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01/07/2010
«Vivaldi opera arias: Pyrotechnics»
Antonio Vivaldi : Catone in Utica, RV 705: «Come in vano il mare irato» & «Chi può nelle sventure… Nella foresta» – Semiramide, RV 733: «E prigioniero e re» – La fida ninfa, RV 714: «Alma oppressa» & «Destin nemico… Destin avaro» – Griselda, RV718: «Agitata da due venti» – Extraits d’opéras inconnus: «Il labbro ti lusinga» & «Sin nel placido soggiorno» – Ipermestra, RV 722: «Vibro il ferro» – Farnace, RV 711: «No, ch’amar non è fallo in cor guerriero... Quell’usignolo « & «Ricordati che sei» – Tito Manlio, RV 778: «Splender fra ’l cieco orror» – Rosmira fedele, RV 731: «Vorrei dirti il mio dolore»
Vivica Genaux (mezzo-soprano), Europa Galante, Fabio Biondi (direction)
Enregistré à la Biblioteca del Monastero di San Giovanni, Parme (17-23 décembre 2008) – 75’42
Virgin Classics 50999 694573 0 2 – Traduction des textes chantés et notice trilingue (anglais, français, allemand) de Frédéric Delaméa






Antonio Vivaldi : Tito Manlio, RV 738: «Sonno, se pur sei sonno – Juditha Triumphans, RV 644: «Armatæ face et anguibus – La Verità in Cimento, RV 739: «Solo quella guancia bella» & «Cara sorte di chi nata» – Farnace, RV 711: «Gelido in ogni vena» & «Forse, o caro, in questi accenti» – Arsilda, Regina di Ponto, RV 700: «Tornar voglio al primo ardore» – Orlando furioso, RV 728: «Sol da te, mio dolce amoro» & «Nel profondo, cieco mondo» – Ottone in villa, RV 729: «Misero spirto mio» – Griselda, RV 718: «Ho il cor già lacero» – L’Incoronazione di Dario, RV 719: «Non mi lusinga vana speranza» – Orlando finto pazzo, RV 727: «Lo Stridor, l’orror d’Averno» & « Anderò, volerò, griderò» – L’Olimpiade, RV 725: «Mentre dormi Amor fomenti»
Magdalena Kozená (mezzo-soprano), Venice Baroque Orchestra, Andrea Marcon (direction)
Enregistré au Kulturzentrum Grand Hotel de Toblach/Dobbiaco (octobre 2008) – 77’19
Archiv Produktion 477 8096 (distribué par Universal) – Traduction des textes chantés et notices trilingues (anglais, allemand, français) sur «Magdalena Kozená et Vivaldi» de Lindsay Kemp et sur les œuvres de Kenneth Chalmers








L’une est aussi blonde que l’autre est brune. L’une comme l’autre ont axé leur répertoire sur la période baroque, Händel notamment pour la première, Vivaldi et Scarlatti pour la seconde, tout en explorant avec délice d’autres contrées (Janácek et Dvorák d’un côté, Donizetti et Rossini de l’autre). Toutes les deux sont aussi belles que leurs voix sont extraordinaires. Il était donc inévitable de confronter ces deux récitals consacrés à Antonio Vivaldi (1678-1741) par la mezzo-soprano tchèque Magdalena Kozená et par sa consœur américaine (née en Alaska) Vivica Genaux, également mezzo.


Les deux disques sont construits sur la même logique, alternant avec bonheur les grands airs d’opéras de Vivaldi et certaines arias beaucoup plus rares. Que de chemin parcouru entre la création d’Ottone in Villa à la fin du mois de mai 1713, premier opéra du compositeur vénitien, et Rosmira, pasticcio créé au théâtre de Sant’Angelo en 1738! Plus de quarante opéras répertoriés (numérotés RV 695 à RV 740) dont une partie non négligeable est malheureusement perdue (Tieteberga RV 737, Ginevra principesse di Scozia RV 716, Aristide RV 698, ...) sauf à être redécouverte par hasard comme ce fut le cas en 2002 pour Motezuma RV 723 (opéra retrouvé en Ukraine par le musicologue hambourgeois Steffen Voss). Antonio Vivaldi fut véritablement un maître de l’opéra baroque, ne trouvant en Händel que son seul et digne rival en matière de virtuosité vocale et de richesse instrumentale (Jean-Baptiste Lully constitue un génie à part et ne peut donc, à notre sens, leur être directement relié). A chaque extrait, il est évident que les traits de l’orchestre vivaldien sont bien là: contrastes mélodiques (s’agissant notamment des nuances) et rythmiques, reprises où la phrase précédemment entendue n’a plus rien à voir avec sa nouvelle audition, diversité des instruments requis (cordes, hautbois, flûtes, cors, ...). Encore une fois, on ne peut qu’être émerveillé par l’imagination développée par le Prêtre roux : à ce jeu, on serait bien en peine de distinguer la valeur d’Europa Galante ou du Venice Baroque Orchestra, deux ensembles dont les qualités ne sont plus à louer, dont les chefs (respectivement Fabio Biondi et Andrea Marcon) savent comme peu manier le feu et la glace et dont l’engagement s’avère à chaque instant époustouflant! Avec de tels partenaires, il en va évidemment de même pour les chanteuses.


Vivica Genaux nous éblouit. Ici aussi, que doit-on louer en premier lieu? Sa capacité à étonner l’auditeur en chantant dans un emportement total avant de faire une brève pause et, ô surprise, de repartir de plus belle avec un orchestre au diapason de la folle énergie qu’elle dégage? Ecoutez pour ce faire le magnifique «Come in vano il mare irato» tiré de Catone in Utica (opéra tardif de Vivaldi puisque créé à Vérone en 1737 seulement): un moment de pur bonheur... Issu de Rosmira fedele, «Vorrei dirti il mio dolore» permet à Vivica Genaux de nous montrer une autre facette de ses talents, jouant sur les sonorités, prenant plaisir à goûter les longs silences de la partition qui aident celle-ci à mieux respirer encore. La pure virtuosité vocale est absente: le poids des mots, tantôt chantés, tantôt susurrés à l’oreille, en arrive presque à primer la musique, preuve que Vivaldi était, lorsqu’il composait des opéras, davantage homme de théâtre que compositeur lyrique. De même, quoi de commun entre le fier «Chi può nelle sventure... Nella foresta» (Catone in Utica), où la sonorité des cors forme un parfait écho à la voix de bronze de Vivica Genaux, et le galant extrait de Farnace, «Ricordati che sei»? Signalons également le morceau de bravoure le plus célèbre de ce disque, le fameux «Agitata da due venti» issu de Griselda, opéra-phare de Vivaldi (1735) où sa compagne, la mezzo-soprano Anna Giro, se voyait pour la première fois confier le rôle-titre. Vivica Genaux l’interprète avec un feu qui nous brûle à chaque note. Enfin, on ne peut passer sous silence ce qui constitue peut-être le chef-d’œuvre absolu de ce récital, l’air «Sin nel placido soggiorno» tiré d’un opéra aujourd’hui disparu. Frémissements des violoncelles, trémolos des flûtes (superbement tenues par Petr Zejfart et Marco Scorticati), cet air, «mi-déclaration d’amour, mi-cri de vengeance» comme l’écrit très justement Frédéric Delaméa, est un condensé de ce que Vivaldi peut réussir de la façon la plus parfaite: un déferlement d’émotion servi par un accompagnement orchestral millimétré.


Si Vivica Genaux nous éblouit, Magdalena Kozená en ressort-elle pour autant assombrie par l’éclat de sa «rivale»? Nullement et ce pour une raison fondamentale: elle ne joue pas sur le même registre. Alors que Vivica Genaux aborde Vivaldi principalement sous l’angle de la virtuosité vocale, Magdalena Kozená insiste davantage sur la dimension théâtrale de l’œuvre du Vénitien. Ici encore, on ressort captivé par la beauté de l’aria «Sonno, se pur sei sonno» tiré de Tito Manlio (opéra qui serait vraisemblablement un pasticcio, composé en 1719 en un temps record: cinq jours !) dans lequel le fils du héros attend avec gravité son exécution pour avoir désobéi à son père. La déclaration de Roxane au sultan Selim est tout aussi vibrante, l’accompagnement orchestral (irréprochable de bout en bout) prenant à cette occasion quelques accents écossais de guimbarde ou autre instrument du même genre («Solo quella guancia bella»). Sommet de ce disque, «Sol da te, mio dolce amoro» tiré du fameux Orlando furioso: un dialogue en lévitation entre la flûte virtuose dans la tristesse de Michele Favaro et la voix profonde de Magdalena Kozená, toutes deux guidées par une pulsation dont la rigueur fait d’autant plus ressortir la dimension dramatique. Signalons, pour ceux qui souhaiteraient faire un comparatif, qu’ils peuvent, cette fois-ci, écouter la conversation entre la mezzo-soprano et une flûte... à bec dans la belle aria «Cara sorte di chi nata» extrait de La Verità in cimento, opéra de la maturité de Vivaldi, créé en octobre 1720 au Teatro Sant’Angelo de Venise. A l’instar de Vivica Genaux, Magdalena Kozená a souhaité interpréter un passage relativement connu du grand public: avec raison, elle a choisi le délicat «Mentre dormi Amor fomenti» tiré de L’Olimpiade qui nous plonge dans un insoupçonnable état d’apesanteur, concluant ce disque dans un véritable rêve lyrique.


Depuis que Cecilia Bartoli a enregistré son célébrissime «Album Vivaldi» (c’était en 1999), plusieurs artistes lui ont emboîté le pas avec plus ou moins de bonheur. Force est de constater que nous tenons là deux disques absolument superbes et que leur achat s’impose sans aucune hésitation. A ceux qui pensent encore que le bonheur musical ne peut exister ici-bas, qu’ils écoutent un instant ces interprètes pour s’en persuader de façon définitive!


Le site de Vivica Genaux
Le site d’Europa Galante
Le site de Magdalena Kozená


Sébastien Gauthier

 

 

 

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