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08/19/2011
Johannes Schöllhorn : Kazabana [1] – Liu-Yi / Wasser [2] – Suite [3] – Tiento [4] – Senza parole [5]

Jürgen Ruck (guitare) [4], WDR Rundfunkchor Köln [5], Das Neue Ensemble [1, 3, 4], WDR Sinfonieorchester Köln [2], Johannes Kalitzke [1, 2, 3], Johannes Schöllhorn [4], Thomas Eller [5] (direction)
Enregistré à Cologne (20 et 22 mars 2001 [2], 23 novembre 2002 [5]) et à Hanovre (27 janvier 2002 [4], 10-11 juin 2006 [1, 3]) – 60’49
aeon AECD 0863 (distribué par Outhere) – Notice en français, anglais et allemand





Composées entre 1998 et 2002, au cœur même d’un catalogue qui est actuellement riche d’une large soixantaine d’opus, les cinq pièces recueillies ici constituent par leur diversité un juste aperçu des aspirations et des convictions musicales de Johannes Schöllhorn, compositeur allemand né en 1962, élève de Nunes, de Spählinger et de Huber à qui il attribue son attachement respectivement à la rigueur, alliée et non ennemie de la beauté, à la forme, respectée ou volontairement rompue, et à l’importance d’un esprit musical ouvert.


La Suite (1998) en sept volets est tirée de son opéra de chambre Les Petites Filles modèles sur un livret adapté de l’ouvrage éponyme de la Comtesse de Ségur et créé à l’abbaye de Royaumont en 1995. Après un prélude crépusculaire, la Suite procède par couplets entre quiétude et inquiétude et refrains souvent trépidants pour se refermer sur un postlude plus apaisé. Au cours de ces sept miniatures, le compositeur choisit d’exploiter les sonorités violentes, heurtées ou cristallines de la percussion augmentée des possibilités percussives du piano et de la harpe. Le chant, le jeu et la danse de l’opéra d’origine doivent ajouter une note essentielle à une partition qui fait difficilement abstraction du récit malgré l’application du Neues Ensemble avec lequel Schöllhorn maintient toujours une liaison étroite.


De la même année (1998), Kazabana permet une expressivité plus grande. Le titre est japonais et les traits qui fusent évoquent la rapidité d’exécution d’une calligraphie quoique plus impétueux que contemplatifs. Les deux premiers mouvements enchaînés se laissent dominer par la percussion ou les effets percussifs des neuf instruments mais le troisième mouvement, plus étale, apporte une touche poétique d’une mélancolie infinie. Les onze musiciens du Neues Ensemble, tous «solistes», surmontent de nouveau une mise en place délicate grâce à la direction exigeante de Johannes Kalitzke.


La guitare de Jürgen Ruck rejoint l’ensemble – sans harpe ni piano, qu’elle remplace en quelque sorte, et sans percussion – pour Tiento (1999), pièce plus ambitieuse tentant une application musicale des multiples sens que l’on peut trouver au verbe espagnol tentar, qui va du toucher au frôlement et de l’attraction à l’exploration, la guitare suggérant et effleurant à la limite d’une citation brisée les Fantaisies d’un Dowland ou d’un Bull. Le compositeur lui-même dirige l’ensemble et il obtient d’eux le phrasé impeccable que demandent une thématique souvent proche de la Klangfarbenmelodie, les traits fulgurants, les silences et les déflagrations brèves et soudaines tellement typiques de son écriture.


Liu-Yi / Wasser (2001-2002) pour orchestre, la pièce peut-être la plus importante des cinq et certainement l’une des plus convaincantes, s’inspire d’une série de douze vues d’étendues d’eau à l’encre de chine sur soie de Ma Yuan, peintre chinois du XIIe siècle, qui touchent à l’abstraction tout en restant proches du réel. La notion d’opposés qui se rejoignent et la beauté des images ajoutées au sens double de «Liu-Yi», 6-1, qui en cosmologie chinoise correspond à l’élément eau, eurent sur le compositeur allemand un tel impact qu’il ressentit le besoin d’en créer un équivalent musical qui serait ni imitation, ni illustration mais une correspondance intime. Le plein le vide, le trait, l’à-plat le précis le flou, le fort le délicat, le rythmé, l’étale trouvent une traduction musicale allant de l’attaque au silence avec une même économie de moyens qui devient un style en soi : si l’orchestre est relativement important, les tutti sont rares.


Pour trente-deux voix a capella, Senza parole (2000) peut faire penser à Ligeti avec presqu’un même foisonnement de frottements harmoniques. Le titre vient d’un poème de Giuseppi Ungaretti, Cantetto senza parole, auquel Schöllhorn emprunte quatre mots essentiels qui deviennent la base du chant de chacune des quatre parties : «Luce»,«Mare»,«Abisso» et «Eco». Les climats du poème sont indirectement recréés avec la pointe d’angoisse nécessaire, le chant étiré, irisé, contemplatif et d’une grande beauté expressive. Le WDR Rundfunkchor Köln sous la direction de Thomas Eller en livre toute l’essence poétique avec maîtrise et sensibilité.


Johannes Schöller a un style très personnel qui peut inviter à la réflexion ou stimuler l’imaginaire de chacun. Les amateurs de musique expérimentale ou de musique plus récente apprécieront ces compositions colorées, contrastées et aventureuses à leur juste valeur, d’autant plus que la prestation des différentes formations se fonde sur une compréhension en profondeur de ces cinq partitions tout à fait représentatives de l’esthétique et des objectifs musicaux de leur auteur.


Le site de Johannes Schöllhorn


Christine Labroche

 

 

 

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