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06/30/2010
Gioacchino Rossini : La Cenerentola
Joyce DiDonato (Angelina), Juan Diego Flórez (Don Ramiro), David Menéndez (Dandini), Bruno de Simone (Don Magnifico), Cristina Obregón (Clorinda), Itxaro Mentxaca (Tisbe), Simón Orfila (Alidoro), Chœur et Orchestre du Gran Teatre del Liceu, Patrick Summers (direction), Juan Font (mise en scène), Jesús Regueira (réalisation)
Enregistré à Barcelone en 2008 – 146’
Album de 2 DVD Decca 074 3305 – Format : 16/9 – Region code : 0 (worldwide)





La Donna del lago, à Garnier, vient de le confirmer : le couple DiDonato/Flórez est le couple rossinien du moment. Et cette Cenerentola barcelonaise constitue sans doute aujourd’hui le meilleur choix en DVD. La mezzo américaine rayonne, par une voix homogène du grave à l’aigu, un timbre charmeur – le plus charmeur, peut-être, depuis Berganza –, une vocalisation à l’éclat satiné, un superbe legato, un art subtil de la coloration, son incarnation non moins subtile d’Angelina, souriante et mélancolique, fraîche et mystérieuse. Le ténor ne rayonne pas moins, par les mêmes qualités, avec une flamboyance jubilatoire dans la vocalise, une sincérité juvénile qui en font le meilleur interprète de Ramiro – lui qu’on ne dit souvent que chanteur s’identifie ici totalement à son rôle. Ils y croient et on y croit – ne chantent-ils pas, d’ailleurs, deux de leurs rôles fétiches ? Difficile pour les autres d’atteindre de tels sommets : ils s’en approchent parfois, même si les clés de fa n’effacent pas le souvenir des grandes basses bouffes d’hier ou de jadis, tels Bruscantini, Capecchi ou Montarsolo. On trouvera le Dandini de David Menéndez un peu vert, un rien empêtré dans des vocalises rapides qu’il a ici ou là tendance à savonner, surtout dans sa cabalette ; la qualité du timbre, le dosage stylé du buffa n’en font pas moins un valet attachant, dont le déguisement en prince n’est pas sans ambiguïté. Pas davantage d’excès burlesques chez le Don Magnifico de Bruno de Simone, voix courte mais bien conduite, à la fois comique et pitoyable en père dénaturé – parfait duo du second acte. Excellent Alidoro, en tout cas de Simón Orfila, Douglas récemment remarqué dans la Donna del lago parisienne. Les deux sœurs, elles, sont pimbêches à souhait. Sans rien réinventer, Patrick Summers, le directeur de l’Opéra de Houston, coproducteur de cette Cenerentola, dirige avec élan et finesse, sans tapage ni mollesse, scrupuleux et coloré, maîtrisant bien, entre autres, la difficile gradation du finale du premier acte.


Fondateur de la troupe de théâtre de rue Comediants, Joan Font joue sur le décalage loufoque sans déconstruire l’œuvre dans l’esprit d’un Regietheater prétentieusement hermétique. Des décors aux couleurs vives, criardes même, flash, rappelant les géométries d’un certain Picasso, où les effets de lumières crues créent une sorte de vertige, servent de cadre à une production oscillant entre le conte de fées et la revue, la commedia dell’arte et le fantastique, la clownerie et le roman à l’eau de rose, dont un Alidoro mi-magicien mi-Sarastro orchestre l’histoire. C’est surtout aussi souplement qu’impeccablement rythmé, parfois chorégraphié – un charmant ballet de petits rats accompagne aussi l’ensemble de l’action. Et toujours en parfait accord avec la musique : du vrai théâtre musical, en somme. Le metteur en scène ne sacrifie jamais la direction d’acteurs aux effets : le Sextuor du second acte, où les personnages calquent sur la musique et les onomatopées du texte des gestes de marionnettes, est très réussi. Même le pied-de-nez final à l’histoire passe très bien : devant l’âtre qui, depuis le début, a constitué le cœur du décor, Cendrillon se retrouve à balayer, le sourire aux lèvres, après un joli rêve.


Didier van Moere

 

 

 

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