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03/07/2011
Wolfgang Amadeus Mozart : Die Entführung aus dem Serail, K. 384

Elisabeth Schwarzkopf (Constance), Anton Dermota (Belmonte), Emmy Loose (Blonde), Peter Klein (Pedrillo), Herbert Ahlsen (Osmin), Wiener Philharmoniker, Rudolf Moralt (direction)
Enregistré à Vienne (6 septembre 1944) – 104’50
Coffret de deux disques Opera d’Oro OPD 1295 (distribué par DistrArt) – Notice (extrêmement brève) et synopsis en anglais de Bill Parker





L’éditeur Opera d’Oro poursuit son exhumation d’enregistrements d’opéras jusque-là inédits avec cette version véritablement historique de L’Enlèvement au sérail (1782) de Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791). Dirigée par Rudolf Moralt (1902-1958), chef à la tradition germanique bien ancrée mais aujourd’hui bien oublié (il a notamment dirigé l’Orchestre philharmonique de Vienne dans Les Noces de Figaro et La Flûte enchantée au Festival de Salzbourg, en août 1952), cette gravure (privée de certains airs et de l’ensemble des récitatifs) suscite la curiosité pour une seule véritable raison: la présence, dans le rôle de Constance, de la toute jeune Elisabeth Schwarzkopf qui, née en 1915, n’avait donc pas encore trente ans. Outre l’air «Martern aller Arten» tiré de l’acte II et qu’elle devait enregistrer en octobre 1946 avec Herbert von Karajan, il s’agit donc là, sauf erreur, de l’unique incursion de la soprano allemande dans ce singspiel si réjouissant. L’intérêt de l’auditeur est d’autant plus éveillé que le rôle de Belmonte est tenu par Anton Dermota (1910-1989), véritable légende mozartienne, qui l’a ensuite enregistré de la plus belle manière sous la direction théâtrale de Ferenc Fricsay (1914-1963), l’éditeur Myto ayant heureusement publié les bandes de ce truculent concert datant de 1949.


Avouons-le d’emblée: seul l’intérêt historique ou la passion immodérée que l’on peut avoir pour l’un des artistes présents peuvent justifier l’acquisition de ce disque.


Qu’on ne compte pas rencontrer ici la grande Elisabeth Schwarzkopf qui marqua définitivement les esprits dans ses rôles-phare de la Maréchale ou de la Comtesse. Dans cet enregistrement, on entend surtout une chanteuse qui peine à tenir la fin de ses phrases et dont la voix mêle très souvent dureté et aigreur. Précisons d’emblée que, comme on l’a sous-entendu précédemment, la partition de Constance n’est au surplus pas totalement complète puisque, par exemple, l’air «Ach, ich liebte, war so glücklich» manque à l’acte I. Son grand air «Martern aller Arten» alterne vocalises extrêmement bien faites et dureté d’émission, la voix n’ayant pas encore le velouté qu’on ne lui connaîtra que quelques années plus tard. Les attaques d’Elisabeth Schwarzkopf au début de l’ensemble concluant le deuxième acte («Ach, Belmonte! Ach, mein Leben») irritent de nouveau tant elles sont dures mais on ne peut, par ailleurs et pour contrebalancer cette appréciation quelque peu sévère, passer sous silence quelques interventions ultérieures qui, sans nul doute, annoncent la cantatrice que l’on saluera dans la suite de sa carrière: le duo avec Belmonte («Welch ein Geschick!»), à l’acte III, en est un bel exemple. Emmy Loose (1914-1987), qui a débuté sa carrière à Hanovre en 1939 dans ce même rôle de Blonde, la servante de Constance, fait montre d’une belle voix, doublée d’une indéniable agilité vocale: sans nul doute, c’est elle qui semble la plus à l’aise dans cet enregistrement. Qu’il s’agisse, au deuxième acte, de ses airs «Durch Zärtlichkeit und Schmeicheln» ou «Welche Wonne, welche Lust», Emmy Loose séduit donc très facilement l’auditeur.


Anton Dermota chante avec beaucoup d’allure sa partie même s’il ne possède pas la verve de son enregistrement ultérieur, restant de manière générale beaucoup trop sur la réserve. En soliste («Wenn der Freude Tränen fliessen» à l’acte II) ou dans le cadre d’ensembles (le final du deuxième acte ou son duo avec Constance dans le troisième), Dermota frappe néanmoins par la facilité de son émission et par la justesse du ton. Dans le rôle de Pedrillo (qui est à la fois serviteur de Belmonte et jardinier du Pacha Selim), Peter Klein chante honnêtement (son duo avec Osmin «Vivat Bacchus! Bacchus lebe» est assez plaisant) mais, aucun doute, il ne marquera pas le rôle. Herbert Ahlsen est fréquemment à la peine, manquant de souffle en plus d’une occasion ce qui le conduit soit à avoir du mal à terminer ses phrases, soit à prendre des respirations dans des moments pas toujours opportuns (écoutez à cet égard le duo avec Belmonte «Wer ein Liebchen hat gefunden» à l’acte I). Par ailleurs, on ne peut que regretter un chant souvent poussé et dépourvu de la verve que savait y insuffler un Kurt Moll (sous la direction de Karl Böhm): à ce titre, le formidable trio entre Belmonte, Pedrillo et Osmin «Marsch, marsch, marsch! Trollt euch fort» (acte I) est plus que mauvais (il en va de même pour son duo avec Blonde au deuxième acte, dans l’air «Ich gehe, doch rate ich dir»).


Inaugurant sa prestation par une ouverture assez confuse, Rudolf Moralt dirige un Orchestre philharmonique de Vienne tout juste acceptable (les interventions des instruments solistes au début de l’air de Constance «Martern aller Arten») mais, il est vrai, dont les sonorités légendaires s’avèrent fortement handicapées par une captation dont nous avons souligné combien elle était mauvaise. Pour autant, c’est la lourdeur (les accents des cordes au début de l’air «Solche hergelaufne Laffen» à l’acte I) et la raideur qui dominent. De ce fait, le fameux chœur des janissaires au premier acte s’inscrit dans un climat tudesque du plus mauvais effet.


On l’aura donc compris: Beecham, Böhm ou Fricsay (par deux fois) demeurent sans grand danger les références traditionnelles de L’Enlèvement, aux côtés de Gardiner pour ceux qui souhaitent bénéficier d’une vision à l’approche plus moderne.


Sébastien Gauthier

 

 

 

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