Back
12/29/2010 Igor Stravinski : Les Noces – Œdipus Rex
Mlada Khudoley (soprano), Olga Savova (mezzo), Alexander Timchenko (ténor, Le berger), Andrei Serov (basse), Sergeï Semishkur (Œdipe), Ekaterina Semenchuk (Jocaste), Evgeny Nikitin (Créon, Le messager), Mikhaïl Petrenko (Tirésias), Gérard Depardieu (récitant), Alexander Mogilevsky, Svetlana Smolina, Yulia Zaichkina, Maxim Mogilevsky (piano), Chœur et Orchestre du Théâtre Mariinsky, Valery Gergiev (direction)
Enregistré à Saint-Pétersbourg (28-31 décembre 2009 [Noces] et 28-31 décembre 2009 et 4-8 février 2010 [Œdipus]) – 74’09
SACD hybride Mariinsky MAR0510 (distribué par Harmonia mundi)
Au disque comme au concert, Valery Gergiev irrite par le caractère inégal et imprévisible de ses prestations et de ses partis pris, mais au moins a-t-il le mérite, à une époque où règnent trop souvent standardisation et routine, de ne pas susciter l’indifférence ni de manquer de personnalité. Cette fois-ci, sous la marque de son propre Théâtre Mariinsky, le chef russe est à son meilleur, au service de deux grandes œuvres vocales et chorales de Stravinski. L’auditeur est saisi dès les premières mesures des Noces (1923) et Gergiev ne le lâche plus ensuite par sa direction survoltée et intense, mais sans surexcitation, électrique et rapide, mais sans précipitation: une lecture assurément unidimensionnelle, privilégiant la vitalité primitive issue du Sacre du printemps au détriment de l’élément religieux, mais à laquelle il est difficile de résister.
Quatre ans plus tard, dans Œdipus Rex (1927), le polymorphe Stravinski a déjà changé de style et résolument viré vers le néoclassicisme: Gergiev n’insuffle pas moins à son orchestre et à son chœur l’énergie qu’on lui connaît comme chef de théâtre, puissant et dramatique. Comme dans Les Noces, les voix sont plus solides, engagées et vaillantes que brillantes ou séduisantes, à commencer par l’Œdipe de Sergeï Semishkur, la Jocaste d’Ekaterina Semenchuk et un Tirésias plus fatigué que nature, mais Evgeny Nikitin fait preuve de son excellence coutumière en Créon (et en messager). En récitant, Gérard Depardieu n’en rajoute pas dans le pathos et articule précautionneusement, mais ne se départ pas de l’agaçante prononciation «eudipe».
L’album est accompagné d’un épais livret comprenant une notice (en russe, anglais et français) mais ne donnant de version française que pour Œdipus Rex, dans ce qui semble d’ailleurs être, pour les parties chantées, une retraduction de l’anglais... du texte de Cocteau (sans compter un bien curieux texte latin, où la plupart des «c» ont été phonétiquement remplacés par des «k»).
Simon Corley
|