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04/30/2010
«Call Me Flott»
Mélodies anglaises de compositeurs britanniques, français et américains

Felicity Lott (soprano), Graham Johnson (piano)
Enregistré à The Music Room, Champs Hill, West Sussex (2009) – 75’
Champs Hill Records CHRCD003 (distribué par Intégral)





C’est à un couple de simples particuliers mélomanes, David et Mary Bowerman, que l’on doit la notoriété croissante de Champs Hill, endroit idyllique perdu dans la campagne du West Sussex. Un jardin fastueux, chef-d’œuvre d’horticulture où les rhododendrons surabondent sur fond de gazons tutélaires, qui est aussi devenu un haut lieu musical, ses propriétaires ayant décidé d’y édifier, en toute simplicité, une véritable salle de concerts à côté de leur maison. Le bâtiment, clair, vitré, doté d’une haute charpente et d’une acoustique semble-t-il réussie, peut accueillir environ 160 auditeurs, davantage invités conviés que festivaliers payants, d’impressionnantes pointures (Felicity Lott, Thomas Allen, le compositeur Sir Richard Rodney Bennett ou le violoncelliste Julian Lloyd Webber) ayant pris l’habitude de se produire là, dans une ambiance que l’on imagine inimitable, quasiment familiale, douillette et délicieusement british.


Autre particularité : Champs Hill dispose, outre une salle de concerts, d’un véritable studio d’enregistrement attenant. Les artistes invités peuvent ainsi faire coïncider de courtes vacances dans le West Sussex avec de fructueuses sessions. C’est ici, par exemple, qu’a été réalisé le splendide album «My Own Country» de Felicity Lott et Graham Johnson, florilège de Mélodies anglaises publié par ASV. Et le relais est pris à présent par les propriétaires du lieu, qui viennent de créer un label indépendant dont ce tout nouvel album, «Call Me Flott» constitue le premier et indiscutable fleuron.


On ne présente plus Felicity Lott, interprète distinguée des répertoires français et allemand grâce à une rare aptitude à s’exprimer dans des langues étrangères. Dans l’univers anglophone qui lui reste cependant le plus familier, cette grande dame du chant paraît encore plus libre, encore plus souverainement maître d’une palette expressive qui va de la méditation poétique à l’extravagance la plus farfelue sans jamais perdre sa franchise naturelle. Comme toutes les prestations de Felicity Lott en récital, ce nouveau disque est un univers à lui tout seul, où chaque mélodie brille par des feux qui lui sont propres mais où tout semble aussi s’enchaîner avec une merveilleuse logique. Et il n’y a plus qu’à se laisser guider, de grands noms (Barber, Bridge, Cole Porter, voire Poulenc, Hahn ou Gounod dans leurs rares mais authentiques mélodies anglaises) en petits trésors rarement explorés (Bush, Hopkins, Coward…). Et à mesure que le récital progresse Dame Felicity pousse évidemment toujours plus loin le bouchon, jusqu’à de délicieux instants de délire à déguster à la petite cuiller : The Physician de Cole Porter, le désopilant A Word on my Ear de Donald Swann, où le magistral Call me Flo’ de Jerome Kern (Flo se transformant ici en Flott, petite coquetterie d’interprète que l’on autorisera sans peine)…


La perfection de l’accompagnement de Graham Johnson, un complice de longue date, n’est plus à dire. Et même l’acoustique un peu trop réverbérante de Champs Hill ajoute à l’authenticité ambiante. Le récital s’achève à la plage 27 avec The party’s over de Noel Coward, détaillé par Felicity Lott avec la même distinction mélancolique qu'une Maréchale devant son miroir. Un instant de grâce trop bref, parmi bien d’autres dispensés par cette précieuse perle discographique, à ne bouder sous aucun prétexte.


Le site de Champs Hill Records


Laurent Barthel

 

 

 

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