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12/08/2010 Giuseppe Verdi : Messa da Requiem
Christine Brewer (soprano), Karen Cargill (mezzo-soprano), Stuart Neill (ténor), John Relyea (basse), London Symphony Chorus, Joseph Culen (chef de chœur), London Symphony Orchestra, Sir Colin Davis (direction)
Enregistré en concert au Barbican Center, Londres (11 et 14 janvier 2009) – 82’04
Album de deux SACD hybrides LSO Live LSO0683 (distribué par Harmonia mundi) – Notice trilingue (anglais, français, allemand) de David Cairns
Nouvelle gravure d’une partition dont on ne compte plus ni les enregistrements, ni les représentations... A l’image de celui de Mozart, le Requiem de Giuseppe Verdi (1813-1901) est depuis longtemps une œuvre que tout chef et tout orchestre qui se respectent ont exploré avec plus ou moins de réussite, tenant néanmoins à donner leur vision d’une pièce composée, comme on le sait, à la mémoire du poète italien Alessandro Manzoni (1785-1873). Dans la foulée de sa création milanaise en mai 1874, Giuseppe Verdi le dirigea avec tout autant de succès dans les grandes villes européennes, à commencer par Paris et Londres. Sir Colin Davis, dont on connaissait une version honnête gravée à la tête de l’Orchestre symphonique de la Radio bavaroise au début des années 1990 (avec Florence Quivar, Carol Vaness, Dennis O’Neill et Carlo Colombara), retrouve ici un orchestre et des chœurs qu’il connaît parfaitement: de façon indéniable, l’interprétation s’en ressent, galvanisée par la magie du concert.
L’Orchestre symphonique de Londres est excellent, qu’il s’agisse des solistes ou des tutti, bénéficiant au surplus d’une très bonne prise de son (même si l’on peut regretter que les micros aient été placés un peu trop près des timbales, notamment au début du «Requiem æternam dona eis»). Sir Colin Davis, très à son affaire dans ce répertoire, soigne ainsi les moindres détails (le contre-chant du basson dans le «Lacrymosa» au sein du «Dies iræ» ou les trombones dans l’«Agnus Dei») tout en insufflant une véritable dynamique à l’ensemble de l’orchestre; à titre d’illustration, on écoutera la merveilleuse transition, au sein du «Dies iræ» entre le «Confutatis» et le «Lacrymosa», qui bénéficie d’un léger ralenti avant que la masse des cordes ne soit relancée d’un seul coup. Le Chœur de l’Orchestre symphonique de Londres est également à son meilleur niveau, capable de jouer sur toute une palette de nuances (le pianissimo du «Requiem æternam»), endossant avec conviction la vision théâtrale souhaitée par le chef d’orchestre: le «Sanctus» en est un magnifique exemple.
Quant aux solistes, on ne niera pas l’existence de tel ou tel défaut par moments mais, globalement, il s’agit d’un excellent quatuor. John Relyea est une basse rayonnante qui, parfois, force un peu le trait mais comment résister à sa tenue dans le «Confutatis» ou dans le «Lux æterna»? De même, Stuart Neill, qui a chanté cette partition à de nombreuses reprises, que ce soit sous la direction de Carlo Maria Giulini (voir ici) ou, plus récemment, sous celle de Tugan Sokhiev (voir ici), est très convaincant dans son «Ingemisco», moment tant attendu par les connaisseurs de l’œuvre. L’impression laissée par la mezzo Karen Cargill est peut-être un peu plus mitigée, sa voix manquant parfois de chair, mais elle tient vaillamment sa partie, atteignant elle aussi des sommets comme lors de son superbe duo avec la soprano dans le «Recordare». Quant à Christine Brewer, elle impressionne par sa tenue, par son aplomb et, même si elle n’aborde pas le «Libera me» avec autant de théâtralité que certaines de ses consœurs, elle en donne une version tout à fait convaincante tant par sa clarté que par la précision de son émission.
Indéniablement, cet enregistrement mérite d’être très chaudement recommandée même s’il n’atteint pas forcément les sommets signés notamment Fricsay, Giulini (notamment son témoignage en concert capté en avril 1964 et publié chez BBC Legends) ou Karajan (sa première version chez Deutsche Grammophon).
Sébastien Gauthier
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