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04/01/2000
Anton Webern : l'oeuvre complète
Avec Pierre Boulez dirigeant l'Orchestre philharmonique de Berlin, les BBC Singers et l'Ensemble Intercontemporain ; Christiane Oelze, Françoise Pollet, le Quatuor Emerson, Gidon Kremer, Krystian Zimerman, ... Deutsche Grammophon, enregistré entre 1995 et 2000, 6 CD

Un cliché subsiste à propos d'Anton Webern, entre le théoricien Schoenberg et le sensuel Berg, il serait l'intellectuel un peu froid et désincarné de la trilogie de l'Ecole de Vienne. Mais de même que le qualificatif de sensuel accolé à Berg fait l'impasse sur la savante élaboration de son écriture, l'étiquette d'intellectuel (sous entendu c'est très intéressant mais pas vraiment fait pour être écouté) que l'on veut accrocher au veston de Webern trahi l'homme et son oeuvre. Pour Pierre Boulez (1) en effet : "Bien loin d'être un abîme d'intellectualité et de spéculation, la musique de Webern est avant tout naïve, ingénue, dans le sens le plus optimiste de ces termes. Ce qui fait sa difficulté d'écoute ? Premièrement, cette ingénuité : il est interdit de s'y perdre, et donc, il est difficile de s'y trouver totalement ; musique exigeante certes, non point par son intellect que par sa sensibilité qui refuse les scories et interdit une approche distraite et approximative." D'où vient alors cette perception déformée ? Sans doute d'une réification excessive du dodécaphonisme (pour le vénérer ou l'abhorrer, c'est secondaire), alors que, toujours selon Boulez, "A vrai dire qu'était-elle cette série de douze sons, sinon un moyen élémentaire d'organisation, tout à fait insuffisant pour pouvoir proférer l'oeuvre, ni même organiser l'écriture ?"

L'intérêt d'une intégrale comme celle ci est de replacer en perspective l'ensemble des opus composés entre 1904 (Im Sommerwind) et 1943 (Seconde Cantate) plutôt que de se limiter aux quelques pièces pour orchestre, ensemble de chambre et piano joués - trop peu - au concert et laissant par là de côté l'oeuvre vocale et nombre de pièces. Une perspective utile pour bien prendre la mesure de la rupture produite par l'enseignement de Schoenberg, (l'année 1908 marquant le point de non retour), ou pour découvrir des portes entrouvertes sur l'avenir comme ce premier mouvement de la Symphonie op. 21 (1928) dont le caractère éthéré et inquiétant évoque l'oeuvre de Luigi Nono, ou la Pièce pour piano, Im Tempo eines Menuetts (1925) où apparaissent les bribes d'un menuet et qui fait penser au travail de Helmut Lachenmann. Une perspective que l'on ne conseillera que trop de découvrir en écoutant les pièces dans leur ordre chronologique plutôt que par genre comme elles sont rangées dans ce coffret.

Placée sous l'autorité de Pierre Boulez, et publiée pour son 75e anniversaire, cette intégrale ne souffre aucune faiblesse, de la sublime voix de Christiane Oelze à la clarté minérale du Quatuor Emerson, de la somptuosité de l'Orchestre philharmonique de Berlin à la profonde intelligence de Krystian Zimerman. Une somme essentielle, un éternel compagnon de voyage musical.



(1) Passe, impasse et manque in Vienne 1880-1938, L'apocalypse joyeuse, Centre Georges Pompidou



Philippe Herlin

 

 

 

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