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06/15/2011
France 1789 : «Révolte en musique d’un sans-culotte et d’un royaliste»

Jean-François Novelli, Hugues Primard, Arnaud Ledu (ténors), Arnaud Marzorati (baryton), Stéphanie Paulet (violon), Mélanie Flahaut (basson et flageolet), Michel Godard (serpent), Céline Frisch (clavecin), Yves Rechsteiner (piano organisé), Joël Grare (percussions), Les Lunaisiens
Enregistré à la Cité de la musique, Paris (juillet 2010) – 61’23
Alpha 810 (distribué par Outhere) – Notice bilingue (français et anglais) exemplaire d’Arnaud Marzorati, Philippe Bourdin et Jean-Claude Battault





Existe-t-il une période de l’histoire de France qui aura été plus propice et plus prolifique que la Révolution en chansons, couplets, cantiques, ballades ou hymnes?


En effet, si l’on se réfère à l’exhaustif catalogue de la Musique des fêtes et cérémonies de la Révolution française rédigé par Constant Pierre (1899), on découvre rapidement que le moindre événement a immédiatement généré son lot de chansons, ballades ou ritournelles. Ont ainsi été célébrés certains épisodes fameux comme la mort du roi (on trouve par exemple les chansons Les Adieux de Louis XVI, L’Adresse à Louis Capet, dernier roi de France, Ah! Que vous m’êtes chère!... Louis à Antoinette) ou celle de Marat à la suite de l’attentat perpétré par Charlotte Corday (L’Assassinat de Marat). Ont également été moqués les perdants de la Révolution avec des chansons comme Aristocrates, vous voilà donc tondus ou la Chanson sur les culs fouettés, tout comme, d’ailleurs, les gagnants (ainsi, la Chacone du Tiers-Etat). Citons enfin les chansons qui avaient pour objet de louer un symbole de la Révolution française (La Guillotine ambulante), un secteur d’activité (Hymne à l’agriculture) ou de galvaniser les populations contre les traîtres au nouveau régime (par exemple, la chanson Aux patriotes sur les troubles de la Vendée). On ne peut naturellement pas omettre le célébrissime Ah! Ça ira et le tout aussi connu Chant de guerre pour l’armée du Rhin devenu hymne national sous le nom de La Marseillaise.


L’ensemble des Lunaisiens, animé depuis sa création par les deux chanteurs Arnaud Marzorati et Jean-François Novelli, avait déjà proposé un programme de chansons révolutionnaires, donné à la Cité de la musique en novembre 2009, avec le concours de la mezzo-soprano Isabelle Druet. Dans l’absolue continuité de ce qui avait alors été joué, le présent disque illustre de nouveau cet engouement en proposant plusieurs chansons populaires couvrant l’ensemble de la période révolutionnaire, l’Hymne à l’hyver datant même de 1783, La Queue à Robespierre ayant pour sa part été composé en 1795, soit un an après l’exécution de «l’incorruptible». On entend ainsi plusieurs musiques célébrant la chute de la Bastille (qu’il s’agisse de l’entraînante Prise de la Bastille où les accents militaires surgissent à la faveur du jeu des flageolet et tambour, ou de la chanson Est-il bien vrai que je veille... pour voix de basse, basson, pianoforte organisé et tambour), certaines laissant d’ailleurs sous silence la vérité historique (ainsi, la Délivrance des captifs ne révèle à aucun moment que les assaillants ne trouvèrent dans la forteresse que... sept détenus, préférant insister sur la postérité de l’événement). Au caractère galant de l’Hymne à l’hyver succèdera plus tard le vengeur Le Gouverneur perfide, vraisemblablement composé pour blâmer le pauvre de Launay, qui commandait la Bastille et qui fut lynché lorsqu’elle fut prise. De même, on trouvera aussi bien une célébration de l’action antireligieuse de la Révolution dans une chanson grivoise de 1792 («Que c’bâtard nommé Jésus/Ait été fait par son père/Ou par un pigeon pattu,/N’ia pas là d’quoi faire un mystère») que de la chute de la royauté à travers l’épisode de la fuite de Varennes (Poursuite et retour de la Famille Ci-devant Royale où l’on peut notamment entendre un serpent) ou de la douce Complainte de Louis XVI aux Français, un ténor justifiant l’action passée du monarque sur une mélodie développée par un charmant clavecin tandis qu’une basse incarne de façon implacable le discours d’un procureur («Pleure, Louis, à l’heure de ta mort,/D’avoir désolé la patrie,/Tous les Français pourront longtemps encore/Pleurer les crimes de ta vie»). On retiendra également le chœur d’hommes célébrant la mort du roi dans la chanson La Mort de Louis Capet composée par le parolier Ladré (qui avait à son actif un certain nombre de mélodies dont la Complainte nouvelle, composée en 1784 à l’occasion de l’exécution de trois personnes en place de Grève, et le fameux Ah! ça ira sont passés à la postérité) ainsi que La Queue à Robespierre de Louis-Ange Pitou (1767-1846), royaliste fervent qui a miraculeusement réussi à passer à travers les mailles du «Rasoir national».


Outre l’opportunité qu’il offre d’entendre des instruments assez peu communs (le serpent, le flageolet ou le pianoforte organisé), ce disque revêt avant tout un intérêt historique en permettant à l’auditeur de prendre conscience de l’importance des chansons qui, comme le rappelle très justement Adélaïde de Place dans son livre La vie musicale en France au temps de la Révolution, se sont multipliées au fil du temps: 116 composées en 1789, 261 en 1790, 308 en 1791 et même 701 en 1794! Comment, en effet, ne pas recourir à un outil de propagande aussi efficace pour raconter à un peuple en grande partie analphabète ce qu’il devait savoir? Pour toutes ces raisons, ce disque instructif sera un utile complément à la magnifique anthologie instrumentale «La Prise de la Bastille», gravée par le Concerto Köln chez Capriccio à l’occasion du bicentenaire de la Révolution française.


Le site de l’ensemble Les Lunaisiens
Le site de Jean-François Novelli
Le site de Stéphanie Paulet
Le site de Michel Godard
Le site de Céline Frisch
Le site d’Yves Rechsteiner
Le site de Joël Grare


Sébastien Gauthier

 

 

 

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