux par ailleurs émigrés aux Etats-Unis. Les œuvres présentées sont aussi de format voisin: Les rêves et prières d’Isaac l’aveugle du premier, créés en 1994, ont été composées pour clarinette et quatuor à cordes, tandis que les trois pièces extraites de La Vie juive écrite en 1924 font ici l’objet d’un arrangement permettant de faire intervenir une clarinette à la place du violoncelle solo original à côté du piano et qu’Abodah créée en 1929 par un violoniste et un pianiste est ici interprété par un clarinettiste et un pianiste.
Pourtant, malgré le parallélisme des parcours des compositeurs et la cohérence des œuvres ou de leurs inspirations, le disque semble avoir été péniblement conçu: il a fallu retenir des arrangements pour rassembler les artistes; le premier enregistrement date de 2008, le second de 2011, et leur durée cumulée n’atteint pas 48’. Heureusement, l’émotion de ces pages hautement rhapsodiques et marquées par la nostalgie et la douleur est bien présente.
L’œuvre de Golijov, Les rêves et prières d’Isaac l’aveugle, est sans doute ici, comme souvent ailleurs ainsi qu’on a pu le lui reprocher, faite d’emprunts mais d’emprunts sublimés et remarquablement réécrits qui en font autant d’hommages. La clarinette de Michel Lethiec y domine clairement. Elle paraît comme fêlée, fragile, abattue et fatiguée par la vie, et les danses traditionnelles, aux rythmes effrénés un peu fous, qui l’embarquent ne font guère illusion: le sentiment tragique de l’existence, pour reprendre les mots de Miguel de Unamuno, n’est pas loin. Le clarinettiste change ensuite de style, sinon d’univers, dans les courtes pages de Bloch, de facture postromantique. Il en fait alors ressortir toute l’élégance un peu triste, indéniablement attachante.
Un disque qui a, du coup, le goût de trop peu.
Stéphane Guy
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