About us / Contact

The Classical Music Network

CD

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

11/27/2009
Wolfgang Amadeus Mozart : Don Giovanni, arrangement pour quatuor à cordes
Quatuor Franz Joseph
Enregistré en 2006 et 2007 à Mirabel (Québec) – 126’
Atma Classique ACD22559 (distribué par Intégral)





Les opéras de Mozart ont suscité tôt des arrangements pour petites formations qui ont contribué à leur propagation à travers l’Europe pré-romantique. Des réductions pour ensemble à vent mais aussi pour quatuor à cordes ou flûte et trio à cordes, effectuées par des compositeurs secondaires mais parfois habiles, et que l’on peut s’amuser à retrouver aujourd’hui dans les vieux fonds d’éditeurs ou dans les bibliothèques.


Une telle curiosité peut s’avérer très productive, quand elle permet par exemple d’exhumer une adaptation aussi réussie que ce Don Giovanni intégral pour quatuor à cordes, publié par l’éditeur Simrock à Bonn vers 1798. Un travail resté anonyme dont la découverte séduit continuellement, tant la réduction d’échelle d’un chef-d’œuvre s’y effectue sans perte flagrante d’intérêt, voire ouvre des perspectives inédites.


Amenuiser Don Giovanni sur quatre lignes instrumentales peut sembler une gageure, surtout pour un opéra aussi riche en ensembles vocaux complexes, mais finalement il ne s’agit là que d’un retour hypothétique à la particelle d’origine, cet état primitif du travail de Mozart dont la rédaction s’effectuait, on le sait, sur un nombre limité de portées. Or, même à ce stade de premier jet la perfection de la mise en forme était déjà limpide et cohérente, la dispersion définitive des lignes aux divers voix et instruments fonctionnant simplement comme l’ultime enrichissement du projet initial. Découvrir l’écriture lyrique mozartienne ainsi reconcentrée à son stade de noyau dur constitue un voyage inédit dans un opéra dont on pourra ainsi apprécier la conception avec une acuité nouvelle. Avec pour résultat le plus probant la perception immédiate d’un parfait équilibre formel, démonstration supplémentaire, s’il en était besoin, de l’interchangeabilité de l’écriture entre instruments et voix chez Mozart, qui même à l’opéra élabore des formes aussi rigoureuses que dans une sonate, un concerto ou, précisément, un quatuor à cordes. Et, bien sûr, inversement…


Le travail de l’adaptateur, ici remarquablement inspiré, n’est jamais tombé dans le piège de la simple mélodie accompagnée. Au contraire les parties vocales sont redistribuées à tous les étages du quatuor, avec à la clé une restitution polyphonique d’une qualité digne des meilleures musiques de chambre de Mozart ou Haydn. Tous les récitatifs, secs ou accompagnato, ont été prudemment éliminés, à l’exception de celui de Donna Anna découvrant le cadavre du Commandeur, d’une intensité harmonique sans doute perçue par le transcripteur, et à juste titre, comme incontournable. Ne subsistent donc qu’airs et ensembles, qui s’enchaînent comme les éléments variés d’une longue suite instrumentale à la fois familière et perpétuellement nouvelle. Parfois les réussites sont remarquables, dignes des meilleurs mouvements des quatuors de Mozart, parfois le résultat paraît davantage tributaire du vécu de l’auditeur, qui ne peut s’empêcher ici ou là de surimprimer au message sonore sa propre mémorisation d’un opéra familier. Mais l’expérience est assurément séduisante et méritait d’être tentée.


Vu la qualité du matériel musical exhumé, on n’en regrettera que davantage la partialité de l’interprétation proposée. Une lecture « sur instruments d’époque » bien travaillée, avec d’évidentes recherches sur les phrasés, les couleurs, les vibratos variables, le tout à la recherche d’une vie très « vocale » mais qui, finalement, fonctionne à contresens. A force de maltraitances et de dramatisations expressives les sonorités paraissent décharnées (le premier contact avec l’Ouverture, squelettique, est même effrayant) et plus généralement l’inconfort sonore reste pénalisant. On rêve de ce que pourrait dégager aujourd’hui d’une telle partition la plénitude d’un Quatuor Ebène ou Prazák… En attendant une réussite plus probante, on saluera néanmoins le courage et l’originalité du projet du Quatuor Franz Joseph de Montréal.


Laurent Barthel

 

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com