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09/10/2009
Frédéric Chopin : Nocturnes, opus 9 n° 1 et n° 2, opus 15 n° 1 et n° 2, opus 27 n° 1 et n° 2, opus 32 n° 2, opus 37 n° 1, opus 48 n° 1, opus 55 n° 1, opus 62 n° 2 et en ut dièse mineur, opus posthume

Maria João Pires (piano)
Enregistré à la Großer Saal de la Musikhoschule, Munich (janvier 1995) et au Henry Wood Hall, Londres (janvier-avril 1996) – 61’38
Deutsche Grammophon (collection « Grand Prix ») 477 7583 – Notice trilingue de Jeffrey Kallberg (anglais), Wolfgang Dömling (allemand) et Alain Pâris (français)






A l’heure où Maria João Pires sort un nouveau disque consacré à Chopin (chez Deutsche Grammophon) où figurent notamment les deux Nocturnes de l’Opus 62, il est opportun de revenir sur ce disque, paru il y a quelques mois, qui démontre une fois encore les profondes affinités que la grande pianiste portugaise entretient avec l’œuvre du compositeur polonais.


Frédéric Chopin (1810-1849) a composé un premier ensemble de trois Nocturnes dès 1830 : respectivement en si bémol mineur, mi bémol majeur et si majeur, ils marquent d’emblée un véritable tournant dans ce genre musical. En effet, durant le XVIIIe siècle, et comme son nom l’indique, le nocturne (« notturno ») est avant tout une œuvre jouée à la tombée de la nuit, destinée à un instrument seul (principalement la mandoline ou la guitare) ou à un petit orchestre. On peut ainsi y rattacher les deux célèbres œuvres de Wolfgang Amadeus Mozart que sont Eine kleine Nachtmusik (« Une petite musique de nuit ») et la Serenata notturna (« Sérénade nocturne »). A partir du début du XIXe siècle, le nocturne devient une pièce essentiellement dédiée au piano qui, dans le sillage du romantisme, permet au compositeur de livrer à l’auditeur ses pensées et les tourments de son âme. Loin de n’y voir qu’un exercice de style, Frédéric Chopin a ainsi composé des nocturnes qui sont de véritables bijoux musicaux où la délicatesse masque à chaque instant l’agilité de l’écriture et la recherche mélodique qui y sont déployées.


Dès l’écoute des premières notes du Nocturne opus 9 n° 1, on ne sait ce qu’il faut le plus admirer : la délicatesse du toucher ? La légèreté des doigts dont on sent qu’ils osent à peine effleurer les touches du clavier tant celles-ci lui semblent fragiles ? L’énergie contenue qui sous-tend le jeu de Pires ? Ou alors, mais c’est surtout le cas du Nocturne opus 9 n° 2, son dépouillement ? Quelle que soit l’option choisie, on demeure subjugué par la très grande liberté dont fait preuve Maria João Pires qui, servie par une parfaite connaissance de la partition, lui permet, par un simple accelerando ou une légère retenue, de donner sa pleine expression à telle ou telle phrase. Contrairement à une image d’Épinal tenace, Chopin ne doit pas être résumé au joueur de salon si souvent brocardé. En témoigne le Nocturne opus 15 n° 1, où la section centrale, tellurique, brise net la douce mélopée introductive avant qu’elle ne soit reprise par une interprète sachant doser de façon admirable les émotions suscitées par la partition. Les deux Nocturnes de l’Opus 27 nous font, quant à eux, basculer dans un univers plus incertain, d’aucuns diront plus angoissant. Les mélodies initiales s’épanouissent rapidement avant de se métamorphoser en un propos beaucoup plus préoccupé, la timidité prenant le pas sur la vélocité, la noirceur sur la ballade. L’Opus 32 n° 2 est plus tardif que les précédentes compositions puisqu’il date vraisemblablement de la fin de l’année 1836 : la félicité qui ressort de cette brève pièce est peut-être la traduction de la passion que Chopin éprouve à cette époque pour la jeune Marie Wodzinska, dont il ne sait pas encore qu’elle ne deviendra jamais l’épouse qu’il espérait tant. Le Nocturne opus 48 n° 1 date quant à lui de 1841, autant dire d’une période particulièrement féconde chez Chopin qui compose à la même époque la Polonaise opus 53 et quelques Mazurkas parmi les plus inspirées. Tout en ne se concentrant que sur la musicalité, Maria João Pires démontre une fois de plus toute la technique que requiert l’interprétation de ces pièces dont la facilité n’est, comme souvent, qu’apparente. Un mot enfin sur le Nocturne en ut dièse mineur devant lequel on ne peut que s’incliner puisque, bien que publié à titre posthume, il a été composé en 1830, par un jeune homme de vingt ans qui avait déjà une maîtrise tout à fait exceptionnelle de son instrument.


Comme Maria João Pires le confiait elle-même, en juin 2009, à nos confrères du magazine Classica : « Chopin était très rigoureux et il aurait peut-être détesté notre façon de jouer. J’y pense souvent... D’un autre côté, je pense que ce n’est pas tellement important, qu’il aime ou qu’il n’aime pas. Si l’on est vrai, si l’on ne pense pas à séduire le public ou le critique, l’essentiel est là. » Il va sans dire que c’est exactement ce qui transparaît (et de quelle façon !) dans ce disque, introduction idéale (parmi d’autres il est vrai…) à l’œuvre pianistique de Frédéric Chopin.


Le site de la collection «Grand Prix» de Deutsche Grammophon


Sébastien Gauthier

 

 

 

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