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03/09/2010 Michael Haydn Marc Vignal
Bleu nuit Horizons, 176 pages – 20 €
Pas facile de s’appeler Michael Haydn et de se trouver le frère du compositeur le plus célèbre de son temps. De cinq ans le cadet de Joseph, mort trois avant lui, ce « petit frère », nous a confié Marc Vignal, fut pourtant « plus que « presque » grand », justifiant cette monographie aussi substantielle que brève. Car l’auteur du monumental et incontournable Haydn paru chez Fayard, s’il est l’homme des grandes sommes – son Sibelius est à peine moindre -, excelle également dans les petites formes, comme en témoigne un indispensable Mahler édité dans la défunte collection « Solfèges » du Seuil.
De 1763 à sa mort, Michael Haydn fit carrière à Salzbourg, comme « musicien de cour » et « premier violoniste » engagé par le prince-archevêque Schrattenbach, puis comme organiste de l’église de la Trinité en 1777 et de la Cathédrale en 1782. Rien d’étonnant si une grande partie de sa production, à côté de ses quarante-quatre symphonies, consiste en trente-huit messes latines et neuf messes allemandes, ces dernières composées pour répondre à la réforme de Colloredo, le successeur de Schrattenbach. Ses démêlés avec Mozart en ont faussé l’image : un esprit éclairé voulait rompre avec la pompe des messes latines pour rapprocher la liturgie des fidèles.
Certaines partitions de Michael Haydn sont des chefs-d’œuvre, qui ont souffert de l’ombre portée des deux géants qu’étaient le frère aîné et Mozart. Ce dernier, à la fois admiratif et envieux d’un rival plus docile et mieux traité, ne s’y trompa pas et se souvint plus d’une fois de ses partitions, belle occasion pour Marc Vignal de retracer des Vies salzbourgeoises parallèles comme il le fit, justement, dans son Mozart et Haydn (Fayard toujours) : le Requieminachevé de Wolfgang Amadeus, par exemple, serait-il ce qu’il est sans le Requiem en ut mineur de Michael, composé à l’occasion des funérailles de Schrattenbach, une des ses plus grandes réussites ? Mais il faut écouter aussi la Missa Sancti Hieronymi en ut majeur, non moins grandiose, qui porte le nom de son patron, le rayonnant deuxième Lobgesang de Venerabili Sacramento, beaucoup plus modeste de proportions et d’effectif, « une de ces pièces fascinantes, à nulle autre pareilles et qu’on ne se lasse pas de réentendre », ainsi que la Missa Sancti Francisci, commande de l’impératrice Marie-Thérèse, qui se destina la partie de soprano. Michael écrivit également pour des cadres plus intimes, comme l’attestent ces Quatuors pour voix d’homme sans accompagnement, où perce Schubert. S’il ne fut pas son élève comme Weber, le compositeur de La Belle Meunière, de passage à Salzbourg en 1825, tint à se recueillir sur la tombe de Michael, au cimetière Saint-Pierre.
Marc Vignal, une fois de plus, concilie la pertinence des analyses avec l’exactitude biographique. Il nous donne, surtout, l’envie de découvrir un maître méconnu et de compléter un tableau dont on croyait, à tort, connaître toutes les figures.
Didier van Moere
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