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08/19/2011
«Prima donna»
Antonio Vivaldi : Juditha triumphans RV 644: «Agitata infido flatu» et «Transit aetas» – Orlando furioso RV 728: «Ritornello» (air pour Ruggiero) et «Ritornello» (air pour Medoro) – Arsilda Regina di Ponto RV 700: «Io sento in questo seno», «Del goder la bella spene» et «Cara gioia e bel diletto» – Tieteberga RV 737: «La gloria del mio sangue» et «L’innocenza sfortunata» – Il Giustino RV 717: «Sento in seno ch’in pioggia di lagrime», «Sorte che m’invitasti» (récitatif), «Ho nel petto un cor si forte» et «Ritornello» (air pour Anastasio) – L’Olimpiade RV 725: «Con questo ferro indegno» (récitatif), «Gemo in un punto e fremo» et Sinfonia – La costanza trionfante dell’amore e dell’odio: «Lascia almen che ti consegni» – Il Teuzzone RV 736: «Ritornello» (air pour Zidiana) – Andromeda liberata RV Anh 117: «Sovvente il sole» – L’Atenaide RV 702: «Cor mio che prigion sei» – Semiramide RV 733: «Con la face di Megera» et «Vincerà l’aspro mio fato»

Orfeo 55, Nathalie Stutzmann (contralto et direction)
Enregistré en septembre 2010 à l’Arsenal (Metz) – 71’14
Deutsche Grammophon 476 4304 (distribué par Universal) – Notice bilingue (français et anglais) de Frédéric Delaméa





Quel chanteuse (ou chanteur) ne s’essaie-t-elle pas aujourd’hui à la musique baroque? Le renouveau interprétatif de ce répertoire, l’adhésion sans faille d’un public souvent plus large que celui qui fréquente habituellement les salles de concert, les découvertes ou résurrections d’œuvres que l’on avait depuis longtemps bien oubliées au fond de quelque bibliothèque poussiéreuse... autant d’éléments qui ont fait naître un véritable engouement à l’égard de ces dizaines de compositeurs qui peuplaient alors l’Europe musicale.


Au sein de cet impressionnant vivier, Antonio Vivaldi (1678-1741) fait presque figure de passage obligé depuis notamment que Cecilia Bartoli a, en 1997, enregistré son phénoménal «Album Vivaldi». C’est donc au tour de Nathalie Stutzmann de se confronter à l’œuvre foisonnante du Prêtre roux, dont elle enregistre ici pas moins de huit extraits inédits au sein desquels il convient de distinguer cinq airs et trois ritournelles (brèves pages instrumentales s’insérant au sein d’un air chanté). Ce disque est d’autant plus remarquable que Nathalie Stutzmann, conseillée en particulier (comme nous l’apprend la notice) par Seiji Ozawa, avec lequel elle a chanté à maintes reprises, notamment dans Mahler et Berlioz, est à la fois chanteuse et chef d’orchestre, la photographie de la couverture du disque nous montrant d’ailleurs la cantatrice baguette à la main. Elle dirige à cet effet son ensemble Orfeo 55, orchestre de chambre basé à l’Arsenal de Metz avec lequel elle a déjà planifié maints concerts et tournées à travers le monde.


Au-delà de cette originalité, qu’en est-il du disque lui-même? L’impression qui se dégage du premier extrait, «Agitata infido flatu», est très moyenne: voix caverneuse, indistincte dans les graves, bien peu séduisante (notamment si l’on se réfère à la version de Juditha triumphans gravée par Vittorio Negri chez Philips). On est donc plus que circonspect. Néanmoins, les appréhensions sont rapidement levées puisque la suite des morceaux présentés se révèle nettement plus convaincante. On ne peut ainsi qu’être touché par le très minimaliste «Io sento in questo seno», tiré d’Arsilda Regina di Ponto, le chant plaintif étant notamment accompagné par un théorbe au diapason du climat souhaité par Vivaldi et parfaitement relayé par Nathalie Stutzmann; de même, on est immédiatement entraîné par les ritournelles des hautbois introduisant le très beau «La gloria del mio sangue» issu de Tieteberga, air d’ailleurs repris dans l’air d’Egaro à la scène 8 de l’acte II de Teuzzone. Comme souvent à l’époque, et notamment chez Vivaldi, les instruments sont parfois employés pour illustrer au plus près les sentiments éprouvés par les protagonistes: ici, on se reportera tout particulièrement à l’air «Sento in seno ch’in pioggia di lagrime» (Il Giustino) où les pizzicati des cordes rappellent la «pluie de larmes» à laquelle fait référence ce passage. De même, on est emporté par les trépidations des cordes qui rebondissent sans cesse, épaulées par un théorbe qui gratte et un clavecin qui s’enflamme, dans l’air «Gemo in un punto e fremo» tiré de L’Olimpiade: un sommet. A titre de dernier exemple, mentionnons le très délicat «Ho nel petto un cor si forte» (également extrait d’Il Giustino) où les pizzicati de l’orchestre sont relégués au profit d’un psaltérion soliste aux intonations toutes emplies de mystère. La musique de Vivaldi est telle que, dans certains extraits, Nathalie Stutzmann semble ne plus être maîtresse d’elle-même tant elle est impliquée dans ce qu’elle chante: écoutez donc le divin «Sovvente il sole» (Andromeda liberata) où le dialogue noué avec le violon solo de Thibault Noally (quelle sérénité dans la mélodie!) est tout simplement admirable et rejoint ainsi sans peine la version déjà superlative donnée par Anne-Sofie von Otter et Daniel Hope. Dernier joyau que l’on doit citer dans ce disque, qui en comporte de multiples: l’air «Vincerà l’aspro mio fato», enregistré en première mondiale, tiré de Semiramide. Un modèle d’équilibre entre voix et instruments (l’ensemble Orfeo 55 étant irréprochable, comme c’est d’ailleurs le cas tout au long du disque), un modèle de musicalité, un modèle d’interprétation.


Indéniablement, Nathalie Stutzmann (dont on connaissait déjà les profondes affinités haendeliennes) prouve encore une fois – n’oublions pas qu’elle a déjà enregistré l’œuvre du Prêtre roux avec Robert King et qu’elle a participé aux enregistrements d’Atenaïde et de La Verità in cimento dans l’«Edition Vivaldi» en cours chez Naïve – et ce de la plus belle façon, son authentique passion pour Vivaldi. On ne peut donc que souhaiter que cet essai magistral soit rapidement transformé!


Le site de Nathalie Stutzmann


Sébastien Gauthier

 

 

 

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